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C’est l’heure du duel (version Saint-Valentin) : le meilleur du pire des comédies romantiques

10 février 2024
Par La rédaction
Ryan Gosling et Rachel McAdams dans “N'oublie jamais”.
Ryan Gosling et Rachel McAdams dans “N'oublie jamais”. ©Metropolitan FilmExport

Pour la fête de l’amour, la rédaction de L’Éclaireur a décidé de s’essayer à la battle du love, et ouvre le débat sur les films et séries romantiques.

Alors que la Saint-Valentin approche à grands pas, L’Éclaireur a décidé de s’essayer au jeu de la battle. Malgré tout l’amour qu’elles se portent, nos journalistes séries et cinéma, Agathe Renac et Lisa Muratore, ont ouvert le débat autour des œuvres les plus cultes du grand et du petit écran, celles qui les ont fait pleurer ou encore sur les couples les plus iconiques de la pop culture.

De N’oublie jamais (2004) à Titanic (1997), en passant par des propositions plus réalistes qui dissèquent le couple, nos deux spécialistes reviennent sur les productions incontournables qui les ont marquées, tout en offrant un regard moderne sur l’amour.

1 La comédie romantique la plus culte de tous les temps ?

Agathe Renac : Pour moi, le film culte par excellence, c’est Love Actually (2003). Quand j’étais petite, c’était notre rituel avec ma mère. On le regardait tous les ans. J’ai clairement grandi avec la phrase : “Allons nous gaver d’amour jusqu’à en crever”, avec l’envie qu’un garçon vienne en bas de chez moi et me fasse une déclaration avec un panneau “To me, you are perfect.” En vérité, je suis très embêtée de donner cette réponse, parce j’ai réalisé qu’il y avait beaucoup de red flags et de situations problématiques dans ce film, en grandissant.

Le patron qui se fait draguer et qui drague sa secrétaire qui a la moitié de son âge, le mec qui tombe amoureux de la copine de son meilleur ami alors qu’il ne la connaît même pas, toute la grossophobie autour de Nathalie qui est surnommée “la petite potelée” alors qu’elle fait une taille 38, Colin Firth qui tombe amoureux de sa femme de ménage sans même avoir pu parler avec elle… Il y a plein de choses qui n’ont pas de sens !

Bande-annonce de Love Actually.

Ceci étant dit, c’est un peu comme Friends ou How I Met Your Mother. Quand je les revois avec mon regard d’adulte, il y a plusieurs choses qui sont très problématiques, mais ce sont des séries avec lesquelles j’ai grandi. Ça fait du mal de voir qu’elles ont aussi mal vieilli, mais je pense que je continuerai à les regarder parce que c’est clairement un plaisir coupable.

Lisa Muratore : Pour ma part, je penche plus du côté du drame, avec un film moins joyeux que Love ActuallyN’oublie jamais. C’est ma meilleure amie qui me l’a montré en me garantissant que j’allais prendre une claque, et c’était vrai ! Le mélodrame, mon premier crush pour Ryan Gosling, mais aussi mon premier coup de foudre pour Rachel McAdams… Tout y était. Ce qui est incroyable dans cette œuvre, et on l’a vu aussi avec d’autres livres adaptés de Nicholas Sparks par la suite, c’est qu’il s’agit d’une histoire d’amour à travers le temps, à plusieurs époques, une histoire d’âmes sœurs qui doivent se retrouver, le tout avec un plot twist romantique autour de la maladie d’Alzheimer. 

Ryan Gosling et Rachel McAdams dans N’oublie jamais. ©Metropolitan FilmExport

Pour moi, c’est un peu une retranscription de La Belle et le Clochard (1955). Noah (Ryan Gosling), un ouvrier, tombe amoureux d’Allie (Rachel McAdams), une jeune femme riche et éduquée. Il n’y a rien de plus romantique qu’un amour interdit et contrarié du fait des différences sociales. Ça dit aussi beaucoup de choses d’une époque.

On voit comment leur amour surmonte les obstacles, et comment ils apprennent à s’aimer malgré leurs différences. La scène de dispute catalyse quelque chose de l’ordre du couple, et c’est ça qui va les aider à vivre leur amour à travers les années. Ils restent ensemble même dans l’adversité, même face à la maladie, même dans la mort. C’est une sorte de version moderne de Roméo et Juliette (1597). C’est très beau.

A. R. : Ok, je suis convaincue, je change de film en fait [rires] !

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2 Le meilleur couple dans un film ou une série ?

