Née des relations incestueuses entre Œdipe et sa mère, Antigone hérite dès la naissance d’un patrimoine assez sombre. Qu’importe : elle choisit la lumière. Jusqu’à en mourir. Avec un courage moral et politique qui fait d’elle une des premières icones du féminisme.
La force de l’amour
« Je suis de ceux qui aiment, non de ceux qui haïssent », affirme Antigone au début de la tragédie éponyme de Sophocle. Et tant pis pour ceux écrivent les lois de la haine: elle leur désobéira. Car elle est résolue à enterrer son frère Polynice, même si le roi Créon le lui a formellement interdit. Pour elle, il est hors de question d’abandonner le cadavre d’un humain aux vautours. Quels que soient les torts du défunt. Et surtout pas quand il descend de la même mère que vous.
Lois humaines ou lois divines 
Antigone dépose un peu de terre sur la dépouille de Polynice. Un geste symbolique qui la mène à sa propre mort. Agit-elle par amour pour son frère ? Par colère contre Créon ? Ou par respect pour des lois naturelles qui priment sur les décrets humains ? Le débat est encore ouvert.
Dans une nouvelle version rédigée pendant l’Occupation, Jean Anouilh propose aussi l’image d’une adolescente qui refuse obstinément les compromissions du monde des adultes. On pense un peu à Greta Thunberg : une jeune femme assez attachée à une cause pour critiquer ouvertement l’ordre des puissants.
Une figure féministe
Antigone ose surtout s’élever contre les règles établies par un homme. Une position dont sa sœur Ismène lui rappelle la vanité : « C’est bon pour les hommes de croire aux idées et de mourir pour elles. Toi, tu es une fille. » Au XXe siècle, la jeune grecque devient en conséquence une grande figure du féminisme. L’anglaise Virginia Woolf salue sa capacité à intervenir dans la vie politique de la cité. Simone de Beauvoir en fait un pivot de sa réflexion entre idéalisme et réalisme. En 2013, elle est aussi choisie comme porte-drapeau d’un mouvement féministe anti-Femen. Rien à signaler depuis… Mais parions que sa prochaine apparition ne tardera pas.
