À la source de tous les genres de metal qui ont émergé depuis les années 1980, il y a un ancêtre commun : le heavy metal. Cette déclinaison plus extrême du hard rock, proposant distorsion, chant suraigu et rythme entraînant, a servi d’introduction à nombre de metalleux d’aujourd’hui. Retour sur dix pierres angulaires du genre.
Black Sabbath – Paranoid (1970)
Birmingham, début des années 1970. Après un premier disque, l’association maléfique entre Tony Iommi, à la guitare, et Ozzy Osbourne, au chant, grave le prototype de toute une musique à venir. Paranoid évoque encore un peu le hard rock de Led Zeppelin et de Cream, mais l’emmène ailleurs. Le blues tend à disparaître du son de Black Sabbath, remplacé par des riffs lourds et une imagerie volontairement provocatrice et théâtrale. Du heavy au doom, nombreux sont les courants du metal qui peuvent se revendiquer d’être les enfants du deuxième disque du quatuor britannique !
Saxon – Wheels of Steel (1980)
Pour trouver un groupe vraiment emblématique de ce qu’est le heavy metal, il faut se tourner vers le début des années 1980 et la naissance de tout un courant de titans britanniques (la NWOBHM ou New Wave of British Heavy Metal). Saxon en est particulièrement emblématique : dès Wheels of Steel, la formation a trouvé une formule qui mélange le côté tranchant d’un Motörhead et la puissance d’un AC/DC. Encore teinté de rock progressif, ce disque marque la transition avec les eighties, grand moment de l’histoire du heavy.
Iron Maiden – Iron Maiden (1980)
Autre titan de la NWOBHM, Iron Maiden lâche les chevaux dès son premier disque, Iron Maiden, enregistré avec le chanteur Paul Di’Anno (Bruce Dickinson arrivera plus tard). Complexe dans ses harmonies, virtuose dans ses parties instrumentales (que l’on écoute les guitares, la basse ou la batterie), la formation déroule 37 minutes et 42 secondes de heavy sanglant sur cette livraison qui, à l’instar de Black Sabbath, fait date dans l’Histoire. Rien ne sera plus jamais pareil pour le genre après cette démonstration de technicité et de fun souvent imitée, mais jamais égalée, sauf par Maiden lui-même au fil des disques !
Diamond Head – Lightning to The Nations (1980)
Inspiration majeure de Metallica, Diamond Head jouit peut-être d’une aura moindre qu’au début des années 1980. Copains de route d’AC/DC et d’Iron Maiden, la formation anglaise a développé une inflexion de voix et une manière d’accélérer le tempo que l’on retrouvera plus tard chez James Hetfield et consorts. Encore tendre, Lightning to The Nations déborde de tubes terriblement addictifs, dont It’s Electric et Am I Evil ?.
Judas Priest – Screaming for Vengeance (1982)
Du cuir, une voix suraiguë, des murs d’ampli Marshall et une manière d’aborder le metal à coup de mélodies imparables… Au début des années 1980, le rouleau compresseur Judas Priest déboule et emporte tout sur son passage. Alors vétérans du hard rock (ils se sont formés en 1969), Rob Halford et les siens adaptent le son de leurs débuts à la vélocité et à la puissance d’une époque qui a ringardisé définitivement le rock pratiqué dix ans avant, grâce à une efficacité à découvrir sur le très bon Screaming for Vengeance.
Accept – Restless and Wild (1982)
Si la Grande-Bretagne a été particulièrement représentée dans le heavy metal, le genre a bientôt gagné le continent, par le biais de groupes comme Accept. Cette joyeuse formation allemande emmenée à l’époque par l’inénarrable Udo Dirkschneider a réussi à cumuler heavy, speed et power metal dans une même forge, à l’exemple d’un disque majeur comme Restless and Wild.
Exciter – Heavy Metal Maniac (1983)
Si le premier album d’Exciter, Heavy Metal Maniac, porte le nom du genre que l’on s’attache à décrire aujourd’hui, il s’en éloigne quelque peu. Avec ce groupe, le style s’engage en effet dans le speed, et anticipe l’émergence de ce que l’on nommera plus tard le thrash. Une spécificité nord-américaine du heavy metal qui a fait florès dans la continuité d’Exciter, source de la transformation du genre.
ADX – Exécution (1985)
Satan Jokers, Vulcain, Killers, Blasphème… Le metal français a prospéré dans les années 1980, dans le sillage de Trust. L’une des formations qui a émergé à cette époque se nomme ADX. Sans avoir à rougir de la concurrence internationale, la bande de Phil Grelaud et de Dog Bouchard aura même réussi à localiser le style, à travers des paroles en français que l’on peut écouter distinctement sur un disque comme Exécution.
Manowar – Kings of Metal (1988)
Voilà un groupe précédé de sa réputation : durant ses fastes années, Manowar a proclamé faire plus de bruit qu’un avion à réaction. Cette vantardise trahit certes une certaine hybris, mais donne aussi le ton d’un groupe qui a fait du heavy metal un véhicule pour sa puissance et son lyrisme. Avec l’album Kings of Metal, il prouve que la violence et le fun ne sont pas incompatibles, tant cette succession de mélodies heavy, entrecoupées de passages plus calmes ou plus speed, incarne à merveille le paroxysme du genre.
Enforcer – Nostalgia (2023)
De nos jours, que ce soit avec des acteurs anciens comme Saxon ou Iron Maiden, ou avec des nouveaux venus plus royalistes que les rois, la flamme du heavy metal continue de briller. Enforcer, avec un disque récent, le bien nommé Nostalgia, souffle sur les braises incandescentes qui se consument depuis les eighties. De quoi montrer une certaine continuité dans le heavy et une volonté des plus jeunes de s’intégrer à une grande tradition.
Et pour aller plus loin…
Le catalogue de l’exposition Metal – Diabolicus in Musica est à recommander à tous les fans de metal. Des articles sur chaque aspect de cette musique complètent une riche iconographie. Le heavy metal en tant que tel est abordé par le menu dans quelques livres passionnants, dont les trois tomes d’Hard Rock & Heavy Metal de Thierry Aznar, ainsi que dans l’Anthologie du Hard Rock, qui malgré son titre met l’accent sur des groupes notables comme Iron Maiden.