L. M. : Je pense directement à Han Solo et la princesse Leïa. C’est une histoire d’amour qui, au lieu de s’inscrire dans une comédie romantique, se déroule dans la science-fiction. Avec leur couple, il y a quelque chose de l’ordre du non-dit, d’un lien qui est indescriptible. Quand elle lui avoue qu’elle l’aime et qu’il lui répond “Je sais”, tout est dit. Par ailleurs, l’ego de Han Solo et la force de Leïa, qui sait lui tenir tête, en font un couple badass. Il y a quelque chose qui nous amuse là-dedans, on prend un plaisir jouissif à les voir évoluer, se chamailler. Ils ont une très belle complicité. 

Scène culte de Star Wars entre Han Solo et Leïa.

A. R. : Pour le coup, mon couple n’est pas du tout badass [rires]. Quand j’étais adolescente, j’adorais Blair et Chuck dans Gossip Girl, parce qu’ils représentaient la passion et ce côté fusionnel, comme ce que me montraient les comédies romantiques avec lesquelles j’ai grandi. Mais j’ai vite réalisé qu’ils étaient des red flags ambulants. Ils sont ultrapossessifs, ultrajaloux, il n’y a absolument rien de sain dans cette relation. Chuck est quand même allé jusqu’à vendre sa copine pour un hôtel !

Du coup, je vais plutôt choisir un autre couple de série beaucoup plus sain : Chandler et Monica (Friends). Ils ont une complicité légendaire et ils représentent parfaitement ma vision du couple. Pour moi, mon copain ou ma copine doit aussi être mon ou ma meilleure amie. Dans une relation, il faut rire et être là pour l’autre. Ça me rappelle aussi ce que l’on disait au sujet de N’oublie jamais : il faut accepter les différences de l’autre. Monica est quand même assez rigide et Chandler est complètement cynique, fou et libre ! On a envie d’avoir une relation aussi saine que la leur.

Je préfère donc m’éloigner de ma première proposition, beaucoup trop toxique, pour quelque chose de plus vrai. Au final, j’ai l’impression que les comédies romantiques nous montrent beaucoup de couples qui symbolisent cette toxicité, justement au nom d’une pseudo “passion”.

Monica et Chandler dans Friends.©NBC

L. M. : À l’époque, le fait de pousser les curseurs de ce qu’on appelle la toxicité ou l’emprise était un levier pour des comédies romantiques ou la romance en général. Aujourd’hui, c’est moins le cas, car les représentations évoluent. Même si les dark romances et les histoires pour young adult sont toujours là, les schémas évoluent.

A. R. : Ça me fait penser à Normal People, qui montre quelque chose de beaucoup plus réaliste. C’est très bien que les adolescents d’aujourd’hui voient des représentations plus réalistes que celles avec lesquelles on a grandi, qui nous ont fait accepter certains comportements qui ne sont pas forcément normaux.

3 La plus belle scène d’amour ? Celle qui vous fait le plus pleurer ?

L. M. : Je ne vais étonner personne, mais je pense forcément à Titanic ! Plusieurs scènes sont très belles, d’autres nous font pleurer. Quand on pense à ce film, on pense à Rose et Jack au bout du bateau et à Rose qui crie : “Je vole.” On pense à la scène érotique du portrait, ou à la main dans la voiture pleine de buée, mais aussi à la scène de danse en troisième classe. Toutes ces séquences catalysent la romance à l’état pur et le point culminant est évidemment le sacrifice de Jack. 

Ce qui est intéressant avec Titanic, c’est qu’à la base, James Cameron voulait créer un film catastrophe et l’accident du paquebot face à un iceberg. Or, aujourd’hui, il nous reste quoi ? Une romance qui compte parmi les plus emblématiques de l’histoire du cinéma et non un blockbuster ! C’est très fort.

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A. R. : J’ai du mal à faire un choix, donc je vais citer deux films. Quand je les ai vus, j’avais 15 ans, et je suffoquais tellement je pleurais [rires]. Je n’arrivais plus à m’arrêter. C’est d’ailleurs peut-être les seules fois où des films m’ont fait pleurer comme ça. Le premier, c’est Remember Me (2010), quand la maîtresse écrit la date sur le tableau et que l’on comprend ce qui va se passer pour le personnage incarné par Robert Pattinson. Le second, c’est Reviens-moi (2007). Les fins de ces deux longs-métrages sont basées sur un retournement de situation incroyable.

Bande-annonce de Remember Me.

Ceci étant dit, l’une des plus belles scènes appartient à N’oublie jamais. Les preuves d’amour sont juste trop belles, et tu as juste envie de pleurer en voyant tout ce qu’il fait pour elle. Quand tu réalises qu’il a passé un an à écrire une lettre par jour pour lui dire à quel point il l’aimait, qu’elle lui manquait et qu’il voulait la retrouver, quand il passe son temps à retaper une maison pour qu’elle puisse avoir les volets bleus dont elle a toujours rêvé, quand tu comprends qu’il prend le temps de lui raconter toute leur histoire d’amour, juste pour la retrouver cinq minutes… De la même manière que Jack, Noah se sacrifie par amour.

