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Mort numérique : que deviennent les données personnelles après un décès ?

31 mai 2022
Par Marion Piasecki
Mort numérique : que deviennent les données personnelles après un décès ?
©Lightspring/Shutterstock

Suite à un décès, les données personnelles comme les messages et photos sur les réseaux sociaux sont toujours là. Que peut-il être fait pour mettre à jour ou supprimer ces comptes ?

Selon la CNIL, environ 8 000 personnes inscrites sur Facebook décèdent chaque jour dans le monde. De plus en plus de personnes se demandent donc ce que deviennent leurs comptes après leur mort et ce que leurs proches peuvent en faire. Une question sur laquelle se sont penchés différents acteurs du numérique, comme la CNIL et les principaux réseaux sociaux eux-mêmes.

Les proches doivent généralement prendre l’initiative

Les réseaux sociaux ne savent pas faire la différence entre un compte simplement inactif et un compte dont l’utilisateur est décédé. Selon Facebook, un compte inactif peut être automatiquement désactivé au bout de plusieurs années, notamment pour les boîtes mail. Pour le reste, il faut que des proches informent le site que l’utilisateur est décédé en fournissant des preuves, un extrait de rubrique nécrologique par exemple. Le site de la CNIL indique en effet que « la règlementation (art. 85 de la loi Informatique et Libertés) relative à la protection des données personnelles prévoit que les héritiers d’une personne décédée justifiant de leur identité peuvent demander au responsable d’un fichier de tenir compte du décès de celle-ci, et de procéder à l’actualisation de ses données. »

Le plus souvent, les sites suggèrent de supprimer tout simplement le compte en remplissant un formulaire, mais certains, comme Facebook et Instagram, proposent également de garder le compte en le changeant en compte de commémoration. Ainsi, les proches ont toujours accès au contenu public et peuvent écrire des commentaires dans un espace dédié, mais le compte est bloqué. L’intérêt de ces deux solutions est d’empêcher quiconque de pirater le compte et de se connecter dessus à des fins d’usurpation d’identité.

Peut-on choisir le sort réservé à nos données personnelles ?

Selon l’article 85 de la loi Informatique et Libertés, « Toute personne peut définir des directives relatives à la conservation, à l’effacement et à la communication de ses données à caractère personnel après son décès ». Ces directives peuvent être modifiées à tout moment, il est possible de désigner une personne chargée de leur exécution et de les enregistrer auprès d’un tiers de confiance numérique certifié par la CNIL. C’est en l’absence de ces directives que les héritiers sont chargés de choisir ce que deviendront les données personnelles du défunt.

À savoir que seule la personne concernée peut transmettre ses identifiants et mots de passe à ses proches : les plateformes n’ont pas le droit de le faire, même si le décès de la personne et l’identité des héritiers sont confirmés. C’est pour cela que les plateformes permettent uniquement de créer une page de commémoration ou de clôturer le compte.

La question de l’héritage numérique

Aujourd’hui, il est également possible de désigner directement des contacts légataires qui pourront recevoir vos fichiers personnels. Par exemple, depuis fin 2021, Apple a autorisé ce type de démarche sur ses ordinateurs et téléphones. La ou les personnes concernées pourront ainsi demander à l’entreprise de transmettre des données stockées sur iCloud comme les mails, les notes, des fichiers, des historiques d’appels, des données de santé et des applications.

Cependant, il y a certaines limites à cette démarche. Tout d’abord, elle ne concerne qu’iCloud : si des fichiers sont stockés directement dans l’appareil ou sur un site tiers, il ne sera pas possible d’y accéder. Ensuite, s’il est possible dans la « vraie vie » d’hériter de biens culturels physiques comme des livres, des disques et des DVD, les livres numérisés, la musique et les films ne font pas partie de l’héritage numérique défini par Apple. Les achats intégrés aux applications comme les mises à niveau, les abonnements et les monnaies virtuelles dans des jeux vidéo ne sont pas incluses non plus. Enfin, pour des raisons de sécurité, il n’est pas possible pour les contacts légataires de recevoir des identifiants, mots de passe ou données bancaires.

Pour réunir dans un seul et même endroit un héritage numérique le plus complet possible, des start-ups s’intéressent à ce sujet délicat. En France, l’entreprise niçoise LegaPass a ainsi lancé fin avril son service de transmission d’héritage numérique qui inclut autant de données différentes que possible, que ce soit des comptes sur les réseaux sociaux, des photos, des achats dématérialisés et même des cryptomonnaies.

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Article rédigé par
Marion Piasecki
Marion Piasecki
Journaliste