Sous ses airs de divertissement sulfureux, le thriller érotique a façonné tout un pan du cinéma des années 80-90. Entre pulsions inavouées, couples au bord de l’implosion et femmes fatales insaisissables, le genre a marqué durablement l’imaginaire collectif. Zoom sur les 15 meilleurs thrillers érotiques, entre tension torride et sueurs froides.
C’est un genre sulfureux qui a régné en maître sur Hollywood, notamment dans les années 90 : le thriller érotique. Un cocktail enivrant de suspense hitchcockien, de tension psychologique et de scènes d’une sensualité vénéneuse qui ont marqué toute une génération de cinéphiles. Plus qu’un simple prétexte à dénuder ses stars, le thriller érotique explore les zones grises de la morale, les jeux de pouvoir et la manipulation où le désir devient l’arme la plus redoutable.
Si le genre s’est fait plus discret ces dernières années, son influence reste palpable et quelques pépites récentes prouvent qu’il n’a rien perdu de sa capacité à nous faire frissonner. De la femme fatale iconique au mari un peu trop naïf, voici une sélection pour plonger dans les eaux troubles de ce genre fascinant avec une sélection de 15 films incontournables.
Basic Instinct (1992) – Le maître étalon
L’intrigue : Un inspecteur de police au passé trouble, Nick Curran (Michael Douglas), enquête sur le meurtre sauvage d’une rock-star. Ses soupçons se portent rapidement sur la principale suspecte, Catherine Tramel (Sahron Stone)l, une romancière aussi brillante que manipulatrice qui semble avoir décrit le crime dans son dernier livre.
Impossible de commencer cette liste sans évoquer le film qui a défini le genre pour la décennie : Basic Instinct. Paul Verhoeven signe un chef-d’œuvre de manipulation, porté par un Michael Douglas au sommet et une Sharon Stone devenue une icône planétaire dans ce rôle de femme ultra-fatale. Chaque dialogue est une joute, chaque regard un piège. Sans compter la fameuse scène d’interrogatoire, entrée depuis au panthéon du cinéma.
Liaison Fatale (1987) – Le cauchemar du yuppie
L’intrigue : Dan Gallagher (Michael Douglas), un avocat new-yorkais marié et père de famille, profite d’un week-end où sa femme est absente pour avoir une liaison torride avec une nouvelle collègue, Alex Forrest (Glenn Close). Pour lui, ce n’est qu’une aventure sans lendemain. Pour elle, c’est le début d’une obsession dévorante et terrifiante.
Avant Basic Instinct, Adrian Lyne avait déjà jeté un pavé dans la mare avec ce thriller terrifiant sur les conséquences d’une infidélité. Liaison Fatale a si bien capturé l’air du temps qu’il a provoqué d’innombrables débats et a hanté les nuits de plus d’un mari volage. Glenn Close y est absolument glaçante en amante éconduite.
Body Heat (La Fièvre au corps) (1981) – L’hommage au film noir
L’intrigue : Sous une vague de chaleur écrasante en Floride, Ned Racine (William Hurt), un avocat un peu minable, tombe sous le charme de la sublime Matty Walker (Kathleen Turner). Mariée à un homme riche et puissant, elle le persuade de l’aider à se débarrasser de son mari.
Lawrence Kasdan nous transporte dans la chaleur moite du sud des Etats-Unis pour l’un des plus grands neo-noirs jamais réalisés, qui réactualise les codes du genre pour l’après-Code Hays. Les dialogues fusent, la photographie de Richard H. Kline fait perler la sueur sur les fronts, et le duo formé par William Hurt et Kathleen Turner reste l’un des plus torrides jamais vus à l’écran.
Bound (1996) – Le coup de maître des soeurs Wachowski
L’intrigue : Violet (Jennifer Tilly), la maîtresse d’un mafieux violent, et Corky (Gina Gershon), une ex-taularde qui rénove l’appartement voisin, tombent amoureuses. Ensemble, elles élaborent un plan pour doubler le petit ami de Violet et s’enfuir avec deux millions de dollars appartenant à la pègre.
Juste avant de révolutionner le cinéma avec Matrix, les sœurs Wachowski signaient ce thriller lesbien virtuose. On sent déjà poindre leur maestria visuelle et leur sens du cadre, s’amusant avec les clichés du film de gangsters pour mieux les dynamiter. C’est un thriller d’une intelligence folle, un film de casse stylé et une romance lesbienne puissante. Le parfait tout en un.