4 La meilleure leçon donnée par un film ou une série romantique ?

A. R. : Il s’agit de mon coup de cœur de l’année dernière, Simple comme Sylvain (2023). Ce film fait écho à mon vécu et je pense que beaucoup de personnes peuvent aussi se reconnaître. Il nous montre que l’on peut tomber amoureux ou amoureuse d’une personne complètement différente de nous, mais qu’il faudra se battre pour que ça fonctionne. Il nous permet aussi de réaliser à quel point les “vraies” relations sont différentes de celles présentées dans les comédies romantiques.

Dans la vraie vie, on doit lutter pour préserver son couple, malgré l’amour et la patience que l’on y apporte. Ton milieu, ton éducation et ton environnement peuvent remettre en question tes sentiments pour l’autre. Parfois, le regard que la société et ton entourage portent sur ta relation est plus fort que tes sentiments. La meilleure leçon transmise par Simple comme Sylvain, c’est qu’on peut être avec quelqu’un de très différent, mais que ça va forcément être plus compliqué. Cependant, si on pense que ça vaut le coup, il faut tout faire pour préserver cet amour.

Bande-annonce de Simple comme Sylvain.

L. M. : C’est très intéressant ce que tu dis, car c’est un point de vue très sociologique sur le couple, et c’est exactement ce que m’a offert Anatomie d’une chute (2023). Le film dépeint la chute d’un homme, mais aussi d’un couple à travers les défis intimes, sentimentaux, artistiques et professionnels. Justine Triet dissèque une relation comme on l’a rarement vu. En tant qu’autrice, réalisatrice et artiste, elle a transfiguré sa propre expérience en se posant la question suivante : comment deux artistes qui forment un couple peuvent-ils cohabiter quand l’un a plus de succès que l’autre ? Tout ce questionnement reflète la notion de compétition dans une relation.

Comment trouve-t-on sa place en tant qu’artiste, en tant que personne, quand on est deux et que c’est la femme qui a plus de succès ? Je pense que l’une des leçons à en tirer, c’est que l’ego n’a pas sa place dans l’amour. Pour moi, tu dois soutenir ton ou ta partenaire, ne pas blâmer l’autre pour les erreurs que tu commets et les risques que tu ne veux pas prendre. Certes, tu es en couple, mais tu es aussi une personne à part entière. Donc, c’est toi aussi qui dois mener ta propre vie. 

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A. R. : Finalement, Anatomie d’une chute montre aussi comment le succès de ton ou ta partenaire peut être le reflet de tes propres échecs !

L. M. : Exactement ! Monia Chokri et Justine Triet sont des autrices qui placent le couple à des endroits où on n’avait pas l’habitude de le voir. 

5 Le film ou la série la plus réaliste ?

L. M. : Cette fois-ci, il s’agit d’une série : Modern Love (2019). C’est une anthologie qui aborde de plusieurs manières les itérations de l’amour, qu’il soit sexuel, platonique, romantique ou familial. On est davantage dans une analyse des relations humaines, mais c’est fait avec une telle véracité et un tel réalisme qu’il faut parfois vraiment s’accrocher. C’est très dramatique par moment, les personnages pleurent, se déchirent, se disent des choses, se blessent… Ce n’est pas forcément feel good, quelques fois même très pessimiste, mais ça reflète vraiment la vie telle qu’elle est ! 

A. R. : Quand on me parle d’amour terre à terre, je pense forcément à La La Land (2016). Ça peut paraître étonnant, car c’est une comédie musicale, mais cette dualité entre vie professionnelle et vie amoureuse est très réaliste. Ça parle aussi d’une question qui me hante : “Et si… ?” Il y a beaucoup de films qui parlent de l’effet papillon, notamment Le Tourbillon de la vie (2022) que j’ai vu, et adoré, récemment. Cette question est fascinante et ça nous touche toutes et tous. “Et si je restais avec lui, que se passerait-il ?”, “Et si je décidais de me lancer dans ma carrière d’actrice ?” 

Bande-annonce de La La Land.

Dans La La Land, tout cela est fait de façon subtile. Autre point sur lequel c’est très réaliste, c’est le traitement de la rupture et comment elles peuvent être saines. Comment deux personnes qui se sont aimées très fort seront toujours aussi importantes, et comment elles laissent finalement une trace indélébile dans la vie de l’autre. 

L. M. : En tout cas, à l’issue de cette battle, j’ai remarqué une chose !

A. R. : Laquelle ?

L. M. : On cite quand même beaucoup Ryan Gosling.

A. R. : Ne me lance pas sur Crazy Stupid Love (2011) !

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