
Quel artiste n’a jamais fait une reprise ? Le phénomène ne date pas d’hier, mais a explosé en France avec l’arrivée des émissions Popstars et Star Academy en 2001, puis Nouvelle Star en 2003, où Julien Doré s’est particulièrement distingué. Retour sur le pire et, surtout, le meilleur !
En 1969, Frank Sinatra reprend Comme d’habitude (1967), la chanson culte de Claude François, épaulé par Gilles Thibaut pour l’écriture du texte et par Jacques Revaux pour la composition de la musique. Sa version anglaise My Way a fait le tour du monde et est devenue bien plus célèbre que l’originale. Preuve en est : Yseult a jeté son dévolu sur cette dernière pour interpréter ce tube à la cérémonie de clôture des Jeux de Paris 2024.
Bien mieux que l’originale
Cet exploit n’est pas rare. En 1995, Björk obtient un disque d’or en Grande-Bretagne pour avoir revisité à sa manière si singulière It’s oh so quiet, chanson initialement intitulée Und jetzt ist es still et interprétée en 1948 par Harry Winter, puis reprise en anglais en 1951 par Betty Hutton. Finalement, à part la diva islandaise, tous ont sombré dans l’oubli.
Eh oui ! Parfois, la reprise est bien meilleure que l’originale, à l’instar de Nothing compares 2 U, une démo de Prince incarnée par Sinead O’Connor en 1990, Without You écrite par le groupe gallois Badfinger en 1972 puis sublimée par Mariah Carey en 1994, ou encore Toxic de Britney Spears, basée sur la musique de la chanson bollywoodienne Tere mere beech mein, signée Laxmikant–Pyarelal, en 1981.
Pour le pire et le meilleur
D’autres se sont même risqués à s’emparer de titres beaucoup plus connus, mais avec brio, comme Nirvana et sa version acoustique de The Man Who Sold The World (1970) de David Bowie, Jeff Buckley et son poignant Hallelujah (1984) de Leonard Cohen, et même Lara Fabian qui a su exporter au-delà de nos frontières Je suis malade (1973) de Serge Lama.
Mais d’autres, moins chanceux ou moins talentueux, s’y sont cassé les dents. Qui se souvient de Bambino de Dalida (version française de la chanson napolitaine Guaglione d’Aurelio Fierro créée en 1956) reprise par Plastic Bertrand ? D’Under the bridge des Red Hot Chili Peppers par All Saints ? De Smells Like Teen Spirit de Nirvana par Take That ? De One Way or Another de Blondie par One Direction ? Ou encore de L’opportuniste de Jacques Dutronc par Indochine ?
Les reines et rois de la reprise en France
Pourtant, plus que jamais encouragés par les programmes de télévision comme Taratata, The Voice ou Star Academy les artistes français continuent de s’adonner à l’exercice périlleux, parfois avec juste ce qu’il faut de fantaisie et de recul, comme Clara Luciani, Voyou ou Arthur Teboul, passés maîtres en la matière !
Clara Luciani
En 2018, Clara Luciani traduit The English Riviera (2011) de Metronomy et en fait un des singles phares de son premier album Sainte-Victoire (2018). Depuis, celle qui a commencé sa carrière au sein du groupe La Femme n’a cessé de faire des reprises.
Ont suivi La chanson de Delphine issu des Demoiselles de Rochefort avec Vladimir Cauchemar, Chanson pour ma vieille de Guy Béart sur l’album hommage De Béart à Béart(s), La fille du Père Noël de Jacques Dutronc et, en ce moment, sur les scènes de sa tournée, The Winner Takes it all d’ABBA, en français, devant un public toujours conquis !
Voyou
Après son deuxième album Les royaumes minuscules (2023) et son duo très remarqué sur Le bal avec Vanessa Paradis, Voyou s’est penché sur le répertoire d’Henri Salvador et a ainsi donné naissance à Henri Salvador est un Voyou (2025). Pour ce faire, Thibaud Vanhooland (dans le civil) a retravaillé à sa sauce ses chansons, en jouant sur le tempo, les harmonies et la signature rythmique, ou en y ajoutant parfois de nouveaux thèmes mélodiques.
Ainsi, le Lillois de 36 ans remet en lumière des chefs-d’œuvre comme Une chanson douce ou Syracuse, mais aussi quelques morceaux restés confidentiels qui témoignent de l’étendue remarquable de la palette créative du crooner.
Arthur Teboul, leader du groupe Feu! Chatterton
En 2024, le poète du rock français Arthur Teboul, leader du groupe Feu! Chatterton, croise la route du virtuose du jazz Baptiste Trotignon. Un choc artistique ! Comme une évidence, les deux musiciens se mettent à travailler ensemble sur le projet d’un album baptisé tout simplement et à juste titre Piano voix.
Le duo reprend avec poigne des standards de la chanson française signés Serge Gainsbourg, Jacques Higelin, Barbara, Jacques Brel, Georges Brassens ou Brigitte Fontaine, mais aussi quelques tubes britanniques de Radiohead ou de John Lennon. Il fallait oser ! Pari gagné.