Entretien

Comment écrire un livre qui marche ? Manon Fargetton nous livre ses secrets

01 janvier 2024
Par Pauline Gabinari
Le tome 2 du “Cycle des secrets” paraîtra en juin prochain.
Le tome 2 du “Cycle des secrets” paraîtra en juin prochain. ©Chloe Vollmer-Lo

[Rentrée littéraire 2024] Le 1er janvier a sonné et l’heure est désormais aux bonnes résolutions et aux nouveaux challenges. Ça tombe bien, car pour ceux et celles qui se seraient lancé le défi d’écrire en 2024 leur premier roman, L’Éclaireur, aux côtés de Manon Fargetton, offre plusieurs conseils pour que votre livre fonctionne.

Manon Fargetton a écrit son premier livre à 17 ans. Aujourd’hui, elle en a 36 et s’est lancée dans l’écriture un peu folle d’une grande saga, Le Cycle des secrets (Gallimard Jeunesse) où se mêlent magie, complots et histoires d’amour. Forte d’un compte Tik Tok de 92k abonnés où elle distille ses conseils aux jeunes auteurs, elle défend l’écriture comme une pratique qui s’apprend et se maîtrise. Curieux d’en savoir un peu plus, L’Éclaireur l’a rencontrée.

Cela fait un an que vous avez lancé votre compte TikTok. Qu’est-ce qui vous y a poussée ? 

C’est une façon pour moi de renouer avec mon lectorat adolescent tout en amenant de la pratique et du concret dans l’écriture. En France, on a cette image de l’écriture comme un art total où soit on est génial de naissance, soit on n’est pas auteur. Selon moi, c’est faux. Il y a tellement de choses qui s’apprennent dans l’écriture. Moi-même, j’ai dû apprendre comment construire une histoire, quelles en sont les dynamiques…

Il y aurait donc une sorte de “recette” pour bien écrire ? 

Pas vraiment. Un conseil d’écriture, ça va être la voix la plus empruntée, la plus logique, celle que plusieurs auteurs ont débroussaillée avant vous. Évidemment, pour chaque conseil, il y a plein de contrexemples. Pour moi, le conseil d’écriture, c’est une technique, un outil qu’il faut maîtriser pour pouvoir s’en détacher. D’ailleurs, je ne suis pas toujours mes propres conseils d’écriture !

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Parmi les difficultés d’écriture, on parle souvent du “syndrome de la page blanche”…

Oui, et c’est une formulation qui me fait bien rire, car si on ne sait pas quoi écrire comme première phrase, il suffit de commencer par la deuxième ! Dans la pratique, je ne suis pas souvent confrontée à une page blanche, car j’écris des notes au fil de l’eau que j’absorbe dans mon texte principal petit à petit. Quand c’est une scène où je n’ai rien d’avance, je commence par écrire des petits trucs, des bouts de dialogues, une espèce de squelette de mes scènes. Au bout d’un moment, je sais où je veux aller et le reste se construit de façon assez logique. 

Comment écrivez-vous ? 

Pour écrire, j’ai besoin d’une routine que je change régulièrement. C’est important d’avoir un rendez-vous régulier avec soi-même, de se dire, à tel moment : “J’ai rendez-vous avec mon histoire.”

Les 5 conseils de Manon Fargetton 

  • Bombarder son idée : “Je fais partie des auteurs qui construisent leur histoire avant d’écrire. Par exemple, quand je pars d’un personnage, il y a une phase de construction en amont pendant laquelle je réfléchis à la façon dont il ou elle va évoluer au cours de l’histoire et pourquoi. Je me demande : qu’est-ce qu’il veut ? De quoi a-t-il peur ? Quelles sont ses faiblesses, ses défauts ? Toutes ces informations vont m’aider à construire mon récit. Si je fais correctement ce travail, le personnage prend vie pendant l’écriture, avec sa chair et son passé.”
  • Show don’t tell : “Le show don’t tell, c’est montrer une information ou une émotion au lecteur plutôt que de lui dire. Ce n’est pas seulement remplacer la peur d’un personnage par le fait qu’il crie ou qu’il se recroqueville, cela va plus loin. Il s’agit, par exemple, au lieu d’expliquer les défauts du personnage, de créer des situations où le lecteur va être témoin de ces défauts et de leurs conséquences sur les autres personnages. Ça implique de faire confiance au lecteur pour tirer ses propres conclusions.”

« Il ne faut pas vouloir aller trop vite et accorder à chaque roman le temps nécessaire. »

Manon Fargetton
  • Se méfier du sujet : “Quand on a vraiment envie de parler d’un sujet, il faut réussir à s’en détacher. Dans Nos vies en l’air (2019, Rageot), un roman sur le suicide adolescent, j’ai décidé de faire dialoguer deux ados qui se rencontrent sur le même toit pour se suicider. Dans ce livre, tout l’enjeu a été pour moi de ne pas faire un livre sur le suicide, mais bien de raconter l’histoire de ces deux personnages.”
  • Prendre le temps : “Il ne faut pas vouloir aller trop vite et accorder à chaque roman le temps nécessaire. Faire des pauses, reprendre le texte, le faire lire par d’autres… Chaque roman impose son rythme ; une durée nécessaire, incompressible, pour le mener à bien en lui rendant justice. Le Cycle des secrets, c’est sept ans d’écriture par exemple.”
  • Bien choisir ses premiers lecteurs : “Je pense que cela ne sert à rien de faire relire son texte à 20 personnes. Mieux vaut sélectionner un petit groupe de trois ou quatre personnes. Parmi eux, je conseille des grands lecteurs, des personnes familières du genre, qui vont oser donner leur avis sans être trop dévalorisant et qui font des lectures actives crayon en main.”

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