Disparue en 2002, la revue était une référence dans le monde du manga, et cruciale dans l’histoire de la jeunesse japonaise des années 1960.
Au même titre que le cinéma, la peinture ou la bande dessinée (un domaine plus en plus concurrencé), le manga est aujourd’hui un secteur florissant en France. À tel point que, outre la sortie récurrente de nouveaux titres, il fait désormais l’objet d’événements ultra-populaires, comme des salons ou des expositions.
Un voyage dans le temps et une leçon d’Histoire sur le Japon
Depuis le 14 juin, ce n’est pas un manga ou un auteur qui est à l’honneur, mais un mensuel. Fondé en 1964, Garo s’est imposé comme une référence pour la jeunesse japonaise, à une époque cruciale pour le pays. Le mensuel iconoclaste est à l’honneur d’une exposition gratuite à la Maison de la culture du Japon à Paris. Pour rappel, cet établissement se situe dans le 15e arrondissement, au 101bis quai Jacques Chirac. Véritable saut dans le temps, l’exposition souligne le rôle révolutionnaire joué par Garo au cours de ses dix premières années d’existence et l’impact considérable qu’il a laissé sur le monde du manga.
Les œuvres de Shirato Sanpei, Tsuge Yoshiharu, Mizuki Shigeru, Tsuge Tadao, Katsumata Susumu ou encore Tatsumi Yoshihiro ont en effet contribué à ouvrir un chapitre important de l’histoire du manga. Accessible jusqu’au 30 juillet, cette exposition est l’occasion d’admirer des documents exceptionnels et originaux, qui permettent de (re)plonger l’histoire de ce mensuel emblématique et, surtout, de découvrir le Japon autrement. Le samedi 25 juin, de 15 heures à 16h30, les plus curieux pourront même assister à une conférence de Claude Leblanc, journaliste et commissaire de l’exposition, qui viendra parler de ce magazine mythique.
Un rayonnement considérable dans la création des mangas
La revue a été fondée à l’automne 1964, alors que Tokyo s’apprêtait à recevoir les Jeux olympiques d’Été. Elle était prisée par les étudiants et la jeunesse contestataire, et a bouleversé le manga sur les plans graphique et narratif. Le magazine est né de l’idée de Katsuichi Nagai et du dessinateur Shirato Sanpei, désireux de créer une revue pour accueillir la nouvelle série du mangaka : Kamui-Den. Cette création est un récit martial qui se situe dans la période d’Edo et raconte en creux le destin des « petites gens », les discriminations et la violence sociale. Un symbole de lutte contre l’oppression qui trouvera une certaine résonance dans le Japon des années 1960. La série n’était toutefois pas prête au lancement de Garo et elle est parue dès le numéro 4 et jusqu’en 1971, à raison d’une centaine de pages par parution.
Malgré une fabrication quasi artisanale et une modeste diffusion (80 000 exemplaires au sommet de sa popularité), le mensuel a eu un rayonnement considérable dans la création de mangas, bien avant le Weekly Shonen Jump. « L’histoire du magazine s’inscrit dans un tournant de l’histoire japonaise d’après-guerre, celle de la reconstruction, de l’entrée dans la croissance économique et des bouleversements des modes de vies, une période aussi d’agitation sociale et politique », résume Claude Leblanc, commissaire de l’exposition. Finalement, le magazine a survécu jusqu’en 2002.