Qui sont les nouvelles reines du hip-hop français ?

Historiquement dominé par les hommes, le rap reste un univers où sexisme et obstacles à la reconnaissance des femmes demeurent monnaie courante. Pourtant, des pionnières comme Lil’ Kim et Missy Elliott aux icônes contemporaines Nicki Minaj et Cardi B, les femmes ont su imposer leur voix outre-Atlantique. Et la scène francophone n’est pas en reste : elle aussi brise les codes, revendiquant sa place avec force.

Shay

Avec sa froideur calculée et sa féminité ultra-affirmée, Shay enfile le costume de « méchante » du rap français : celle qui ne se laisse pas marcher sur les pieds, et qui réussit tout autant que ses homologues masculins.

Respectivement certifiés platine en 2016 et 2019, ses opus Jolie Garce et Antidote témoignent d’une maîtrise artistique rare. Dans un savant mélange de trap américaine et de R’n’B, la rappeuse belge se distingue par un style exigeant, aussi bien musicalement que visuellement – à l’image de ses morceaux Jolie ou Liquide.

Depuis, Shay n’a pas ralenti : après un troisième album studio, Pourvu qu’il pleuve, et le titre d’artiste féminine de l’année aux Flammes 2025, la « Jolie Garce » propose sa vision de la réussite au féminin : puissance, indépendance, engagement – qui oserait encore douter de son iconicité ?

Theodora

Révélée sur les réseaux sociaux grâce à son explosif Kongolese sous BBL, Theodora a connu une ascension fulgurante sur la scène française – et même au-delà. Son ingrédient secret ? L’audace, définitivement.

À seulement 22 ans, elle est déjà la deuxième artiste féminine francophone la plus streamée en France en 2025, juste derrière Aya Nakamura. Avec Mega BBL, son projet hybride mêlant R’n’B, electropop et bouyon antillais, la jeune femme casse littéralement les codes, tout en séduisant un large public.

Avec une tournée déjà complète des zéniths français, elle confirme son statut de « Boss Lady », capable de captiver autant par sa voix que par sa présence scénique. Sans tabou, elle revendique une hyperféminité assumée, qu’elle décline à travers ses chorégraphies audacieuses et ses tenues flamboyantes. Les critiques ? Trop peu pour Theodora, déjà en train d’écrire le prochain chapitre de sa success story.

Mademoiselle lou

Originaire du 94, mademoiselle lou fait ses débuts dans la musique dès l’âge de 6 ans, à son entrée au conservatoire. Lycéenne, elle écrit ses premiers textes avant de poster ses maquettes sur Instagram. S’ensuit une signature avec le label Elektra, qui lancera officiellement sa carrière.

Son univers, à la fois intimiste et sensible, se révèle au grand public grâce à son titre Zénith, en featuring avec Booba – rien que ça. Devenu viral, le single cumule aujourd’hui près de 9 millions d’écoutes, asseyant la légitimité de l’artiste sur la scène hip-hop française.

Avec son EP Les Ombres, sorti un an plus tard, mademoiselle lou rayonne par son écriture fine et son timbre de voix délicat, oscillant entre puissance et mélancolie. Véritable vent de douceur sur le rap français, la jeune femme prouve que l’on peut clairement s’imposer sans avoir besoin de crier.

Bamby

Bamby s’illustre comme une figure majeure du dancehall francophone. Avec son savant mélange de reggae, de bouyon et de rap, la « Dancehall Queen » fait rayonner les cultures d’outre-mer à travers un son énergique et résolument fédérateur.

Son titre phare Who Mad Again, certifié disque d’or et cumulant 39 millions de vues sur YouTube, est devenu un classique de sa discographie, lui ouvrant les portes d’un public bien au-delà de sa Guyane natale.

À la tête de son label Muse & Music, Bamby assume une indépendance artistique forte, portée par une présence scénique incandescente, une maîtrise vocale irréprochable et un univers visuel qui sublime la fémininité caribéenne. Attendue au Equal Festival le 18 novembre 2025, nul doute qu’elle enflammera le Palais Brogniart à sa manière.

Lyna Mahyem

Chanteuse R’n’B originaire d’Argenteuil, Lyna Mahyem se passionne pour la musique dès son plus jeune âge. À 15 ans, elle participe à des ateliers d’écriture organisés dans son quartier – une première immersion dans l’univers hip-hop qui nourrira sans conteste son style singulier.

Avec sa pop urbaine aux influences nord-africaines, elle se positionne comme une créatrice « multiverse », totalement libre dans ses explorations sonores. Son album Mon Âme, paru en 2024, illustre ce besoin viscéral de se raconter – dans la continuité de Femme forte (2021), salué pour sa sincérité.

De Demain à 32 degrés, ses titres tissent un lien unique avec sa (jeune) communauté. Sacrée artiste musicale de l’année 2023 aux TikTok Awards, Lyna Mahyem incarne une génération de femmes fortes et autonomes, capables d’exprimer leur vulnérabilité avec justesse.

