Entre vagues de licenciements sans précédent et catastrophes commerciales, 2023 a été une année complexe pour l’industrie vidéoludique. Dans ce contexte, le constructeur et éditeur Nintendo semble, lui, avoir réalisé une année exceptionnelle.
La Nintendo Switch a beau être sortie depuis plus de sept ans, l’éditeur japonais est encore parvenu à en écouler pas loin de dix millions d’exemplaires supplémentaires cette année. En France, près d’un foyer sur quatre possède un exemplaire de la console portable. Un score si impressionnant que la société a annoncé ne pas souhaiter se presser pour sortir sa prochaine machine : après tout, la précédente continue à cartonner. Mais, derrière la console que tout le monde s’arrache, il y a aussi le succès d’une stratégie qui, en 2023, s’est reposée sur des licences particulièrement fortes.
Zelda, Mario, Pikmin : des succès à foison
Plus que jamais, cette année, Nintendo s’est reposé sur des marques extrêmement fortes pour mobiliser son public. On pense en premier lieu au très attendu The Legend of Zelda: Tears of the Kingdom, une suite extraordinairement réussie qui s’est écoulée à 20 millions d’exemplaires depuis sa sortie en mai dernier.
Cette stratégie est également passée par la mobilisation des autres franchises iconiques de la firme de Kyoto, dont Mario. Plusieurs titres ambitieux liés au personnage culte sont parus cette année, du jeu de rôle avec Super Mario RPG, aux minijeux avec un nouveau Wario Ware, en passant par un impressionnant platformer 2D avec Super Mario Bros. Wonder, le premier du genre depuis des années. Ce dernier s’est vendu à 4,3 millions d’exemplaires en moins de deux semaines, en faisant l’un des jeux écoulés le plus rapidement de l’année.
La vitalité du catalogue de la Switch s’est aussi reposée sur des séries moins emblématiques, mais dont le retour était particulièrement attendu. Le jeu de réflexion Pikmin 4 a par exemple cartonné au-delà des espérances de son éditeur, qui a par ailleurs sorti quasiment par surprise Metroid Prime Remastered en février dernier. En somme, une année impliquant Mario, Zelda, Metroid ou encore F-Zero : les résultats records de l’éditeur étaient attendus, mais ont été si élevés qu’ils ont largement dépassé ses propres prévisions.
Un refuge pour les indés et les éditeurs tiers ?
2023 a également permis à Nintendo de continuer à enrichir son catalogue (et particulièrement sa boutique en ligne) de nombreux jeux issus d’autres éditeurs. Ce n’est pas toujours une évidence : la Nintendo Switch ne peut pas faire tourner nombre de titres modernes, qui demeurent donc exclusifs au monde du PC et des autres consoles de salon, plus récentes.
Mais, cette année, la console portable a pu accueillir dans ses collections un certain Hogwarts Legacy (jeu le plus vendu de l’année selon le magazine Forbes), un spin-off d’un célèbre jeu de rôle avec Persona 5 Tactica, ou encore des titres Sega très attendus comme Sonic Origins Plus et Sonic Superstars. Autant d’occasions de vivre des expériences toujours plus variées.
Par sa nature de console portable, la Switch se prête fort bien aux courtes expériences, aux jeux narratifs ou encore aux titres plus intimistes, et reste cette année une valeur refuge pour les développeurs indépendants. Ces derniers sont régulièrement mis en avant lors des Nintendo Indie World, des événements supposés mettre l’accent sur cette création plus indé. Ces initiatives ont permis de mettre en avant des œuvres comme Sea of Stars, le jeu de plateforme Planet of Lana ou encore celui d’exploration et de musique A Highland Song.
Un écosystème qui commence néanmoins à accuser son âge
Ne faisons pas une peinture trop idyllique de la situation : le fait que la Switch 2, en développement depuis plusieurs années, mette du temps à voir le jour, commence à poser de sérieux problèmes sur certains portages de jeux d’éditeurs tiers. En effet, plusieurs cas de versions lourdement dégradées, voire injouables sur la machine de Nintendo, ont été à déplorer depuis deux ans.
C’est par exemple le cas de la version Switch de Mortal Kombat 1, qui a été la risée des internautes lors de sa révélation, tant les développeurs ont dû faire de concessions graphiques. Ou encore de la récente compilation Batman: Arkham Trilogy, qui parvient à livrer des jeux moins beaux et moins fluides que leurs versions d’origine – dont le premier épisode date de 2009.
D’une manière générale, plus le temps passe, et plus il deviendra difficile à Nintendo de proposer des jeux ambitieux et modernes en dehors de ses propres franchises. Du moins, pas tant qu’il n’aura pas dégainé une nouvelle machine comblant un peu le retard technologique accumulé avec Sony et Microsoft. Il n’y a pas d’urgence pour autant : Nintendo dégage un bénéfice net énorme et continue d’engranger les succès et de vendre ses jeux par millions. L’un des enjeux des prochains trimestres est néanmoins très clair : la Switch 2 est attendue au tournant.