Le spationaute préféré des Français, Thomas Pesquet, était de passage à la Fnac des Ternes pour une séance de dédicaces à l’occasion de la sortie de Terre(s), son livre de photographies prises de l’espace. On l’a rencontré pour une interview la tête dans les étoiles.
Vous publiez un beau livre de photographies, reprenant vos clichés inédits réalisés depuis la station spatiale : qu’est-ce qui a motivé l’élaboration de ce livre, une démarche artistique ou plus informative ?
« Un peu de tout ça ! Initialement, ce qui frappe, c’est la beauté de la Terre quand on est dans la station spatiale, on trouve ça superbe, on a envie de la partager. Je me suis mis à faire des photos, alors que je n’en faisais pas, je suis un photographe du dimanche ! Le spectacle était tellement chouette… Dès que je voyais un paysage qui me plaisait, je voulais l’immortaliser. Au début, c’était catastrophique ! Je ratais toutes mes photos ! Puis ça s’est amélioré un peu. Au début, le but c’était de partager ça sur les réseaux sociaux, mais je me suis dit qu’il fallait qu’il en reste quelque chose. Les réseaux sociaux, c’est éphémère, l’information disparaît, je voulais un souvenir. […]
Il y a certaines photos qui font réfléchir, j’espère, sur la fragilité de la Terre. Le sens de la démarche c’est dire que cette Terre est magnifique mais aussi fragile : il faut la protéger. »
Comment s’est passée la collaboration avec Marion Montaigne ? Qui a fait le premier pas vers l’autre ? Comment la BD s’est-elle construite ?
« Marion a un blog – Tu mourras moins bête, mais tu mourras quand même – qui a donné lieu à la série d’albums. Elle avait fait un post de son blog sur les astronautes, très drôle, et où en prenait plein la tronche – à juste titre. J’avais commenté en disant « Moi qui suis astronaute, je trouve ça vrai et drôle ». Puis, il ne s’est plus rien passé. Elle a tergiversé en pensant qu’elle m’avait vexé à mort ! Puis je l’ai contactée par d’autres moyens. Je suis assez fan de BD, j’en lisais plein petit, donc je trouvais que c’était un format qui se prêtait très bien à raconter mon histoire : pas trop austère, on pouvait faire rire ! C’est important ! C’est une aventure sérieuse mais ça ne veut pas dire qu’on doive se prendre tout le temps au sérieux. Marion est à la fois hyper pointue scientifiquement et hyper drôle : ça me paraissait être la personne idéale, et on ne s’est pas trompé, le résultat final est à la hauteur de mes attentes. »
Comment vivez-vous cette posture de « rock star » alors que vous êtes avant tout un scientifique ? Comment reprend-on une vie normale après cette expérience hors du commun ?
« Je n’ai rien changé à la manière dont je vivais avant : je prends le train, je fais mes courses au même endroit, je me mets en terrasse de café. Les gens viennent me voir, c’est hyper positif, ils me disent des trucs sympas ! Ils me remercient, je leur dis « de rien, ça fait partie du boulot ». La clef c’est que je n’habite pas en France, mais en Allemagne. Là-bas je passe inaperçu. Je n’ai pas vocation à rester dans l’espace public, je n’ai pas de truc à vendre, sur le livre je ne gagne pas d’argent, je donne les sous aux Restos du cœur, c’est pour la beauté du geste. À partir du mois de janvier, on va disparaître des radars et se remettre au boulot… »
Qu’est-ce qui vous manque le plus de l’espace ?
« C’est la vue de la Terre… Il y a plein de trucs : voler, la camaraderie à bord de la station spatiale, mais la vue de la Terre on ne s’en lasse pas. Je n’ai pas vu 10% de ce que je voulais voir, et pourtant j’y ai passé six mois… J’espère y retourner, en été, car en hiver il y a beaucoup de nuages, il y a plein de choses que je n’ai pas réussi à voir… Je n’en suis qu’au tout début de mon travail de photographies. »
La BD avec Marion Montaigne en 3 mots ?
« Drôle, scientifique, captivante ! »
La Terre en 3 mots ?
« Beauté, fragilité, espoir. »
Votre livre préféré ?
« Je n’ai pas de livre préféré, mais le livre que j’ai lu récemment est Ascension de Vincent Delecroix (Gallimard). »
Le film qui vous a bouleversé ?
« Démolition de Jean-Marc Vallée. »
La chanson pour garder la pêche dans l’espace ?
« Tonight de Yuksek. »
La chanson pour faire décoller sa fusée ?
« We can’t fly d’Aeroplane. »
Si vous étiez un animal ?
« Un chat, mais sauvage ! »
Votre plus grande folie ?
« Je ne vais pas vous le dire ! Et puis on est plutôt des gens raisonnables dans ce métier ! »
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Parution le 24 novembre 2017 – 208 pages
Dans la combi de Thomas Pesquet, Marion Montaigne & Thomas Pesquet (Dargaud) sur Fnac.com
Parution le 23 novembre 2017 – 320 pages