Comme chaque fin d’année, la question des bonnes résolutions se pose. On m’a lancé un défi (un peu fou) : faire une détox d’Instagram, YouTube et de toutes plateformes de streaming vidéo pendant 30 jours. Spoiler alert : c’était dur. Dans ce dernier épisode, je vous raconte l’impact que ce challenge a eu sur mon quotidien, un mois plus tard.
Les minutes qui précèdent les grandes vacances ont une saveur particulière. Excitation, liberté, promesse de nouvelles aventures… Tous les ingrédients sont réunis pour agiter toute une classe d’étudiants – comme l’a si brillamment montrée la scène d’ouverture d’High School Musical 2.
Aujourd’hui, je ne répète pas le mot « vacances » en boucle (contrairement à Troy et Gabriella), mais bien « Instagram », « YouTube » et « Netflix ». Après quatre semaines de détox numérique intense, je suis enfin LIBRE. Je vais pouvoir binger toutes les séries que j’ai manquées et rattraper tous les posts à côtés desquels je suis passée. Verdict : est-ce que le monde est toujours le même après ce mois d’absence ?
Le jour de gloire est arrivé
1er décembre. Ça y est, on y est. J’attendais ce moment depuis 31 jours. Après un mois sans ouvrir les réseaux sociaux ni me balader sur les plateformes de streaming vidéo, je peux enfin regarder ce que je veux. Mon premier réflexe de la journée est de réinstaller toutes les applications sur mon téléphone : Instagram, YouTube, Facebook, Netflix, MyCanal… Tout y passe.
Je me pose quelques minutes pour réfléchir à mon plan d’attaque. Par où commencer ? J’ai tellement de vidéos à voir et d’informations à rattraper. J’ai l’impression d’être un enfant dans la chocolaterie de Willy Wonka ; je ne sais plus où donner de la tête.
Cet infini de possibilités me fait paniquer, alors je décide de changer les règles. Le nouveau plan, c’est qu’il n’y en a pas. À la guerre comme à la guerre, je vais attaquer tous les terrains. Je fais un scroll intensif sur Instagram, un tour sur les comptes de mes créateurs préférés, je regarde toutes les stories, et je finis par me dire : « Tout ça pour ça ? »
Un mois de FOMO (Fear of missing out) et de nœuds dans le cerveau pour avoir finalement raté… un match de foot entre streameurs, l’anniversaire XXL de Léna Situations et quelques photos d’îles paradisiaques. Lassée de l’application après seulement 15 minutes, je finis par reposer mon téléphone.
L’âge de raison
Bilan : les réseaux sociaux ont été décevants, mais les séries vont forcément relever le niveau. J’avais prévu le coup en décidant de ne voir personne le soir de ma libération pour m’empiffrer de contenus YouTube et Netflix. Finalement, j’ai annulé cette petite soirée binge-watching pour dévorer une raclette avec un ami. Vie réelle 1, vie numérique 0.
Sur le chemin du retour, je fais le point sur toutes les productions que je dois rattraper. Mercredi, 1899, White Lotus… Il y en a beaucoup. Conclusion : je vais passer la nuit à enchaîner les épisodes jusqu’à l’épuisement. Ce mois de détox m’a provoqué tellement de frustration que je suis prête à ne pas dormir et assumer mes énormes cernes le lendemain.
Après une petite concertation avec moi-même, je décide que ma première victime sera Mercredi. Tim Burton + Netflix + teen drama = le combo parfait pour revenir dans l’univers du streaming. Gros plaid, bonbons, écran XXL… Tous les éléments sont réunis pour que je plonge dans l’univers fantastique de la famille Addams. À la fin du premier épisode, je réalise que je n’ai pas checké une seule fois mon téléphone durant la dernière heure – il n’y a pas de petite victoire.
