Critique

Une brève histoire de l’intelligence avec Laurent Alexandre

25 février 2018
Par Mathilde1
Une brève histoire de l'intelligence avec Laurent Alexandre

Selon Laurent Alexandre, chirurgien spécialiste en transhumanisme, l’intelligence artificielle n’est pas un choix mais le sens de l’Histoire. C’est ce qu’il explique dans La Guerre des intelligences, essai qui met face à face intelligence humaine et intelligence artificielle. On fait le point sur les thèses du neurobiologiste.

Intelligence artificielle vs Intelligence humaine

« Intelligence artificielle » : nous entendons, nous lisons voire utilisons ce concept au quotidien. Sans même savoir ce qui se cache exactement derrière lui. On se figure souvent des robots à forme à peu près humaine, la plupart du temps méchants, en passe de prendre le pouvoir sur le monde. Vraiment ? Voici la définition de l’intelligence artificielle que Laurent Alexandre donnait sur France Inter, au micro de Jean-Christophe Ruffin : « Ensemble de techniques disparates, informatiques, qui permettent de régler des choses que seul le cerveau humain était capable de faire jusqu’alors ».

Ces bases étant posées, il est nécessaire d’aller plus loin pour comprendre de quoi l’avenir sera fait. Un des distinguos les plus importants se fait entre intelligence artificielle faible et intelligence artificielle forte. La première, non-sensible, se concentre sur une tâche précise qu’on lui a demandé (via un programme) d’effectuer. C’est celle qui nous entoure aujourd’hui, depuis l’ordinateur Deep Blue qui a battu Kasparov aux échecs jusqu’à la reconnaissance vocale, en passant par la voiture automatique, les robots journalistes et toutes ces applications sur smartphones qui donnent l’impression d’être intelligentes.

L’intelligence artificielle forte est celle qui est source de tous les fantasmes : douée d’une conscience et d’une sensibilité propres, elle serait capable, comme l’homme, de se reprogrammer à l’infini…

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Un avenir pas si lointain

« C’est pour quand ? », se demande-t-on souvent. Chaque année, le coût de l’intelligence artificielle est divisé par 100, nous rappelle Laurent Alexandre dans La Guerre des intelligences. Le président de Google, Sundair Pichai a même avoué que la révolution de l’intelligence artificielle allait plus vite qu’il ne l’avait imaginé, alors même que sa société en est le premier investisseur. Aujourd’hui les GAFA (Google, Apple, Facebook, Amazon) et les BATX (Baidu, Alibaba, Tencent, Xiaomi) développent des entreprises qui se chargent de donner forme au monde de demain. Calico (Google) essaye d’euthanasier la mort quand Deep Mind (Google) se concentre sur la recherche médicale. Si le développement des robots, en raison de leur coût (le robot Atlas de Google coûte 1,5 milliards de dollars), n’est pas prévu avant 2035, la puissance des logiciels explose et ce sont toutes nos sociétés qui sont remises en question. L’intelligence artificielle est partout. Google peut remplacer un bilan cardiovasculaire avec une simple photo de notre œil. Il est capable de faire de meilleurs diagnostiques que les spécialistes les plus renommés ! 

Avez-vous vu le film Bienvenue à Gattaca ? Pour Laurent Alexandre, l’univers qu’il propose sera la norme dans quelques années. 

Centres de pouvoir

Laurent Alexandre est catégorique : L’Europe est à la traîne depuis la sortie de l’iPhone et nous sommes les pauvres de demain. La montée en puissance de l’intelligence artificielle va redéfinir les centres de pouvoirs et la carte géopolitique va être bouleversée. Les États-Unis et certains pays asiatiques prennent de l’avance, tandis qu’il n’existe pas un producteur d’intelligence artificielle en Europe.  

Des défis nous attendent très rapidement : comptables, chauffeurs… Des millions de personnes vont voir leur métier disparaître. Comme les 30 000 porteurs d’eau dans le Paris de 1793 qui ont dû trouver une nouvelle profession. Peut-on être optimiste ? L’intelligence artificielle est sur le point de créer des métiers qu’on ne pouvait pas imaginer il y a cinquante ans, du designer de bébés au créateur de micro-processeurs pour stimuler l’intelligence…

Selon Laurent Alexandre, la révolution doit commencer par l’éducation. Il est nécessaire de développer un appareil de formation qui intègre l’intelligence artificielle. Si nous souhaitons éviter la paupérisation, éviter d’être la Venise de demain, il faut que la politique soit plus agile et rapide, sinon les GAFA prendront le contrôle sur notre monde.

Terrifiant ? Comme Yuval Noah Harari, Laurent Alexandre craint l’apartheid entre les couches sociales éduquées à l’intelligence artificielle et les autres, ceux que l’historien israélien nomme les Dieux (les formés) et les inutiles (les non-formés).

Finalement, la guerre n’est peut-être pas entre les intelligences, mais entre ceux qui possèdent et maîtrisent l’intelligence artificielle et les autres ?


Aller plus loin avec Schumpeter et la destruction créatrice

« Les plus optimistes font référence au concept de destruction créatrice proposé par l’économiste Schumpeter, selon lequel toute rupture technologique entraîne la disparition d’activités anciennes mais en génère d’autres, plus créatrices. De fait, depuis la première révolution industrielle jusqu’à la révolution informatique de la fin du XXe siècle, le principe de Schumpeter s’est toujours vérifié. » Laurent Alexandre, La Guerre des intelligences.

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Chaque révolution, industrielle ou technologique, bouleverse en profondeur la société, à commencer par l’organisation du travail. Sur l’inspiration de Lavoisier (rien ne se perd, rien ne se créée, tout se transforme), l’économiste autrichien de la première moitié du XXème siècle Schumpeter analyse et théorise la disparition et la création conjointes d’activités économiques. Un classique ! 

Paru le 4 octobre 2017 – 250 pages

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