Entretien

Vincent Heneine : “Winter Palace est un petit bijou”

17 février 2025
Par Agathe Renac
Vincent Heneine dans “Winter Palace”.
Vincent Heneine dans “Winter Palace”. ©RTS / Point Prod / Oble / Netflix

Près d’un mois après le succès de Super mâles, Vincent Heneine est de nouveau à l’affiche de l’une des séries les plus regardées sur Netflix. On a profité de l’occasion pour l’interroger sur cette expérience étonnante, et l’acteur nous a fait entrer dans les coulisses de cette production avec beaucoup d’humour et de bienveillance.

Présentez-nous la série Winter Palace en une minute top chrono !

Winter Palace raconte l’histoire d’André Morel, un homme qui se lance dans un projet un peu fou en 1899. Ce jeune hôtelier suisse est fasciné par les hôtels cinq étoiles et il aimerait en ouvrir un durant la saison hivernale – chose qui n’existait pas à l’époque. Il va donc créer le premier hôtel de luxe de ce genre dans les Alpes suisses pour une clientèle assez aisée. Il embarque plusieurs personnes dans cette aventure, dont sa femme, Rose, mais aussi ses amis : Marcus, son ami d’enfance, et mon personnage, César Voclain, un chef qu’il a connu au Savoy, à Londres, et avec qui il a fait les quatre cents coups.

Quelques semaines après le succès de Super mâles, vous êtes de nouveau à l’affiche d’une série qui fait partie des programmes les plus visionnés sur Netflix. Comment expliquez-vous ce succès ?

C’est fou ! Je suis vraiment très heureux. D’autant plus que les deux shows sont très différents, c’est vraiment deux salles, deux ambiances. Et je suis très content pour les deux ! Je pense réellement que Winter Palace est un petit bijou. C’est une série d’époque comme il s’en fait peu, et c’est rare de voir des producteurs prendre le risque de se lancer dans ce type d’aventure.

Le but, c’est de la porter encore plus haut dans le top 10, mais on gagne une place chaque jour, donc c’est assez encourageant. Toute l’équipe est très fière d’avoir travaillé sur ce projet, mais aussi très enthousiaste face à la réception du public. On fait ce genre de production avant tout pour les spectateurs, donc c’est toujours satisfaisant de les voir répondre présents.

Qu’est-ce qui vous a attiré dans ce projet ?

J’ai rencontré le réalisateur Pierre Monnard lors du callback – le dernier tour pour les castings – et j’ai senti que c’était un homme très investi, super bienveillant et avec une pêche d’enfer. Ça m’a tout de suite donné envie de travailler avec lui. J’ai aussi adoré le scénario et le fait que ce soit une série d’époque.

1899, c’est l’apparition de toutes les technologies qui ont marqué le XXᵉ siècle, comme l’électricité et le téléphone. Winter Palace s’intéresse à ces sujets et montre comment les personnages accueillent et découvrent ces nouveautés, un peu comme nous avec l’arrivée d’Internet, un siècle plus tard.

Cyril Metzger dans Winter Palace.©RTS/Point Prod/Oble/Netflix

J’ai aussi beaucoup aimé le parcours et l’essence même de mon personnage. César Voclain est un homme avec plein de cicatrices. Il est très tourmenté, il doute beaucoup et il n’a pas vraiment confiance en lui, même si c’est un grand chef. Il ne réalise pas qu’il a de l’or dans les mains et il s’autodétruit avec une consommation excessive d’alcool.

Sa relation avec les autres protagonistes est très intéressante, que ce soit avec son vieil ami André ou avec la femme de ce dernier. Ils commencent à se vouvoyer, finissent par se tutoyer et il se passe peut-être quelque chose entre eux, mais je n’en dirai pas plus. [Rires] J’ai beaucoup aimé jouer ce rôle de chef de brigade d’un hôtel de luxe. C’était très intéressant.

Comment percevez-vous votre personnage ? Vous reconnaissez-vous en lui ?

