Chaque mois, la Fnac et Vialma, la référence en streaming de musique classique et jazz, vous présentent une playlist concoctée avec soin, selon une thématique particulière. L’occasion de mettre en avant des pistes connues, des trésors rares, des plages calmes, mais aussi des pièces extrêmes.
La playlist du mois est consacrée à la musique classique inspirée par le Diable : plongez dans les danses d’esprits maléfiques, les rituels sataniques, les vents éternels des cercles de l’Enfer, les chasses d’âmes damnées par les chiens infernaux, mais aussi dans quelques plages plus ironiques ou légères… La musique classique a trouvé des milliers de manières pour peindre la fascination des créatures infernales sur l’esprit humain. Immergez-vous avec notre playlist classique démoniaque, riche en hurlements d’orchestre, danses vives et rythmes violents.
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Jean-Sébastien Bach : Toccata et fugue en ré mineur
Une force brute et déchaînée, des accords terrifiants de gravité… Bach frappe à la porte de nos âmes ! De Docteur Jekyll and Mister Hyde à Devil Story en passant par le thème du Kraken dans Pirates des Caraïbes, rien de surprenant à ce que sa célébrissime Toccata en ré mineur ait servi d’accompagnement aux films les plus effrayants de notre temps. Cette œuvre aux proportions épiques révèle l’orgue et sa terrible puissance. Oserez-vous vous y mesurer ?
Les morceaux les plus effrayants
Charles Gounod : Faust, Danse de Phryné
Lorsque Méphistophélès organise un ballet pour charmer Faust, la pièce finale est une spectaculaire danse diabolique, d’une violence rare chez Charles Gounod. Dans la Danse de Phryné, Les couplets d’une séduction vénéneuse sont balayés par le fracas d’un refrain infernal où tout l’orchestre hurle en monorythmie une vindicative mélodie descendante, jusqu’à une coda d’une éclatante accélération.
Piotr Ilitch Tchaïkovski : Francesca da Rimini
Francesca da Rimini est peut-être la musique ayant le mieux décrit l’Enfer. Piotr Ilitch Tchaïkovski sait comme personne décrire la noirceur désolée du royaume de Satan avec ces paysages sombres, ses âmes en peine, et une tragique histoire d’amants maudits à la célèbre mélodie. Mais lorsque Tchaïkovski veut décrire les flammes et les vents infernaux, l’orchestre éclate dans un vacarme démoniaque où les ouragans hurlent à plein cri, dans une ultraviolence à la puissance inédite. La dernière partie est foudroyante de fureur. Du metal avant la lettre.
Camille Saint-Saëns : Danse macabre
La fameuse Danse macabre de Camille Saint-Saëns est une adaptation légère d’une mélodie qu’il avait composée pour un poème d’Henri Cazalis sur l’égalité de tous devant la Mort. Moins effrayante qu’ironique, Saint-Saëns s’amuse avec un violon désaccordé et mène une malicieuse ronde où les morts, riches et pauvres, dansent ensemble dans une fête effrontée, jusqu’au lever du jour.
Modest Moussorgski : La Foire de Sorotchintsy, intermezzo de l’acte 3 Une nuit sur le mont chauve/Vision onirique d’un paysan
Plus trash que la version édulcorée de Rimsky-Korsakov, la célèbre Une nuit sur le mont chauve est à déguster dans la version avec chœur et orchestre que Modeste Moussorgski a composé pour l’opéra (inachevé) La Foire de Sorotchintsy. Ici, les chœurs clament à toute volée une horrifiante messe noire, le baryton célébrant clame le triomphe du démon Chernobog, et l’orchestre plonge dans une totale furie pour exprimer la sauvagerie de ce sabbat païen.
Hector Berlioz : Symphonie fantastique, 5e mouvement Songe d’une nuit de sabbat
Composée sous opium, la Symphonie fantastique est un trip psychédélique complètement allumé où Hector Berlioz enchaîne les visions passionnées, romantiques, douloureuses, violentes d’un artiste perdant pied avec la réalité. Dans le finale « Songe d’une nuit de sabbat », son héros rêve qu’il est dans un sabbat au-delà de la mort, et est entraîné dans une ronde infernale. Sons menaçants dans le lointain, Dies Irae des cuivres (repris en version electro dans Shining), glas funèbre, salutations moqueuses, danse des squelettes, danse des créatures sataniques… tout est d’un réalisme subjuguant pour décrire ce voyage au bout de la nuit et de l’Enfer.
Franz Liszt : Totentanz
Le Dies Irae médiéval a inspiré plus d’un compositeur, mais Franz Liszt est celui qui a le mieux exploité sa puissance tellurique dans la Totentanz (Danse des morts). Ce concerto pour piano et orchestre sous forme de thème et variations exige la virtuosité la plus vertigineuse du piano pour canonner autant de déflagrations sonores. D’une intro percussive aux cruelles dissonances jusqu’à la coda aux explosives descentes chromatiques, cette Totentanz est d’une vitalité dantesque.
