À 83 ans, Paul Verhoeven continue de réaliser des films sulfureux et provocateurs à ne pas mettre devant tous les yeux. La sortie de son film cultre La Chair et le Sang en Blu-Ray est l’occasion de nous replonger sur une filmographie atypique, souvent portée par des personnages féminins forts et maîtres de leur destin.
Spetters
Cinquième film néerlandais de Paul Verhoeven, Spetters a été mal reçu au moment de sa sortie en 1980. Ultraviolent, il est considéré comme un film sexiste, homophobe, anti-religieux, fustigeant les personnes handicapées… Le tout, au sein du milieu populaire du moto-cross avec Rutger Hauer, son acteur fétiche. Mais tout l’univers de Verhoeven est déjà présent, entre imagerie catholique, sexe, héroïne sacrificielle, crudité et un attrait pour la provocation et l’irrévérencieux. Un apéritif par rapport à tout ce qui suivra…
La Chair et le Sang
Attention, film culte. Verhoeven nous emmène en 1985 dans l’Europe de l’Ouest de 1501. Il y conte une histoire d’amour malsaine entre une jeune prisonnière et le mercenaire qui l’a enlevée et violée, sur fond de peste et de guerre. La Chair et le Sang est sans doute l’un des films les plus sulfureux de son auteur. Rutger Hauer (pour sa cinquième et dernière collaboration avec Verhoeven) et Jennifer Jason Leigh y incarnent les deux amants maudits. Si le film fut un échec à son époque pour son esprit heroic fantasy baignant dans le stupre et la violence, il est totalement réhabilité depuis. Paul Verhoeven, réalisateur incompris ?
RoboCop
Pour RoboCop, son premier film américain en 1987, il frappe fort. Un policier assassiné est transformé en robot pour lutter sans merci contre le crime. Jusqu’au moment où son humanité disparue se rappelle à lui… Le film, profondément pessimiste sur la nature humaine (une des thématiques récurrentes de l’œuvre de Verhoeven) est un joli succès international, sans casser toutefois le box-office. Deux suites et une série verront le jour, sans le réalisateur néerlandais aux commandes, ainsi qu’un remake également intitulé RoboCop en 2014, bien peu inspiré malgré son casting de stars.
Total Recall
Arnold Schwarzenegger était pressenti pour jouer le rôle-titre de RoboCop. Recalé par la production, il est cette fois de tous les plans ou presque d’un des films de SF les plus inventifs des années 1990, Total Recall. Il incarne un homme obsédé par un de ses rêves, qui se fait implanter des souvenirs factices et voit sa vie totalement changer… Adapté d’une nouvelle de Philip K. Dick, le film offre à Verhoeven son ticket pour la gloire (il rapporte plus de 260 millions de dollars) et à Sharon Stone, l’un de ses premiers rôles d’envergure dans celui de la femme mystérieuse de Schwarzie.
Basic Instinct
Il est un film qui va changer irrémédiablement la carrière de Paul Verhoeven et de son interprète féminine principale, Sharon Stone. Il s’agit évidemment de Basic Instinct, au souffle vénéneux et aux scènes cultes comme celle de l’interrogatoire et son croisement de jambes inoubliable. Un film piquant et glaçant jouant sur les faux-semblants, un thriller érotique sous haute tension et surtout, un porte-étendard féministe qui fit scandale. À partir de Basic Instinct, ce seront les héroïnes qui dirigeront les hommes chez Verhoeven et plus l’inverse. Le sexe dit faible fait sa loi et rapporte 350 millions de dollars, le plus gros succès à ce jour du réalisateur.
Showgirls
Malheureusement pour Verhoeven, l’état de grâce ne va pas durer. Dès le film suivant, en 1995, il connaît un désaveu autant critique que public. Showgirls, qu’il fallait prendre au second degré comme un pamphlet sur la marchandisation des femmes, est pris au premier. Elizabeth Berkley, son actrice principale échappée de Sauvés par le gong, mettra des années à se remettre de ce bide intergalactique. Strings, paillettes et barres de lap dance sont remisées directement au placard, mais le film va connaître une réhabilitation à partir des années 2010 et accéder enfin au rang de culte.
Starship Troopers
Autre film pris au premier degré alors qu’il s’agissait d’une cinglante critique de la société américaine, de sa propension à l’intolérance et à recourir à la violence dès que possible, Starship Troopers. Ici, des hommes et des femmes jeunes et jolis s’en vont combattre des arachnides géants dans l’espace et Verhoeven raffole d’en faire de la chair à saucisse. Le film est un semi-succès et il engendrera des suites de série Z totalement vidées de leur substance anti-militariste et anti-fasciste.
Elle
Le film de la réhabilitation. Après Black Book qui signait le retour de Verhoeven sur ses terres natales, aux Pays-Bas, voici Elle, tourné en France en 2016, avec un casting français. Une adaptation du roman à succès Oh… de Philippe Djian. Le film place à nouveau une figure féminine centrale, celle interprétée avec fougue par Isabelle Huppert qui se fait violer et se confronte à son agresseur, Laurent Lafitte. Bardé de prix, Elle remet Verhoeven sur l’échiquier des réalisateurs qui comptent.
Benedetta
Rencontrée sur le tournage de Elle dans lequel elle joue un rôle secondaire, Virginie Efira devient la nouvelle muse de Verhoeven. Il lui offre le rôle sulfureux de Benedetta Carlini, une religieuse lesbienne à qui l’on attribue des miracles. En compétition au Festival de Cannes, Benedetta signe une nouvelle polémique dont est coutumier le réalisateur, jamais à cours de blasphèmes, lui rappelant sans doute celles connues avec Spetters. La boucle est-elle bouclée ? Le titre de son prochain film, Young Sinner, semble déjà prometteur…
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