Les personnages de Winter Palace sont assez marqués, alors il me fallait des références assez précises pour incarner ce César Voclain. Je voulais lui insuffler un côté De Funès, même si on est à l’opposé de lui physiquement – mais, comme on dit, “Il faut viser la Lune si on veut atterrir dans les étoiles”. Pour moi, la lune, c’était vraiment De Funès. Je me suis aussi inspiré du capitaine Haddock pour façonner ce rôle.

César est quelqu’un de très tourmenté et je me retrouve dans cet aspect de sa personnalité, car moi aussi, il m’arrive d’être dans ce genre de phases où je suis habité par le tourment, le doute, le manque de confiance en moi. Dans ces moments, je remets en question mon talent de façon extrême. Voclain est très tendre – mais ce n’est pas un loser, contrairement à mon rôle dans Super mâles – et il essaie de se dépatouiller dans ce tourbillon de vie.

Les décors de Winter Palace.©RTS/Point Prod/Oble/Netflix

On comprend plus tard qu’il a de gros problèmes familiaux et que son exutoire est la cuisine. C’est le meilleur dans ce domaine, mais, quand il est trop sombre, il se met à picoler énormément pour fuir ses pensées et sa réalité. Grâce à Rose, il va reprendre son hygiène de vie en main. J’adore ce personnage, car je le trouve très touchant même si c’est un gueulard – j’avais des petites extinctions de voix durant le tournage à force de crier. [Rires] J’avais déjà incarné un petit cuisinier, mais là, j’ai adoré jouer ce rôle de chef.

J’ai fait un petit stage de cuisine avec un ami cuistot pour réapprendre les gestes et anticiper les mouvements sur le plateau, mais je n’avais pas imaginé que les instruments de cuisine seraient en cuivre, donc très lourds. [Rires] Ça a été un petit choc quand je les ai portés. Les cuisiniers de l’époque devaient avoir de sacrés avant-bras ! L’autre difficulté, c’était de jouer un personnage alcoolisé. Ça a l’air très simple, mais les mecs bourrés cherchent toujours leur équilibre. Je devais donc jouer cet aspect, sans être too much.

Comment avez-vous appréhendé ce tournage ? Le cadre historique a-t-il apporté une dimension particulière par rapport à vos précédentes expériences ?

J’avais interprété Albert Falco dans L’odyssée de Jérôme Salle, et le film retrace l’évolution du personnage sur plusieurs décennies. En revanche, Winter Palace était ma toute première série d’époque et c’était un rêve d’enfant de pouvoir me projeter dans un siècle qui n’était pas le mien. Il y a un vrai cadre historique, mais la force de cette production est sa modernité. Par exemple, il y a beaucoup d’anachronismes assumés.

Les décors de Winter Palace.©RTS / Point Prod / Oble / Netflix

Je me dois aussi de saluer le travail de la cheffe costumière, Valérie Adda, qui a fait un travail remarquable sur les costumes des comédiens et des figurants. On est tout de suite plongé dans les années 1890, et le fait de mettre toutes ces couches de vêtements me plongeait vraiment à cette époque. Ça laisse aussi de grands souvenirs de tournage, comme le fait de marcher dans la neige avec ces tenues qui n’ont pas toutes les protections d’aujourd’hui. C’était très compliqué quand on devait s’enfoncer dedans, car on sentait réellement le froid. [Rires] Ça nous a donné un aperçu de leur mode de vie.

Quelle autre époque ou décennie aimeriez-vous explorer à travers un prochain rôle ?

Mon époque de “rêve”, c’est les années 1940. Elles ont bercé mon enfance. Mon grand-père était un grand résistant et il m’a beaucoup parlé de la période de la Seconde Guerre mondiale. C’est un sujet qui me fascine depuis petit. J’aimerais beaucoup jouer dans une série qui se déroule entre 1941 et 1944. Aujourd’hui, on se questionne sur la dureté de cette décennie et on se demande comment nos ancêtres ont pu traverser ce moment.