À la fin du deuxième, j’éteins la télé. La série est captivante et bien ficelée, mais j’ai été rassasiée pour la soirée. Je me rends compte que je préfère savourer chaque minute plutôt que de tout binger. Mais qu’est-ce qu’il m’arrive ? Ce challenge m’a complètement matrixée. Les jours suivants, je répète exactement le même schéma : deux épisodes par soir, une vidéo YouTube, dodo. Les habitudes de mamie ont la vie dure.
Le « expectation vs reality » de cette détox aurait sa place dans les meilleurs memes d’Instagram. J’étais persuadée que ces retrouvailles avec ma vie numérique seraient dignes d’une comédie romantique : le cœur qui bat à 10 000 à l’heure, la passion du début, la volonté de ne plus se quitter…
Finalement, la love story est déjà terminée et trois minutes sur Instagram suffisent à me lasser. Il y a un mois, j’étais persuadée que ce challenge n’aurait aucun effet sur mes habitudes numériques. En réalité, il les a profondément modifiées. Je me contente d’un écran à la fois, je suis concentrée sur la série, je prends le temps de savourer chaque épisode… Je suis passée de consommatrice compulsive à consommatrice raisonnée.
Le FOMO contre-attaque
Après deux épisodes passés avec moi, vous avez fini par comprendre que le FOMO était une partie intégrante de ma vie. Je le vois un peu comme cet ex collant qui revient dans mes DM toutes les semaines pour me rappeler qu’il est toujours là. Durant ce mois de l’enfer, le manque de réseaux sociaux n’avait fait qu’amplifier ce phénomène.
Je me sentais déconnectée du monde qui m’entoure et j’avais ce besoin de savoir ce que faisaient mes amis au quotidien. Ce sentiment s’était atténué à partir de la troisième semaine, pour finalement disparaître. J’avais accepté cette coupure avec le monde virtuel. À quelques jours de la fin de la détox, je n’avais qu’une hantise : que ce sacré FOMO réapparaisse.
Et bingo, il est revenu à la vitesse turbo. Il ne m’a fallu qu’une semaine pour replonger dans la toxicité d’Instagram. Résultat : je compare mon quotidien avec la vie rêvée que les autres exposent, et je me remets en question. Épuisée par ma semaine, je scrolle les publications depuis le fond de mon lit. Expositions, concerts, soirées… Le vendredi soir de mes amis est plus palpitant que le mien, et je me demande ce que j’ai raté dans ma vie pour passer mon début de week-end devant Netflix. Outch. Ça pique.
Il m’a suffi d’un mois pour oublier le protocole de sécurité sur les réseaux sociaux. Règle numéro un : se rappeler que tout ce qu’on voit en ligne est faux ou embelli. Règle numéro deux : ne surtout pas se comparer. Je me suis faite avoir comme une débutante, et cette idée que ma vie est nulle par rapport à celle des autres persiste toujours, quatre semaines après mon retour sur Instagram.
Après avoir eu 80 ans, puis 5 ans, j’en ai maintenant 15. Le mur de protection que j’avais construit pour me préserver des réseaux sociaux a été détruit. Je dois désormais le reconstruire petit à petit, pour ne plus être une victime de ce satané sentiment d’insécurité.
Bilan is coming
Je constate donc que les vieilles (et mauvaises) habitudes ont fait leur grand retour, mais qu’en est-il des nouvelles ? De bonnes pratiques se sont-elles réellement créées ? L’heure du bilan a sonné. Je reprends ma petite liste de questionnements et d’objectifs pré-détox, et je fais le point.
• « Est-ce que je vais réussir à tenir 30 jours ? » : oui.
Ça a été difficile, mais j’ai réussi – et je n’en suis pas peu fière.
• « Mon moral va-t-il être impacté ? » : oui.
Bien plus que je ne le pensais, et c’est effrayant. Ce challenge m’a permis de réaliser que j’étais addict aux réseaux sociaux et aux plateformes de streaming, et que j’avais besoin de ces divertissements pour m’apaiser et faire baisser la pression après de grosses journées.
• « Ce sentiment de FOMO va-t-il s’intensifier ? » : OUI.