Carl Maria von Veber : Le Freischütz, Finale de l’acte II La gorge aux loups
Digne représentant de l’opéra diabolique, Le Freïschutz de Carl Maria von Veber tourne autour de sa scène « culte » : la Gorge aux loups. Kaspar invoque le démon Samiel pour qu’il forge 7 balles magiques dont la 7e tuera la bien-aimée du héros. Veber est maître dans l’art d’exprimer les sons d’une forêt maléfique, les fantômes, l’atmosphère diabolique en sous-main. A chaque balle forgée, l’orchestre monte d’un cran dans la folie colérique jusqu’à sa coda cataclysmique.
Joseph Hellmesberger II : Danse diabolique
Danse diabolique oui, mais à la viennoise. Valse shootée aux cymbales et grosse caisse fracassantes, on entend cependant le charme autrichien dans cette pièce survitaminée aux motifs secs et percutants. Malgré son allégresse enthousiaste, la pièce de Joseph Hellmesberger II ne baigne pas moins dans une ambiance inquiétante et souvent féroce. A mi-chemin entre le Concert du Nouvel An et le Pandemonium de Lucifer.
Silvestre Revueltas : Suite de La Noche de Los Mayas, 4e mouvement Noche de Encantamiento
Adaptation d’une musique de film, la Suite La Noche de Los Mayas décrit les rituels et sacrifices ancestraux des Mayas avec un expressionnisme électrique. Le finale Noche de Encantamiento (Nuit de l’incantation) est une pénétrante évocation des cérémonies chamanes. L’orchestre y accompagne 17 percussionnistes en roue libre dans une orgie démentielle de rythmes sud-américains complexes semi-improvisés. La barbarie sonore que sait si bien déchaîner Silvestre Revueltas monte en crescendo jusqu’à sa théâtrale coda où l’orchestre clame la dernière incantation dans un unisson saisissant.
Sergueï Prokofiev : Symphonie n° 3 L’Ange de feu
Une jeune femme tente d’échapper au Diable. Elle emportera les nonnes d’une église dans le feu et la mort. Plus terrifiante encore que l’opéra dont elle est tirée, la Symphonie n° 3 de Sergueï Prokofiev L’Ange de feu martèle dès ses premières secondes un chaos de folie. Entre romantisme perverti, effets spéciaux de violons dissonants ultra-divisés et marche sanglante de victimes possédées où les cloches claironnent, cette symphonie est une des plus sombres du genre, vraiment satanique.
Jacques Offenbach : Orphée aux Enfers, Galop infernal
Célébrissime pièce festive, le Galop infernal (improprement appelé Can-Can) d’Orphée aux Enfers est la pierre de touche de l’opérette de Jacques Offenbach, bis favori des orchestres (et du Crazy horse !) Dans ces enfers pour de rire, les créatures résidentes dansent une fiesta très française sur un thème frénétique d’un jouissif emballement sonore. Tout le monde lève les jambes !
Arrigo Boito : Mefistofele, Acte II scène II, Nuit de Walpurgis Su! Riddiam, riddiamo
Opéra qui ne lésine pas sur le spectaculaire, Mefistofele raconte sa version de Faust avec force morceaux majestueux. La Nuit de Walpurgis a inspiré plus d’un compositeur et la version d’Arrigo Boito est une des plus exaltantes. Le fulgurant Su! Riddiam, riddiamo est une pièce de choix pour grand chœur et orchestre où sorcières et mages chantent la jubilation de leur sabbat en redoublant d’invocations époustouflantes.
Quelques pièces bonus
Charles Williams : Devil’s Galop
Course preste et joyeuse, le Devil’s Galop est dans l’esprit de la Danse macabre. Nulle damnation dans ce galop richement orchestré et festif où le Diable semble nous faire un pied de nez. La pièce de Charles Williams n’en est pas moins une pure cavalcade jubilatoire, digne de Tex Avery !
Jerry Goldsmith : Suite de la BO de La Malédiction
La terreur pure de l’Enfer, point. Jerry Goldsmith a tout simplement composé une des meilleures musiques de film d’horreur avec la suite de la BO du film La Malédiction. Dès que commence la messe des serviteurs du Diable : « Ave Satani », la musique ne reculera devant rien pour nous faire trembler de peur avec ses chœurs impitoyables et son orchestre aux rythmes d’une perverse jubilation. Les effets (glissendi de violons, ostinatos de piano, rugissements de cuivres) sont parfaits. Rare cas de musique écrite en latin couronnée de l’Oscar de la meilleure musique de film.
Ernest Guiraud : La Chasse fantastique
Un chasseur orgueilleux défie le ciel, il sera condamné à être poursuivi par les Chiens de l’Enfer qui le feront tomber dans leur royaume. Dans ce poème symphonique où les cors de chasse ont la part du lion, Ernest Guiraud tire une force inattendue d’un langage très classique. La chasse fantastique sait aussi bien dépeindre la marche dans la forêt que la poursuite infernale sous forme d’un maléfique galop au rythme implacable. Plus terrifiant que le pourtant plus renommé Chasseur maudit de Franck.
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