Stephen Graham Jones publie son premier comic book, disponible en France chez Black River depuis le 11 janvier.
Il est un mythe qui fait tiquer les plus grands historiens depuis plus de 30 ans : celui de Christophe Colomb. Enseigné à l’école comme une figure héroïque, l’homme était en réalité bien éloigné du personnage légendaire. Entre piètre navigation, kidnapping et viol, l’héritage sanglant laissé par l’explorateur n’a pourtant jamais été un secret pour les communautés amérindiennes, qui ont toujours regardé la célébration du fameux « Columbus Day » par leurs compatriotes avec déception et écœurement. La volonté de Stephen Graham Jones d’en faire le sujet de sa nouvelle bande dessinée n’est donc pas si surprenante.
Corriger les erreurs du passé
Bien qu’il soit à la fois influencé par les œuvres de Stephen King et le mouvement littéraire de la Renaissance amérindienne, il serait dommage de cantonner Graham Jones à ces seules sources d’inspiration. Titulaire d’un doctorat de l’Université d’État de Floride, ce professeur et écrivain prolifique a su se forger un chemin bien singulier dans la littérature moderne.
Qu’il s’agisse de ses nouvelles ou de ses œuvres plus longues, ses écrits font toujours la part belle à une certaine érudition littéraire et à une inquiétante étrangeté sans jamais pour autant perdre son lectorat dans des complexités inutiles. Il y a quelques années, son roman d’horreur Un bon Indien est un indien mort avait beaucoup fait parler de lui et son dernier roman, Mon cœur est une tronçonneuse, a été récompensé à plusieurs reprises.
Course contre l’apocalypse
Bien qu’il s’agisse de sa première incursion dans la bande dessinée, Earthdivers ne surprendra pas les habitués. Nous y retrouvons le style très personnel de l’auteur, familier des histoires horrifiques à travers le prisme intimiste de la culture amérindienne. Ce comic book se déroule en 2112, et l’apocalypse est à nos portes.
L’humanité a depuis bien longtemps perdu tout espoir, à l’exception d’un petit groupe d’indigènes qui vit en marge de la société. Ceux-ci ont découvert un moyen de voyager dans le temps et sont convaincus que le seul moyen de sauver l’humanité est d’assassiner Christophe Colomb avant que ce dernier ne s’égare accidentellement en Amérique.
En prenant le contrepied d’une question récurrente de la science-fiction (comme « Et si nous tuions Hitler avant sa prise de pouvoir ? »), Stephen Graham Jones parvient à injecter à Earthdivers des scènes que ne renieraient pas les meilleurs slasher movie, genre qu’il avait déjà exploré dans son dernier roman. Les lecteurs pourront également se délecter des questions éthiques et philosophiques posées par cette vaste tapisserie temporelle.