Critique

House of the Dragon, saison 2 : de l’Empire State Building à Westeros, l’affrontement fait rage

18 juin 2024
Par Quentin Moyon
“House of the Dragon”, saison 2, le 17 juin sur Max.
“House of the Dragon”, saison 2, le 17 juin sur Max. ©HBO

C’est l’une des suites les plus attendues de l’année. Après des mois de teasing et d’attente, la nouvelle salve de House of the Dragon se dévoile enfin. Pour le meilleur ou pour le pire ?

Sourire aux lèvres. Excitation. Une légère pointe de stress. C’est l’état normal d’un spectateur ou d’une spectatrice lorsque l’écran noir laisse place au gimmick crypté de HBO suivi du générique cryptique de la nouvelle saison de House of the Dragon. Une beauté mise en valeur par le célèbre thème musical de Ramin Djawadi. 

Quand le générique de la saison 1 faisait la part belle, entre feu et sang, à l’arbre généalogique de la famille de Daenerys et Rhaenyra, les Targaryen, la saison 2 se fait quant à elle broderie. Comme si la tapisserie de Bayeux prenait vie sous nos yeux. Comme si la prophétie de Helaena Targaryen, sœur et épouse du roi Aegon, professée dès l’épisode 7 de la première salve, devenait réelle. 

« La main sur le métier. Une pelote verte, une pelote noire. Dragons de chair, tissant des dragons de fils. » La menace, si subtile soit-elle à l’époque, prend désormais tout son sens. C’est la guerre, et avec elle, ses dragons et son lot de victimes. Et c’est de fil brodé, d’un fil fin et soyeux, que cette suite semble tissée. Dans son intrigue, poignante, politique et sanglante comme dans sa promotion immersive et innovante. « Dracarys » !

#TeamGreen contre #TeamBlack : la campagne se fait marketing

« All must choose », clament les visuels de cette suite. Avant même que la prophétie de Helaena s’exprime dans les images de la série du showrunner Ryan Condal, l’affrontement entre la #TeamGreen de Milicent (Olivia Cooke), Aegon II (Tom Glynn-Carney), Otto (Rhys Ifan) et Aemond (Ewan Mitchell) et la #TeamBlack de Rhaenyra (Emma D’Arcy) et Daemon (Matt Smith), a fait grand bruit dans la campagne marketing autour du show.

Entre les acteurs qui ont avancé des arguments pour défendre leur camp, la Team Black mettant en avant « ses plus gros dragons », quand la Team Green se reposait plutôt sur des liens forts, et la proposition de deux trailers différents pour promouvoir séparément chaque clan, la production a même amené le conflit sur notre territoire.

À l’aide de l’IA, les bâtiments du monde entier se sont retrouvés drapés aux couleurs de l’un ou de l’autre des camps : à New York, le vert pour l’Empire State Building et le noir pour le Rockfeller Center. Parfois, d’ailleurs, sans l’autorisation des États concernés, à l’image du Mexique qui a vu son château historique de Chapultepec recouvert de vert, entraînant dans le même temps des conflits politiques, dans le monde bien réel cette fois.

Une campagne très ambitieuse et immersive, donc, qui a pour vocation de faire des spectateurs de la série de vrais acteurs du conflit qui fait feu de tout bois au cœur des Sept Royaumes. Leur permettant, ainsi, de se plonger littéralement dans leur monde imaginaire, sur le site web Raise your Banners.

Les incitant à prêter allégeance à telle ou telle alliance, s’appropriant le hashtag correspondant à chaque équipe, ainsi qu’une couleur et des visuels propres. Mais aussi de s’engager tels de réels bretteurs dans des conflits par mots interposés, mais toujours bon-enfant : « Blood for blood », « Fire to fire », martèlent ainsi les visuels. Si les spect-acteurs sont donc renvoyés dos à dos, le marketing sert surtout à rappeler la réalité de cette saison 2 : la guerre fait désormais rage dans le Royaume, et un seul en sortira vainqueur.

Rhaenyra contre Aegon II l’Aîné : la campagne est avant tout militaire

Entre le roi Aegon et la reine Rhaenyra, rien ne va plus. Alors que la première salve se terminait par la mort du fils de Rhaenyra, Lucerys, l’heure n’est plus aux pourparlers, mais au deuil et à la vengeance. La deuxième saison, dont nous avons pu voir les premiers épisodes et qui nous conte la Danse des Dragons, la guerre civile qui éclata au sein de la lignée des Targaryens, nous prend d’abord doucement la main.