Eyes Wide Shut (1999) – Le testament de Kubrick
L’intrigue : Après que sa femme Alice (Nicole Kidman) lui a avoué avoir eu des fantasmes avec un autre homme, le Dr Bill Harford (Tom Cruise), un médecin new-yorkais, s’embarque dans une odyssée nocturne. Son errance le mène à une mystérieuse société secrète organisant des orgies masquées.
Le dernier film du maître Stanley Kubrick est une plongée onirique et angoissante dans les fantasmes d’un couple, ici interprété par le duo Tom Cruise et Nicole Kidman, lui-même au bord du divorce. Eyes Wide Shut nous entraîne dans un labyrinthe mental où la frontière entre le fantasme et la réalité se dissout complètement. C’est une œuvre hypnotique, dérangeante et d’une richesse thématique inépuisable, qui continue de fasciner et de diviser plus de vingt ans après sa sortie.
Wild Things (Sexcrimes) (1998) – Le plaisir coupable ultime
L’intrigue : Dans une ville huppée de Floride, un conseiller d’orientation est accusé de viol par deux de ses étudiantes. L’affaire, menée par un inspecteur de police tenace, se révèle bien plus complexe qu’il n’y paraît, cachant un enchevêtrement de manipulations et de chantage.
Avec son casting de rêve (Matt Dillon, Neve Campbell, Denise Richards, Kevin Bacon, Bill Murray) et ses retournements de situation improbables, Wild Things est le plaisir coupable par excellence. Un véritable symbole du cinéma décomplexé des années 90. Le réalisateur John McNaughton signe un polar moite et retors, qui semble prendre un malin plaisir à multiplier les twists jusqu’à l’absurde.
Mademoiselle (The Handmaiden) (2016) – Le bijou coréen
L’intrigue : Dans la Corée des années 30, Sookee (Kim Tae-Ri), une jeune arnaqueuse, est engagée comme servante par la riche héritière japonaise Hideko (Kim Min-hee). Sa mission : aider un escroc à séduire Hideko pour voler sa fortune. Mais Sookee se prend d’affection pour sa maîtresse, et les plans sont bouleversés.
Le réalisateur coréen Park Chan-wook (Old Boy) livre un thriller érotique d’une beauté et d’une intelligence renversantes. Chaque plan est un tableau, chaque rebondissement est un délice de scénariste. Le film, découpé en trois parties qui changent les perspectives, est une leçon de narration et une célébration de la sororité face au patriarcat. Somptueux et profondément féministe.
Gone Girl (2014) – Le thriller conjugal 2.0
L’intrigue : Le jour de leur cinquième anniversaire de mariage, Amy Dunne (Rosamund Pike ) disparaît de sa maison. Son mari, Nick (Ben Affleck), devient rapidement le suspect numéro 1 aux yeux de la police et des médias. Mais derrière l’image du couple parfait se cache une réalité bien plus sombre.
David Fincher, le maître des thrillers psychologiques, s’attaque au couple moderne avec une noirceur jubilatoire. Adapté par l’autrice Gillian Flynn elle-même, le film est une satire acide du mariage et du cirque médiatique, portée par la réalisation clinique de Fincher et la performance glaçante de Rosamund Pike.
The Last Seduction (1994) – La femme fatale ultime
L’intrigue : Bridget Gregory, une femme aussi intelligente que sociopathe, persuade son mari de réaliser une vente de cocaïne, puis s’enfuit avec l’argent. Elle se réfugie dans une petite ville de province où elle séduit un homme naïf pour l’utiliser dans ses plans machiavéliques.
Linda Fiorentino incarne ici l’une des femmes fatales les plus impitoyables de l’histoire du cinéma, une anti-héroïne totale qui ne s’excuse de rien. Le film de John Dahl est un modèle de série B teigneuse et intelligente, dont les dialogues percutants et le cynisme sont un pur régal. Un film noir, drôle et méchant.
Sliver (1993) – Le vertige du voyeurisme
L’intrigue : Après la mort suspecte de l’ancienne locataire, la jeune éditrice Carly Norris (Sharon Stone) emménage dans un luxueux et étroit gratte-ciel new-yorkais. Elle y entame une liaison passionnée avec le propriétaire de l’immeuble, le séduisant Zeke Hawkins (William Baldwin), avant de découvrir que ce dernier a truffé chaque appartement de caméras et observe la vie de tous ses locataires. Alors que les morts mystérieuses se multiplient dans l’immeuble, Carly se demande si son amant n’est pas également un redoutable prédateur.
