Critique

David Hockney en Normandie : entre technologie et campagne

21 octobre 2021
Par Sophie Benard
David Hockney en Normandie : entre technologie et campagne
©David Hockney (Photographie Sophie Benard)

Le peintre britannique a eu la chance d’être confiné, en mars 2020, dans sa maison du pays d’Auge. Plus gaie et colorée que jamais, la Normandie de David Hockney est une véritable bouffée de joie.

David Hockney n’a pas attendu le premier confinement français pour découvrir les possibilités créatives que lui offrait sa tablette iPad. Alors qu’il est familier de cette technique depuis plus de dix ans, les quelques semaines du printemps 2020 lui ont donné l’occasion de « peindre » ce qui l’entourait – sa maison, son jardin et la campagne du pays d’Auge, en Normandie. Le résultat a été imprimé sur papier avant d’être exposé et superbement mis en valeur au musée de l’Orangerie, à Paris (jusqu’au 14 février 2022).

Un artiste majeur

David Hockney est le peintre vivant le plus cher : son Portrait of an Artist (Pool with two figures) a en effet été adjugé en 2018 à 90,3 millions de dollars chez Christie’s, à New York. Pour le 80e anniversaire de l’artiste, le Centre Pompidou, à Paris, lui consacrait une rétrospective : il était possible d’y admirer les célèbres piscines californiennes qui ont fait sa renommée, mais aussi de (re)découvrir certaines de ses œuvres plus confidentielles. Inépuisable touche-à-tout, l’artiste britannique dessine, grave, décore, photographie, théorise. Peu étonnant, alors, qu’il n’ait pas pu s’empêcher de mettre à profit les outils créatifs offerts par la technologie.

©David Hockney (Photographie Sophie Benard)

Une tapisserie normande

La forme que prennent les images exposées au musée de L’Orangerie – celle d’une frise qui raconte le passage des saisons, du printemps à l’hiver – est directement issue d’une œuvre normande bien connue. Quelques mois avant de commencer à peindre la Normandie sur iPad, David Hockney fut frappé d’admiration devant la célèbre Tapisserie de Bayeux. Cette broderie de plus de 70 mètres de long, aussi appelée Tapisserie de la reine Mathilde, forme un véritable récit en images de la conquête de l’Angleterre par Guillaume, duc de Normandie, au XIe siècle. Le peintre se met alors en tête d’élaborer une frise, lui aussi. En quelques semaines, Hockney réalise une centaine d’images sur son iPad ; à la manière des impressionnistes, il se montre particulièrement attentif aux effets de lumières et aux changements climatiques. Sa palette vive et lumineuse – presque pop – colore d’une joie simple les paysages normands.

©David Hockney (Photographie Sophie Benard)

Un dialogue avec Monet

Au rez-de-chaussée du musée de L’Orangerie, quelques images normandes de David Hockney se sont échappées de la salle qui leur a été attribuée. Certaines sont ainsi placées juste avant la célèbre salle aux nymphéas où sont exposées Les Nymphéas de Claude Monet. Ces deux regards sur la nature se côtoient sans se ressembler, mais se répondent de mille façons différentes. Les couleurs vives d’Hockney contrastent avec la palette plus neutre de Monet, les techniques s’affrontent presque : le stylet de l’iPad d’un côté, le pinceau sur la toile de l’autre. Comme Hockney pendant le premier confinement français, Claude Monet peignait, avec les nymphéas, ce qui s’offrait à son regard, dans son superbe jardin de Giverny. Comme Hockney, Monet a regardé les saisons passer sur son jardin, la lumière se transformer, les éléments se métamorphoser.

David Hockney – A Year in Normandy au musée de L’Orangerie, du 13 octobre 2021 au 14 février 2022. Billetterie par ici, catalogue de l’exposition en précommande par là.

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Sophie Benard
Sophie Benard
Journaliste
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