L’organisation Noyb a déposé une plainte, jugeant que l’abonnement payant sur Facebook et Instagram est contraire au droit européen sur les données personnelles.
Depuis début novembre, Meta propose à ses utilisateurs européens de payer pour ne pas subir de profilage publicitaire sur Facebook et Instagram. Concrètement, ils ont le choix entre payer 9,99 euros (sur ordinateur) ou 12,99 euros (sur smartphone) par mois afin de ne pas voir d’annonces sur les deux réseaux sociaux, ou laisser ces plateformes les pister.
Si le groupe californien espère ainsi se conformer à loi européenne sur les données personnelles et la publicité ciblée, cette décision ne passe pas auprès de Noyb, organisation de défense de la vie privée en ligne. Mardi, elle a annoncé avoir déposé plainte contre Meta auprès de l’autorité autrichienne des données personnelles, considérant que cet abonnement payant est contraire au droit européen. « La législation européenne exige que le consentement soit le fruit de la volonté réelle de l’utilisateur. Contrairement à cette loi, Meta impose une “redevance de confidentialité” pouvant aller jusqu’à 250€ par an si quelqu’un ose exercer son droit fondamental à la protection des données », a déclaré Felix Mikolasch, avocat spécialiste de la protection des données chez Noyb.
Un abonnement jugé illégal
Pour l’organisme, qui a déjà fait condamner les géants de la tech pour des infractions au règlement général sur la protection des données (RGPD) à plusieurs reprises, il s’agit d’une autre tentative de Meta de contourner la loi. Pour justifier sa démarche, il mentionne la décision de la Cour de justice européenne en juillet qui a statué que le traitement par la firme des données des utilisateurs pour leur diffuser des publicités ciblées est illégal, ainsi que l’amende de 390 millions d’euros infligé par le Comité européen de la protection des données pour cette violation en début d’année.
Noyb cite également des statistiques selon lesquelles seuls 3% des internautes souhaitent être pistés et 99% refusent de payer pour protéger leurs données. « Lorsque 3% des gens veulent nager, mais que 99,9% finissent dans l’eau, chaque enfant sait qu’il ne s’agit pas d’un choix “libre”. Ce n’est ni intelligent ni légal – c’est tout simplement pitoyable que Meta continue d’ignorer le droit européen », a déploré Max Schrems, président de l’organisation.
Noyb estime par ailleurs que le prix de l’abonnement sur Facebook et Instagram est trop élevé, alors que 21,6% de la population de l’Union européenne est menacée de pauvreté ou d’exclusion sociale. L’organisme s’inquiète qu’en plus des 250€ par an, les Européens se retrouvent à payer plus si Meta n’est pas condamné, ce qui inciterait des concurrents à l’imiter. Citant les chiffres de Google, il rappelle qu’en moyenne, 35 applications sont installées sur un smartphone. Avec autant d’applications, « garder votre téléphone privé pourrait bientôt vous coûter environ 8 815€ par an », a alerté Noyb.
Une plainte pour pratiques commerciales trompeuses
L’organisation appelle ainsi le gendarme autrichien des données personnelles à engager une procédure d’urgence pour mettre fin à ce traitement illégal de la part de Meta et à lui infliger une amende dissuasive. Elle n’est pas la seule à attaquer l’entreprise en justice à cause de cet abonnement payant. Jeudi, l’association de protection des consommateurs UFC-Que choisir a annoncé porter plainte contre elle auprès de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF).
Participant également à la plainte du Bureau européen des unions des consommateurs (BEUC) déposée auprès de la Commission européenne, elle reproche, entre autres, à Meta de se livrer à des pratiques commerciales trompeuses avec son offre payante. « Tout d’abord, la plateforme induit les consommateurs en erreur en leur proposant de choisir entre l’abonnement payant, ou bien la poursuite de l’utilisation “gratuite” de l’application. Or, cette dernière option n’est pas gratuite, puisque ceux qui optent pour celle-ci seront contraints de fournir leurs données personnelles à Meta », a affirmé l’association. L’UFC-Que choisir accuse également la firme de tromper les consommateurs avec son abonnement « en les amenant à penser qu’ils bénéficieront d’une option respectueuse de leur vie privée, alors qu’en réalité, leurs données personnelles continueront d’être collectées et utilisées à des fins autre que la publicité ».