Il a fait beaucoup de yoyo ces derniers temps. Je pense que c’est un sentiment qui a besoin de stabilité pour se gérer. Il est revenu subitement quand j’ai commencé le défi, puis s’est calmé, avant de revenir quand j’ai retrouvé une vie numérique « normale ». Je pense donc qu’il faut apprendre à le gérer avec le temps et trouver des habitudes rassurantes pour le réguler.
• « Mon temps d’écran va-t-il diminuer ? » : un peu.
Je suis passée de 2h20 à 1h30 de temps d’écran quotidien sur mon téléphone. Petite perf. En revanche, celui passé sur la télé connectée a été divisé par deux (de 4 à 2 heures par jour).
• « Vais-je lire plus de livres ? » : non… mais oui.
Le psychologue Michaël Stora avait raison : j’ai besoin de ma dose d’écran quotidienne pour pouvoir être plus calme et avoir la concentration nécessaire pour me plonger dans un livre. Pendant le challenge, je ne me suis donc pas rabattue sur la lecture pour compenser mon temps d’écran. Depuis la fin de cette détox, en revanche, je prends le temps de lire et l’envie est revenue. Je dévore encore plus de romans qu’avant. Je délaisse souvent Netflix pour me faire des soirées ou des après-midi lectures – ce qui ne m’était pas arrivé depuis très très longtemps.
• « Est-ce que je vais rattraper tous les mangas qu’on m’a conseillés ? » : non.
Mais le fait de m’ouvrir à d’autres genres et de découvrir des films que je n’aurais jamais regardés m’a permis de me lancer dans les anime. Je suis de plus en plus curieuse, et la liste des « œuvres à voir absolument » ne cesse de s’allonger. J’ai enfin réussi à sortir de ce satané algorithme qui m’enfermait dans ma bulle de séries doudous et faciles, et j’accepte (enfin) de délaisser le temps consacré à ces dernières pour découvrir de nouveaux formats.
• « Est-ce que je vais regarder des films (en direct ou en louant des DVD) ? » : ohhhh oui !
Ma lutte acharnée pour faire fonctionner le lecteur DVD m’a fait perdre quelques années d’espérance de vie, la location en VOD m’a fait perdre beaucoup d’argent, mais j’ai enfin renoué avec ce format que j’avais abandonné il y a beaucoup trop longtemps.
• « Est-ce que je vais enfin apprendre à cuisiner ? » : …
Une tarte, ça compte ?
• « Est-ce que je vais enfin reprendre le sport ? » : non… mais oui.
Un événement étrange s’est produit. Je n’ai fait du sport qu’une seule fois durant les quatre semaines de ce challenge. En revanche, j’ai eu un regain d’énergie dès la fin du défi qui m’a donné envie de courir et de tester de nouvelles disciplines. J’imagine que le phénomène du « j’ai besoin de mon temps d’écran pour faire redescendre la pression et pouvoir lire » fonctionne aussi avec le sport.
• « Est-ce que je vais retrouver les musées (abandonnés depuis bien longtemps) ? » non… mais oui (aussi).
Je n’ai pas visité un seul musée durant ce mois de l’enfer. Mais, depuis que j’ai retrouvé les écrans, je m’inspire de bons plans que je vois sur Instagram et je me programme des sorties culturelles, des spectacles, des concerts… C’est l’un des seuls points positifs des réseaux sociaux : les autres nous inspirent et nous donnent envie de sortir de notre zone de confort, à être plus curieux et découvrir de nouvelles choses.
• « Est-ce que je vais de nouveau écrire (tout et n’importe quoi) dans des carnets ? » : non.
Qu’on soit honnête : ça a duré deux jours, puis ma motivation du début a été balayée par la volonté de bouder ce challenge.
• « Vais-je écouter plus de podcasts ? » : oui.
J’ai découvert un tout nouvel univers et j’en suis très heureuse. J’ai même intégré ces petits moments dans ma routine : le week-end en me préparant, le matin sur le chemin du travail, durant mes séances de sport…
• « Est-ce que je vais organiser plus de sorties avec mes proches ? » : non… mais oui.
