Séduction, émotion, tentation, passion… La Chronique des Bridgerton propose pour sa troisième saison un nouveau cocktail qui semble convaincre le public. Son secret ? Moins de sexe, pour faire monter le plaisir. Bienvenue dans une nouvelle ère où l’érotisme n’est plus roi, tant à l’écran que dans le cœur des spectateurs.
Dans la catégorie séries romantiques et érotiques, nous demandons La Chronique des Bridgerton ! Après deux ans d’attente, Netflix a mis en ligne la première partie de la saison 3 de sa fiction à succès le 16 mai dernier. Ce 13 juin, ce sont les épisodes de la deuxième partie qui sont à découvrir sur la plateforme. Cette nouvelle salve, la production l’a travaillée encore et encore afin de répondre au plus près aux attentes du public, de plus en plus difficile à séduire, quitte à mettre de côté un élément central de la série.
La Chronique des Bridgerton mise sur le sentimental
Très attendue sur les scènes de couple, la plateforme au N rouge a choisi de limiter les passages érotiques afin qu’ils soient plus qualitatifs et ne prennent pas le pas sur les différentes intrigues. Ces fameux passages auraient même retardé le tournage de la nouvelle saison, d’après les informations du Daily Mail. « Il y a des éléments qui ne plaisent pas à Shonda Rhimes, donc elle veut les changer, a confié une source anonyme au média, concernant l’une des scènes érotiques. Des choses sont devenues beaucoup trop sombres selon elle. »
Une déclaration qui confirme que la réalisatrice elle-même ne souhaite pas aller trop loin et préfère conserver une ambiance romantique dans sa série. Ce choix semble porter ses fruits, puisque les premiers épisodes de la saison 3 ont battu des records d’audience, avec 45,1 millions de vues lors des quatre premiers jours de diffusion. Pour découvrir si la salve complète a convaincu le public, il faudra encore attendre quelques jours.
Ce choix de la production correspond à une tendance générale récemment observée du côté d’Hollywood. D’après une étude publiée le 2 mai 2024 et réalisée par Stephen Follows, spécialiste des données cinématographiques, le nombre de scènes de sexe aurait chuté de près de 40 % en 25 ans. Pour obtenir ce résultat, il a analysé les 250 films les plus rentables aux États-Unis chaque année depuis 2000. Cette année-là, plus de 80 % des longs-métrages contenaient au moins un passage érotique. Aujourd’hui, seulement un programme sur deux en contient.
Ces scènes qui se font plus rares sont à présent plus réfléchies, travaillées et délicates, comme dans La Chronique des Bridgerton, et sont encadrées par des coordinateurs d’intimité. Leur rôle : chorégraphier les passages érotiques et conseiller ou rassurer les acteurs. Des personnes indispensables pour certains, notamment pour ceux qui soutiennent le mouvement MeToo, et inutiles pour d’autres, qui voient cette nouvelle façon de jouer comme un retour à la censure. Ce qui est certain, c’est que leur seule présence décourage de tourner des scènes de sexe gratuites et sans intérêt narratif, qui n’enchantent ni les comédiens ni le public, d’après une autre étude.
Le sexe à l’écran ne séduit plus la nouvelle génération
Cette baisse du nombre de scènes à caractère sexuel à Hollywood semble répondre aux attentes de la nouvelle génération. Dans un sondage publié en octobre 2023, le Center for Scholars and Storytellers de l’université de Californie à Los Angeles a découvert que l’érotisme attire beaucoup moins les jeunes adultes.
Les étudiants interrogés devaient classer selon leur préférence 19 thématiques de films et séries. Tandis que « la romance ou le sexe » est arrivée treizième, on retrouve en septième position « le contenu qui n’inclut pas de sexe ou de romance ». Au total, presque 48 % des jeunes adultes pensent que « le sexe n’est pas nécessaire à l’intrigue dans la plupart des séries télévisées et films ». Des résultats qui montrent une lassitude de ces spectateurs pour les programmes avec trop de scènes érotiques.
Dans l’étude précédemment évoquée, Stephen Follows explique que la banalité et la trop grande quantité de ces scènes à l’écran ont fini par créer un ras-le-bol collectif. De ce fait, les créateurs ont commencé à se remettre en question, c’est pourquoi il y a notamment eu de moins en moins de passages sexuels dans Game of Thrones.
De plus, une série a récemment été boycottée à cause d’une sexualisation trop forte : Elite. Dès la première saison, la fiction espagnole de Netflix a marqué les esprits avec son intrigue à suspense agrémentée de nombreuses scènes de sexe. Au plus grand désespoir du public, ces passages se sont multipliés et intensifiés de saison en saison.
À la sortie de la quatrième salve, certains fans comparaient le show, à l’origine destiné à un jeune public, à de la pornographie. Suite aux nombreux retours négatifs, la production a changé son fusil d’épaule et a davantage exploré les problèmes personnels des personnages dans les saisons suivantes. Malheureusement, elle semble être retombée dans ses travers avec la septième, sortie en octobre 2023. De ce fait, Elite a été annulée et s’achèvera avec l’ultime et huitième saison. « Enfin ! », ont crié en chœur les internautes à cette annonce. L’occasion pour un autre genre de programme de gagner le cœur du public : les dramas coréens.
Pourquoi préfère-t-on les k-dramas à l’eau de rose aux séries érotiques ?
Si les productions américaines, espagnoles ou encore britanniques tentent de s’adapter aux nouvelles attentes du public, certaines ont très bien compris ce qu’il souhaite et prennent peu à peu le pouvoir. Parmi les k-dramas les plus récents et célèbres, on compte Crash Landing on You, L’Empire du sourire, Lovely Runner, True Beauty ou encore La Reine des larmes.
Ces programmes venus tout droit de Corée du Sud, souvent adaptés de webtoons, séduisent le public avec leurs histoires d’amour qui font passer à travers toutes les émotions et ne contiennent aucune scène intime. Tout est dans la suggestion, contrairement aux séries hollywoodiennes qui peinent à réduire le sexe à l’écran. Dans la culture coréenne, il n’est pas acceptable d’être dans la démonstration charnelle, ni en public ni à l’écran. Il y a d’ailleurs des régulations de diffusions strictes qui limitent les représentations de la sexualité dans leurs médias et leurs programmes.
Si ces œuvres parviennent à séduire, qu’elles soient romantiques ou non d’ailleurs, c’est aussi parce qu’elles évoquent des thèmes importants comme l’amitié, la confiance en soi, les valeurs, les traditions, les inégalités, la dépression, la vie de famille ou encore les rivalités au travail. Dans un monde hypersexualisé, les k-dramas sont un havre de paix pour de plus en plus de spectateurs qui souhaitent davantage se concentrer sur les problèmes sociétaux actuels.
Quand on regarde les chiffres Netflix, on découvre que Squid Game est la série la plus visionnée sur la plateforme dans le monde, avec 265 200 000 de vues au 26 mai 2024, devant Mercredi et ses 252 100 000 de vues. On note par ailleurs que les shows en tête des tops 10 anglophone et non-anglophone ne contiennent pas, ou très peu de sexe. Tous ces éléments confirment que le règne de l’érotisme à l’écran est bel et bien terminé – du moins, pour le moment.