Critique

Libérez-vous de la tyrannie des chaussettes sales avec Titiou Lecoq !

06 février 2018
Par Mathilde1
Libérez-vous de la tyrannie des chaussettes sales avec Titiou Lecoq !

Alors qu’elle se baissait, une énième fois, pour ramasser une chaussette sale traînant dans son appartement, Titiou Lecoq, journaliste engagée dans les débats féministes, s’est demandée pourquoi, alors qu’elle vivait en couple, elle finissait toujours par se contorsionner pour ramasser cette fameuse chaussette sale. Et si le combat féministe se gagnait devant le panier à linge sale ?

libérées - Titiou Lecoq

La femme, cette autre

Enfant, jeune fille et jeune femme… Tout roulait pour Titiou Lecoq. À la fois fan de Barbie et d’Olive et Tom, elle ne voyait pas de problème, quinze ans plus tard, à ce que les filles à la Sorbonne étudient les Lettres et les hommes la Philosophie. Ou qu’elle n’ait que des professeurs hommes qui lui fassent étudier des auteurs hommes. En entrant dans la vie professionnelle, elle attribuait les remarques sexistes à la bêtise de ses interlocuteurs, ou à leur vieillesse. Cerise sur le gâteau, tes tâches ménagères étaient à peu près bien réparties au sein de son couple. Pour reprendre cette fameuse phrase de Candide « Tout allait pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles… ».

Et puis un jour, Titiou Lecoq est devenue maman.

Révélation féministe

En mettant au monde son premier enfant – qu’elle appelle malicieusement Têtard sur son blog – Titiou Lecoq a découvert la double journée, la charge mentale et la disparité du temps consacré au foyer au sein de son couple.

Selon Titiou Lecoq, l’idéal féminin, ce n’est pas seulement avoir les cheveux brillants, la peau douce et le ventre plat. Cette femme en couverture des magazines, dite féminine, ne représente qu’une toute petite partie de ce qu’on attend des femmes pour être La Femme. Avant tout, être une femme c’est « le souci permanent des autres et du foyer, la préoccupation de l’ordre, du propre, de l’organisation : c’est être sans cesse ramenée à la saleté, les tâches, les morves. ». À côté des top models de la presse féminine sont apparues les blogueuses mode / instagrameuses ayatollahs des tâches ménagères, des services de table en porcelaine, des gâteaux d’anniversaire à huit étages et d’enfants toujours bien peignés et assortis. Alors c’est ça, être une femme ? Être une parfaite maîtresse de maison ?, se demande Titiou Lecoq.  

Sphère publique et sphère privée

Si les combats féministes s’occupent souvent de la sphère publique (reconnaissance au travail, égalité salariale, briser le plafond de verre…), ne faudrait-il pas revenir à la sphère de l’intime et gagner d’abord la bataille contre la chaussette sale qui traîne ? Pourquoi la sphère privée serait-elle féminine et la sphère publique masculine ? 

Mais surtout, pourquoi les femmes s’infligent-elles cela ? Le postulat de Titiou Lecoq est que le genre féminin s’est construit autour de l’attention aux autres, du dévouement, voire du sacrifice. Tout pour ma famille ! De l’autre côté, les hommes ont été élevés dans l’affirmation de soi, de leur individualité. Si les deux font la paire, il n’est pas normal que cette classification dépende du genre. Car cette classification fait que, avec les enfants, la vie des femmes devient « compliquée », alors que les hommes gravissent les échelons au travail, tandis que les femmes restent rivées au panier à linge sale.

Pourquoi il faut lire Libérées, notamment quand on ne se considère pas comme féministe

« Tu ne t’intéresses pas aux tâches ménagères ? C’est pas grave, ça te fera quand même rigoler comme une otarie. », promet Titiou Lecoq sur son blog Girls and Geek. Alors oui, déjà, on peut lire Libérées parce que c’est drôle. Titiou Lecoq a le don pour les jeux de mots et les métaphores tirés par les cheveux, mais extrêmement pertinents.

« Et ça ne parle pas que de ménage, mais aussi de la préhistoire, de Paulette Bernège, du travail, de comment négocier au boulot, de pourquoi on est devenu maboules avec nos gamins, et de ce que ça veut dire être forcément un garçon ou une fille ou une loutre. »

Il faut lire Libérées, surtout si vous faites partie de ces femmes qui ne se sentent pas particulièrement féministes. Si vous êtes une femme qui se sent indépendante, bien dans ses baskets, bien au boulot, bien dans son couple. Si vous n’avez jamais eu le sentiment d’être confrontée au sexisme, ou très peu. Parce qu’en lisant Libérées, notamment si vous avez des enfants en bas-âge ou que c’est prévu, on se dit « Mais c’est vrai bien sûr ! Comment j’ai fait pour ne pas voir ça ? ». On s’oblige à discuter répartition des tâches ménagères, à être plus vigilante, à se faire violence pour ne pas succomber aux sirènes de la parfaite maîtresse de maison.

On peut être plus, on peut faire autre chose que faire tourner des machines et ramasser les miettes de pain. Les hommes aussi peuvent devenir « des citoyens à part entière de leur maison »

Parution le 4 octobre 2017 – 260 pages

Libérées, Titiou Lecoq (Fayard) sur Fnac.com

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