Comme pour nous rappeler la complexité généalogique et politique des Septs Royaumes : il n’est d’ailleurs pas inutile de se replonger dans quelques récaps pour reprendre son souffle. Un souffle qui se fera bientôt de Feu et de Sang, retrouvant le rythme endiablé, les intrigues de couloir et autres drames humains qui ont fait de Game of Thrones un succès mondial. 

Des coupe-gorge de Port-Réal aux contrées verdoyantes de l’île de Lamarck, en passant par les cimes hantées du Nord, House of the Dragon profite aussi de son deuxième opus pour nous faire voyager, retrouver des territoires qui ont marqué notre périple dans les huit saisons de Game of Thrones et qui serviront de décors aux affrontements à venir.

Une immersion augmentée par les ambiances poisseuses, sombres, filmées à la bougie (rappelant le Barry Lyndon de Kubrick) qui habillent des échanges virulents et les fourbes manigances au sein des différentes alliances. Mais aussi par les sublimes costumes de la nouvelle cheffe costumière, Caroline McCall, dont le talent et le goût ont été très remarqués sur Downton Abbey, et qui mettent terriblement en valeur certaines très grandes performances d’acteurs. 

On notera à ce titre la justesse dans le tragique et dans l’impuissance de Tom Glynn-Carney dans le rôle d’Aegon II. Ou bien la fourberie, la manipulation et l’insensibilité de Rhys Ifan en tant que Ser Otto Hightower, la main du roi. Des performances qui arrivent à faire naître chez le spectateur un réel engagement émotionnel et une empathie certaine pour des récits de familles auxquels on peut facilement s’identifier. Car la thématique de la filiation, au travers de la perte et du deuil, de l’enjeu de continuité d’une lignée royale, ou bien encore de l’attachement précaire à sa descendance, est fortement abordée et nous apparaît aux prémices du chaos qui prend doucement, mais sûrement ses marques à Westeros.

Enfin, pour conserver la patte qui a fait le succès de la saga Game of Thrones et donner vie à la guerre qui attend, la musique de Ramin Djawadi, musicien extrêmement talentueux qui a notamment collaboré avec Hans Zimmer, nous livre une partition orchestrale et épique à souhait, qui donne de la puissance et un supplément d’âme à ces nouveaux épisodes. Pour rêver encore plus loin que la première salve ?

La digne héritière de la première saison ?

En 2022 sortait la nouvelle œuvre adaptée de l’esprit de George R.R. Martin : House of the Dragon. Entre le bashing de la huitième et dernière salve de Game of Thrones, et les multiples abandons de potentiels spin-offs (comme 10 000 Ships, qui pourrait malgré tout être reconsidéré, ou celui centré sur Jon Snow), ce premier chapitre avait fort à faire pour convaincre les sceptiques. Malgré quelques lourdeurs dans l’écriture et des personnages moins charismatiques que dans le show originel, on peut dire que le pari a été relevé. Une épine dans le pied retirée, pour permettre à la deuxième saison de vraiment déployer ses ailes (de dragon) ?

À première vue, cette nouvelle salve conserve un rythme certes dynamique, mais pour autant assez linéaire, naviguant à vue entre les deux clans. Là où Game of Thrones était un puzzle de visages, un kaléidoscope d’intérêts et de positionnements politiques divers, le rythme lancinant de la suite de House of the Dragon se fait plus efficace que la saison 1, mais n’arrive pas à tenir la comparaison.

On évite certes l’écueil du chapitre précédent, qui s’est enfermé dans ses trop nombreuses ellipses et flashbacks avant de s’emballer à la fin de l’épisode 9 (le rendez-vous habituel de tout fan de la saga) et au 10e. Mais sans non plus assister à un enchaînement de twists, de révélations et d’action. La seconde saison ne comptant que huit épisodes. Il faudra donc se contenter d’une phase de mise en route plus ténue pour atteindre le même niveau d’excitation.

Les choses devraient cependant rapidement s’accélérer, car ici, il ne s’agit plus pour les deux camps que de se convaincre à l’affrontement, de rompre les dernières barrières (humaines ou psychologiques) pour que la guerre civile s’installe véritablement dans le Royaume. Afin d’être prêts, la série nous invite donc à plonger dans l’aurore du conflit qui nécessite d’avoir fomenté les bonnes alliances avec les bonnes personnes au bon moment. Une intrigue sans doute un peu prévisible (attendons malgré tout la suite, on pourrait être surpris), mais qui semble s’imposer aux personnages du show comme un destin éreintant et sanglant. 

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En dépit de quelques écueils, du fait de son héritage qui agit autant comme un étendard séduisant que comme un épuisant fardeau (car la comparaison est inévitable), House of the Dragon, saison 2, est une promesse flamboyante qui, sans surprise, a déjà convaincu HBO de prolonger l’expérience pour une troisième saison.

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