Lala &ce

Originaire de la banlieue lyonnaise, Lala &ce est l’un des visages les plus arty et avant-gardistes du rap français. Membre du collectif franco-sénégalais 667, elle a façonné un univers vaporeux mêlant trap planante, R’n’B alternatif et electro minimaliste.

De Everything Tasteful (2021) à Solstice (2024), son œuvre explore le désir et l’identité au cœur d’une poésie sonore enivrante. Avec Show Me Love, qui dépasse les 14 millions de streams, la Franco-Ivoirienne a fait de l’introspection une arme de séduction massive.

Inspirée par SZA ou 070 Shake, Lala &ce propose un rap post-genre où la douceur fraye avec le pouvoir. Figure queer et afroféministe, elle expose fièrement sa voix et son corps comme des terrains d’expression politique. Brillante et inspirante, définitivement.

Meryl

À la fois rappeuse, autrice et compositrice, Meryl a d’abord fait ses preuves dans l’ombre, en écrivant pour des artistes majeurs tels que Timal ou Niska – avant de s’imposer brillamment sur le devant de la scène.

De Jour avant caviar (2020) à Caviar I (2024), en passant par Ozoror (2022), la Martiniquaise n’a cessé d’affirmer sa singularité artistique. Rap US, dancehall, bouyon, R’n’B : elle excelle dans l’art de fusionner les genres, créant un son aussi créatif qu’innovant, à l’image de BB Compte.

Avec sa production soignée, ses refrains dansants et sa touche créole inimitable, Meryl est de celles qui réinventent le hip-hop français. Fière de ses racines caribéennes, elle n’hésite pas à revendiquer haut et fort son identité. Un flow rapide, une voix puissante, un engagement véritable – qu’ajouter de plus ?

Bianca Costa

Créatrice autoproclamée de la bossa trap, Bianca Costa teinte le hip-hop de notes ensoleillées, directement inspirées de son Brésil natal.

Durant le confinement, la jeune artiste publie ses covers sur les réseaux sociaux, qui mêlent à la fois bossa nova, trap et influences latines – un style hybride qui deviendra sa signature. En 2022, son morceau Ounana la propulse un peu plus haut : choisi pour la bande originale de FIFA 23, il la fait entendre au-delà de son cercle habituel.

Mais c’est son EP Le Baile, sorti la même année, qui marque un véritable tournant dans sa carrière : de ses collaborations remarquées aux côtés de Soso Maness et MC Pedrinho, à ses passages sur les plus grandes scènes, Bianca Costa connaît une ascension fulgurante. Sur les planches comme dans son œuvre, elle hypnotise par son aura solaire et son authenticité à toute épreuve.

Le Juiice

Nouvelle icône de la trap hexagonale, Le Juiice a su imposer un style unique : rugueux, affirmé, et résolument féminin. Surnommée la « Trap Mama », la rappeuse franco-ivoirienne s’est rapidement distinguée par sa personnalité affirmée et sa volonté acharnée de réussir.

Avec son quatrième opus NOUS ART : Masterpiece, elle livre une œuvre purement introspective, dédiée aux apports de la communauté noire aux industries créatives. Punchlines acérées, flow incisif, esthétique léchée : à 32 ans, l’artiste revendique fièrement son identité, comme sur son emblématique Trap Mama.

Autoproduite et indépendante, Le Juiice fait de chaque projet un manifeste de liberté : « Je suis une artiste noire, qui entreprend, qui s’autoproduit et qui dit ce qu’elle pense sans se cacher. », déclarait-elle à Numéro Magazine.

Doria

Le kickage ? Elle en a fait sa marque de fabrique. Révélée dans l’émission Rentre dans le Cercle en 2018, Doria a depuis façonné un univers à la fois brut, intense et technique. Son EP MDP, paru en 2019, rassemble ses premiers freestyles parmi lesquels Pochtar, dont le clip a été repartagé par Booba.

À travers des textes particulièrement incisifs, la rappeuse explore sa vulnérabilité et ses doutes, livrant un portrait honnête et introspectif d’elle-même – à la fois artiste et femme. Paru en 2024, son album Je cherche encore en est une démonstration magistrale. Santé mentale, angoisses, mal-être, regard des autres : sur fond de sonorités rock, Doria s’aventure dans une quête identitaire continue, symbole d’une authenticité désarmante – clé de son succès.

Messyz

Fraîchement débarquée sur la scène rap, Meesyz incarne la génération 2.0 du hip-hop français. Présente sur les réseaux sociaux depuis 2023, elle se distingue par son approche « DIY », en diffusant ses clips sur Youtube ou TikTok.

Rapidement, la jeune femme gagne en visibilité grâce à ses performances scéniques véritablement audacieuses. Son premier EP, Syzmode (2024), confirme sa personnalité brute et affirmée, portée par des titres comme K.O..