La célèbre comédie musicale de Broadway, Hello Dolly!, vient de souffler ses 60 bougies à Paris, sur les Champs-Élysées. Véritable plaisir sucré, cette adaptation particulièrement réjouissante tombe à point nommé pour lancer la saison des fêtes et égayer comme il se doit cette fin d’année.
Léger et enlevé, Hello, Dolly! débarque sur les planches de l’ancien cabaret des Champs-Élysées, devenu le Lido 2, et y célèbre dans la joie et la bonne humeur ses 60 ans de carrière culte. Inspirés par The Matchmaker (1954) – la pièce de Thornton Wilder –, Michael Stewart et Jerry Herman ont créé ce music-hall au Saint James Theatre, à Broadway, en 1964. Il s’ensuivit 2844 représentations et dix Tony Awards, la plus haute récompense dans le domaine du spectacle vivant en Amérique.
Bien sûr, Hollywood s’est emparé du succès. Maître en la matière, Gene Kelly s’est chargé de l’adapter au cinéma en 1969, moyennant 24 millions de dollars et offrant le rôle-titre de l’entremetteuse professionnelle à Barbra Streisand. Résultat : trois Oscars, dont celui de la meilleure musique.
Hello, Dolly! : un tube planétaire incarné par Louis Armstrong
Et c’est bien là le point fort de Hello, Dolly! : sa partition signée Jerry Herman, ici parfaitement mise en musique par l’orchestre de Nigel Lilley et l’ensemble du casting hors pair. Mélodique et enjouée, elle emporte le public dès les premières notes. Difficile de se retenir de taper dans les mains ou de fredonner quand vient le moment tant attendu du titre éponyme. Le tube planétaire prend, ici, toute sa dimension euphorisante. En l’interprétant le 10 mai 1964, avant même la première officielle, Louis Armstrong, alors âgé de 63 ans, avait supplanté Can’t buy me Love des Beatles au hit-parade du Billboard.
Soixante ans plus tard, le charme opère toujours, et ce, grâce à la volonté de Jean-Luc Choplin, le directeur du Lido 2, qui a fait appel pour cette nouvelle production à ses fidèles collaborateurs anglais, le metteur en scène et chorégraphe Stephen Mear, ainsi que le scénographe Peter McKintosh. Précédemment, ils ont notamment monté pour lui Singin’ in the Rain au Théâtre du Châtelet en 2015, ou Funny Girl au Théâtre Marigny en 2019. Pour ses retrouvailles, le trio a choisi de rester le plus fidèle possible à la version originale, un brin désuète, mais suffisamment pétillante et rafraîchissante pour séduire un nouveau public.
Un livret léger, mais une audace perpétuelle
En effet, le livret de Michael Stewart peut paraître aujourd’hui assez léger, mais se révèle, sous ses airs édulcorés, finalement assez féministe. Médiatrice, opportuniste généreuse et veuve d’âge mûr, Dolly Gallagher Levi mène la danse au sein de la gent masculine et use de stratagèmes savamment pensés pour arriver à ses fins – refaire sa vie avec le fortuné Horace Vandergelder – à une époque où, dans la pensée collective, les femmes devaient servir les hommes, comme le dit si bien la chanson ironique, It Takes a Woman.
« La frêle jeune fille, qui est constamment là / Pour laver, bleuir et ferrer la jument / Et il faut une femelle pour mettre la table / Et sevrer le Guernesey et nettoyer l’écurie. »
Extrait de la chanson It Takes a Woman.
Des paroles qui prêtent aujourd’hui à sourire, mais qui ont dû en mettre mal à l’aise plus d’un dans les années 1960. De l’audace, Hello, Dolly! en a fait preuve tout au long de sa carrière. En 1967, pour raviver l’intérêt du public, le génial producteur David Merrick ose même présenter un casting entièrement noir.
32 ans d’absence en France
En France, c’est Annie Cordy qui, pour la première fois, au Grand Théâtre de Nancy puis au théâtre Mogador, à Paris, porta haut les couleurs de ce music-hall flamboyant dans une adaptation en français signée Jacques Collard. En 1992, Nicole Croisille lui redonne vie au Théâtre du Châtelet, le temps de 72 représentations, mais, depuis… silence radio ! C’est donc avec grand plaisir qu’on salue le retour de Hello, Dolly! chez nous, sur la scène un peu étriquée mais merveilleusement exploitée du Lido 2.
Dès son entrée, l’espiègle, rayonnante et charismatique Dolly (parfaite Caroline O’ Connor, vue dans Sweeney Todd, West Side Story et Moulin Rouge) entre en communion avec le public, distribuant ses cartes de visite à foison, un running gag bien trouvé. Elle en possède de toutes sortes, tels des remèdes à tous les maux et aux nôtres en particulier. Son tour de chant vient tous les balayer.
Avec poigne et une énergie communicative, elle mène brillamment la danse, embarquant dans son tourbillon plein de vie tous les personnages en mal d’amour. Coloré et enthousiasmant, ce Hello, Dolly!, comportant quelques numéros emblématiques de revue, comme des claquettes et des acrobaties de garçons de café, réveille parfaitement l’esprit frivole du Lido d’antan. On en sort revigoré, le sourire aux lèvres !
Hello, Dolly! au Lido 2, à Paris, jusqu’au 5 janvier 2025. Billetterie par ici.