Durant ce challenge, mes semaines étaient très chargées et je n’ai pas pu profiter de mes amis. Un mois après la libération, je me rends compte que je ne suis jamais autant sortie qu’aujourd’hui. Cette détox m’a donné encore plus envie de profiter de mes proches et de partager des moments avec eux « en vrai ». Avant le défi, je laissais souvent ma flemme parler et je finissais souvent par faire des dates avec Youtube ou Netflix. Depuis, je ne la laisse plus dicter mes soirées et je renoue vraiment avec les vraies sorties et les vraies personnes.
I’m addicted to you, don’t you know that you’re toxic ?
Pour finaliser ce bilan, je dirais que ce challenge était aussi difficile que gravir l’Everest à cloche-pied. Mon humeur et ma motivation étaient proches du néant, et je ne compte pas le nombre de fois où j’ai voulu abandonner. J’étais persuadée qu’il n’aurait aucun impact sur le long terme, mais je m’étais trompée.
Il m’a permis de m’éloigner de la toxicité des réseaux sociaux (dont je n’avais pas conscience) et de sortir des algorithmes qui m’enfermaient dans une bulle. Il m’a guéri de cette boulimie de vidéos, que je consommais du matin jusqu’au soir. Exit les dimanches sous la couverture à enchaîner les épisodes. Welcome back dans le monde réel.
Je mentirais si je disais que j’ai complètement abandonné Netflix. Je continue à binger certains programmes, mais sur de courtes périodes. Cette détox m’a appris à équilibrer le temps d’écran et celui passé « en vrai ». Une chose est sûre : j’ai besoin de l’un pour profiter de l’autre. Sans réseaux sociaux ni streaming vidéo, je suis tendue au point de ne plus pouvoir lire ou faire une activité. Mais aujourd’hui, je suis incapable de les consommer à l’excès. Sinon, c’est l’overdose.
Instagram, YouTube, Netflix… L’addiction à ces plateformes est réelle. Ce sont des drogues aussi douces que fourbes. Elles nous laissent penser qu’on a le contrôle et qu’on n’est pas addict, mais on commence à chouiner dès qu’on nous les retire une semaine.
La théorie du baby step
Est-ce que je vous conseille cette détox ? Je ne vous connais pas, mais je ne vous veux pas de mal. Si vous êtes complètement accro, je vous déconseille de tout couper subitement pendant un mois. Ce serait comme plonger dans un bassin infesté de crocodiles, sans brassard ; dangereux, et les chances de survie sont faibles.
En revanche, je ne peux que vous recommander de vous questionner sur votre consommation et tenter de la réduire progressivement. Cette détox raisonnable me semble être un bon compromis. Elle sera efficace sur le long terme et vous permettra de trouver de nouvelles habitudes sans pour autant vous traumatiser – oui, c’était traumatisant ; oui, je suis une drama.
Commencez par exemple par une coupure des réseaux sociaux durant vos heures de travail. Fini, la petite distraction entre deux tâches. Cette expérience aura deux conséquences. Petit un : vous allez constater un réel pic de productivité. Petit deux : vous réaliserez que vos collègues sont très sympas – les pauses dans la « vraie vie » sont bien meilleures que celles dans le monde numérique.
La deuxième étape, c’est d’abandonner son téléphone durant la soirée pour être à 100 % avec ses amis, son film ou sa série sans être interrompu par 6 789 notifications. L’objectif est simple : profiter à fond de l’instant présent (promis, cet article n’est pas sponsorisé par Christophe André).
Finalement, ce challenge était comme une séance de sport un dimanche matin ; on y va à reculons, mais on en ressort heureux et hyper motivé. Ne faîtes pas comme moi en partant courir un marathon en tong. Allez-y par baby steps et vous deviendrez le Usain Bolt de la détox. C’est avec cette superbe métaphore que je clos cette douloureuse expérience. Votre cobaye préféré vous dit à très vite, pour de nouvelles aventures.