Une illustratrice qui pulvérise les codes de la BD

C’est grâce à Joann Sfar que la carrière de Florence Dupré la Tour a pris une toute autre tournure. Elle travaillait alors dans l’animation et avait contacté l’auteur pour lui proposer de collaborer avec lui sur la série animée Petit Vampire. Mais il va l’aider à faire découvrir au plus grand nombre son univers particulier. Car Florence Duré la Tour aime faire des dessins qui paraissent enfantins, mais qui vont bien au-delà, traduisant des violences et des peurs qui parlent autant aux tout petits qu’aux adultes. C’est ainsi que paraît le premier tome de la série Capucin en 2006, qui reçoit un succès public et critique.

On la retrouve ensuite régulièrement en tant que scénariste et illustratrice de ses propres œuvres, reprenant à chaque fois des thématiques liées à l’enfance, quitte à les distordre. Elle traite de l’adolescence dans Forever ma sœur et Forever summer, des contes dans La Sorcière du placard aux balais d’après Pierre Gripari, d’animaux et d’écologie dans la série Borgnol portée par un ours blanc un peu spécial… Elle pénètre dans la psyché humaine dans Cigish ou le maître du je et Cruelle et obtient le Prix Artémisia spécial du jury pour la bande dessinée érotique Carnage.

La sexualité des femmes vue par Florence Dupré la Tour

Carnage est un avant-goût de ce qui attend les lecteurs avec la toute nouvelle série de Dupré la Tour, Pucelle. On y suit Florence, double d’elle-même, petite fille intriguée par les choses du sexe sans oser le demander. Dans sa famille, c’est proscrit et on en reste à la bonne vieille histoire des garçons qui naissent dans les choux et les filles dans des roses. Ce qui n’empêche pas Florence d’imaginer ce qui la dépasse. Une première expérience de la féminité, mais surtout de la place des femmes dans la société, de la désacralisation de la sexualité. Le tout, avec des dessins en noir, blanc et rose, croqués de manière enfantine pour des sujets bien plus graves qu’ils n’en ont l’air. Une habitude pour l’autrice.

Elle insuffle ici de l’humour noir et de la tendresse pour souligner la détresse de cette petite fille qui devient adolescente, avec un ton de plus en plus percutant au fur et à mesure qu’elle grandit et comprend ce qu’on lui cache. Un premier tome cinglant et émouvant dont on attend la suite avec impatience.

– Parution le 15 mai 2020 – 184 pages

Pucelle, Florence Dupré de La Tour (Dargaud) sur Fnac.com

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