Porté par une Sharon Stone au sommet de sa gloire juste après le triomphe de Basic Instinct, Sliver est l’autre grand thriller érotique emblématique de l’actrice. Adapté d’un roman d’Ira Levin (Rosemary’s Baby) et réalisé par Phillip Noyce, le film explore les thèmes de la surveillance et du voyeurisme avec une esthétique high-tech très marquée années 90. Son atmosphère sulfureuse et paranoïaque synthétise à la perfection les fantasmes et les angoisses d’une époque pré-internet où la technologie commençait à s’immiscer dans nos vies les plus intimes.
Chloe (2009) – Le trio vénéneux
L’intrigue : Catherine, une gynécologue respectée, soupçonne son mari David d’être infidèle. Pour en avoir le cœur net, elle engage Chloe, une escort-girl, pour le séduire et lui faire un compte-rendu détaillé de leurs rencontres. Un jeu dangereux qui va bientôt la dépasser.
Atom Egoyan filme ce trio amoureux (Julianne Moore, Liam Neeson, Amanda Seyfried) avec une élégance glaciale et une tension qui monte crescendo. C’est un drame psychologique sophistiqué sur le désir, la jalousie et la manipulation, où les frontières entre les personnages deviennent de plus en plus floues.
Swimming Pool (2003) – Le trouble Ozon
L’intrigue : Sarah Morton (Charlotte Rampling), une autrice anglaise de polars à succès mais en panne d’inspiration, accepte l’offre de son éditeur et part se reposer dans sa villa du Luberon. Sa quiétude est vite troublée par l’arrivée de Julie (Ludivine Sagnier), la fille de l’éditeur, une jeune femme à la sensualité débridée.
François Ozon réunit Charlotte Rampling et Ludivine Sagnier pour un chassé-croisé sensuel et mystérieux où la frontière entre réalité et fantasme s’estompe. Le film joue avec les nerfs du spectateur et les codes du thriller, tout en étant une réflexion malicieuse sur le processus de création artistique. La chaleur écrasante du Sud et la tension entre les deux actrices rendent l’atmosphère délicieusement irrespirable.
Unfaithful (Infidèle) (2002) – L’engrenage de la passion
L’intrigue : Connie Sumner (Diane Lane) mène une vie paisible en banlieue avec son mari Edward (Richard Gere) et leur fils. Un jour de grand vent à New York, elle fait la rencontre d’un jeune et séduisant libraire français, Paul Martel (Olivier Martinez). Elle se lance alors dans une liaison passionnée qui aura des conséquences dévastatrices.
Adrian Lyne (encore lui) montre avec brio comment le désir peut tout faire basculer. Le film vaut surtout pour la performance incandescente de Diane Lane, qui a reçu une nomination à l’Oscar pour ce rôle. Elle y incarne avec une justesse incroyable la culpabilité, l’excitation et la peur d’une femme redécouvrant une passion qui la consume.
Dressed to Kill (Pulsions) (1980) – Le giallo de De Palma
L’intrigue : Kate Miller (Angie Dickinson), une femme au foyer sexuellement frustrée, est sauvagement assassinée après une après-midi passée avec un inconnu. Liz (Nancy Allen ), une call-girl de luxe qui a découvert le corps, devient la cible du tueur. Elle tente de résoudre le meurtre avec l’aide du fils de la victime.
Brian De Palma, grand admirateur d’Hitchcock, livre ici un thriller virtuose et fétichiste, à la lisière du giallo italien. Pulsions est célèbre pour ses longs plans-séquences d’une maîtrise folle, notamment une scène de poursuite silencieuse dans un musée qui est un pur chef-d’œuvre de mise en scène. Un film choc et profondément dérangeant.
Fair Play (2023) – Le renouveau sur Netflix
L’intrigue : Emily (Phoebe Dynevor) et Luke (Alden Ehrenreich) sont jeunes, beaux, amoureux et fiancés en secret. Ils travaillent aussi comme analystes dans le même fonds d’investissement ultra-compétitif. Lorsqu’une promotion inattendue crée un déséquilibre de pouvoir dans leur couple, leur relation passionnelle se transforme en un combat toxique.
Preuve que le genre n’est pas mort, ce film récent diffusé sur Netflix a fait sensation. Fair Play transpose brillamment les codes du thriller érotique dans le monde impitoyable de la finance post-#MeToo. La guerre des sexes et la lutte des classes se jouent dans des open-spaces et des appartements luxueux, avec une tension qui ne cesse de grimper.