Les décors de Winter Palace.©RTS/Point Prod/Oble/Netflix

J’ai eu la chance d’être bercé par les aventures de mon grand-père alors qu’il avait tout juste 20 ans à ce moment-là. J’ai toujours admiré ces jeunes gens qui se sont investis pour défendre notre pays pendant cette sombre période de notre histoire. Je suis aussi attiré par une autre période qui date de bien avant mon grand-père : celle des Templiers. J’aurais aimé voir la fuite de la commanderie templière de Paris.

Winter Palace commence avec un rêve : celui de transformer un hôtel d’enfance en palace digne d’une “oasis de luxe”. Avez-vous déjà imaginé un projet aussi fou ?

J’ai pour projet de monter un café-théâtre dans mon petit village normand. C’est un concept qui n’existe pas encore, pourtant les habitants sont très friands de toute cette culture, de découvrir des artistes et d’assister à des pièces et des stand-up. J’aimerais créer ce lieu de rencontre autour de la culture, avec des talents locaux, mais aussi des copains comédiens qui passeraient de temps en temps. Ce serait mon rêve.

Et quelle serait votre programmation de rêve ?

Déjà, il y aurait beaucoup de copains. Ensuite, il y aurait essentiellement des pièces de comédie comme Le dîner de con, Le père Noël est une ordure et toutes ces œuvres dans l’esprit du Splendid. Je diffuserais aussi des classiques, car c’est très important pour la jeunesse. Un petit Molière, ce serait sympa. À l’époque, c’est Benjamin Lavernhe qui portait la pièce, mais je crois qu’il a beaucoup d’autres projets en ce moment. [Rires]

J’aimerais aussi faire découvrir au public des textes plus modernes, car on a toujours cette image un peu poussiéreuse du théâtre, mais, en réalité, c’est ce qui m’a sauvé. Je me souviendrai toujours de ma première pièce. C’était Les fourberies de Scapin et je me suis tout de suite dit : “Ça doit être génial de faire ça.”

Le déclic s’est-il produit à ce moment ? Cette expérience vous a-t-elle poussé à vous lancer dans cette carrière d’acteur ?

Quand j’avais 3 ans, je mettais déjà en scène des blagues que j’entendais. À 7 ans, j’ai fait du théâtre et on a vu que j’avais des prédispositions. Mais moi, je voulais rentrer au GIGN.

Ah oui, ça n’a rien à voir !

Rien à voir ! [Rires] J’aurais peut-être pu faire rire les forcenés, qui sait. J’étais parti pour cette carrière, mais, à 14 ans, j’ai eu une grave opération du dos et on m’a annoncé que ma carrière sportive devait s’arrêter. C’est à ce moment que mon grand-père – qui a été un homme très important pour moi et dans mes choix de vie – m’a dit : “Vincent, tu as toujours été acteur. Ce qu’on va faire, c’est qu’on va remplacer le sport par le théâtre.” Il m’a inscrit aux auditions du Cours Simon et j’ai été pris. L’aventure a commencé de cette manière.

Vincent Heneine dans Super mâles.©Netflix

Après Super mâles et Winter Palace, doit-on s’attendre à vous voir dans une nouvelle série Netflix dans deux semaines ?

J’adorerais. [Rires] J’aime beaucoup Netflix, car ils nous donnent la liberté de créer des séries fortes et variées. Donc je ne demande qu’à y retourner ! En ce moment, je suis en tournage pour France TV dans le cadre de deux productions : la série policière Il était deux fois avec Odile Vuillemin et Hubert Delattre, et la série Apparences d’Émilie Grandperret avec Hélène de Fougerolles et Léonie Simaga, que je suis très heureux de retrouver cinq ans après notre première collaboration. Je tourne aussi Brigade anonyme avec Éric Cantona. En parallèle, j’écris une série et un long-métrage sur mon histoire. J’ai passé quatre ans de ma vie à l’hôpital suite à un accident de la route et je reviens sur cette reconstruction et sur les rencontres que cette aventure a pu m’offrir.

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Article rédigé par
Agathe Renac
Agathe Renac
Journaliste