
Le rap francophone ne se limite pas au rap français. On profite de la sortie du nouvel album d’Hamza, Sincèrement, pour se tourner du côté de la Belgique et explorer la scène rap de nos voisins. Et autant vous dire qu’ils ne manquent pas de talent… Lumière sur huit artistes, entre jeunes pousses à suivre et piliers du genre.
Hamza
Hamza est également un jeune rappeur belge, qui débute en solo en 2013 avec une mixtape. S’en suivront d’autres projets, dont un album studio en 2019 (Paradise), et plusieurs collaborations avec d’autres artistes (Aya Nakamura, et même Christine and the Queens !). En mai 2020, Hamza nous proposait un nouvel EP de trois titres, 140 BPM. — Netflix, Henny Pop et Nobu se veulent doucement agressifs, et s’ancrent dans le drill. Ce style musical, sous branche du hip-hop, mêle instru trap et paroles violentes, voire morbides.
En terme de contenu, cet EP s’axe autour de l’ego trip, thème récurrent dans le rap game. Un peu d’autotune, quelques punchlines bien senties, des kicks bien placés, et le tour est joué : 140 BPM fonctionne à merveille. Mais c’est en février dernier qu’Hamza nous dévoile son dernier album 140 BPM 2, comprenant de nombreuses collaborations explosives comme Kaaris, Zed ou encore Gazo. Cet opus est la suite de son EP sorti en mai de l’année dernière, une suite assez sombre et puissante en 13 titres. En 2022, Hamza s’est illustré en réalisant quelques featurings qui ont marqué les esprits, Maudit sur l’album V de Vald, Safari sur l’album Cullinan de Dadju ou encore Atasanté sur l’album Mélo de Tiakola.
Le rappeur belge est de retour avec un nouvel album intitulé Sincèrement. Il a officialisé l’annonce de son album à l’occasion de la sortie du clip du premier extrait de l’album, Introduction. On souligne l’esthétique soignée et majestueuse du clip. Ce long opus aux 17 titres s’annonce éclectique à l’image du Sauce God. Hamza s’exporte à l’international en invitant le rappeur américain Offset et la superstar nigériane Ckay. Une deuxième partie de Atasanté verra le jour avec le prince de la mélo. L’artiste a également fait appel à son compatriote Damso pour le morceau Nocif qui sera probablement un hit.
Lous and the Yakuza
Jeune artiste, rappeuse et mannequin belge Lous and the Yakuza se fait connaitre aux yeux du grand public grâce à son single en 2019, Dilemme. Après deux autres titres sortis la même année, Tout est gore en duo avec le rappeur Hamza et Solo, elle sort son tout premier album Gore à la fin 2020 ce qui la propulse sur la scène internationale. Tout comme la chanteuse de pop urbaine française Aya Nakamura, elle tire une partie de son nom de scène Yakuza de la culture japonaise. Son premier opus est quelque peu engagé, de par les thèmes abordés, comme le racisme ou la prostitution dans son morceau Courant d’air. Lous and the Yakuza est une rappeuse et talentueuse chanteuse à l’avenir prometteur.
Elle dévoile son second album en novembre 2022, Iota. L’artiste dévoile une œuvre avec de belles sonorités et des morceaux éclectiques. La chanteuse propose un projet lumineux qui évoque ce qui reste de l’amour quand la passion disparait… Produit par El Guincho, Iota est émouvant et réussi.
Glauque
Zoom sur un groupe belge innovant, à mi-chemin entre rap et electro, qu’on accueillait au Fnac Live Paris en 2019. Ils se nomment Glauque, tout comme leur premier EP, sorti en mai 2020.
Ce sont cinq Belges, qui nous proposent des textes travaillés et sans détours. Vives et abruptes, leurs paroles non dénuées de poésie se conjuguent aux rythmes puissants et profonds. A travers ces six titres, ils dépeignent une réalité souvent sombre. Angoisse et tristesse certes, mais aussi colère et frustration : l’énergie est bien là, et elle ne demande qu’à exploser. Pour autant, Glauque ne se place pas en entité surplombante et jugeante. Comme le précisait Louis Lepage, à qui on doit certains textes, le groupe n’a « pas envie d’être dans une position de lanceur d’alerte ou de moralisateur » : l’idée serait simplement de faire parler leur subjectivité.
Leur premier clip, VIVRE, respire le cynisme, mais met en lumière certains traits -pas toujours reluisants- de notre société. Le tout dans une ambiance rétro futuriste un poil angoissante.
Caballero et Jean Jass
Un peu plus de légèreté avec ce duo bien belge, qui appartient à la même génération que celle de Roméo Elvis : Caballero et JeanJass travaillent ensemble depuis plusieurs années maintenant, et le binôme semble plutôt bien fonctionner. Leur 4e album, High & Fines Herbes, une mixtape du même nom que leur émission, avait fait sensation.
High & Fines Herbes, c’est une sorte de parodie d’émission de téléréalité, dans laquelle les participants (tous des rappeurs) s’affrontent pour décrocher … le poumon d’or. Et ce nouvel album est la BO de cette émission qui ne manque pas de second degré. (Les trois premiers épisodes de la saison 3 sont d’ailleurs disponibles, allez découvrir cet ovni herbesque).
On retrouvera donc pléthores d’invités sur ces 24 titres : Mister V, Roméo Elvis, le Roi Heenok, Lomepal, Bigflo & Oli, Alkpote, Rim’K, et même Oxmo Puccino…
En avril dernier, le groupe a sorti un nouvel album Oso/Hat Trick en édition limitée, un double opus avec deux parties bien distinctes. Un projet innovant regroupant plus de 30 titres, un duo en solo, avec une première partie Oso par Caballero et la seconde Hat Trick par JeanJass. C’est un projet très dense avec des intrus et prods recherchées et originales, c’est une sorte de ying et de yang du duo belge. Bref une nouveauté sympa pour votre été à découvrir au plus vite.
Pour promouvoir le volume 2 de la mixtape High & Fines Herbes, Caballero & JeanJass présentent la saison 4 de leur série culte, plus de deux ans aprés la dernière saison. Cet opus fun et divertissant contient 14 titres avec de nombreux invités : Rim’k, Soso Maness, So La Lune, Jok’air, Sopico, Le Juiice…
Shay
Triste mais réel constat : les rappeurs continuent de squatter les tops et les scènes des festivals, au détriment parfois des rappeuses tout aussi talentueuses. Parce que le rap belge n’est pas exclusivement masculin, on a choisi de vous parler d’une seconde artiste belge Shay, qui a su se faire une place dans ce milieu où la parité est loin d’être la règle.
Shay a 27 ans, et elle débute dans la musique à 20 ans. Avant ça, elle découvrait le milieu de la drogue et autres trafics en tout genre. Désormais repentie, la nièce de Youssoupha (et oui ! Le rap, cette grande famille) officie dans le rap game, entourée par des beatmakers et lyricistes (dont fait partie Damso).
Déjà deux albums à son actif : Jolie Garce et Antidote. Shay aime provoquer, toujours avec une idée derrière la tête. Elle a d’ailleurs bien saisi les enjeux du milieu : « Peut-être que l’on ne m’acceptera jamais, mais je m’en fiche. Je suis persuadée que ce que je fais aidera les meufs qui veulent se lancer dans le rap ». Et Antidote est loin d’être dénué d’intelligence. Sur des sons qui tirent vers la pop, elle y aborde, entre autres, ses peines de cœur. Une jolie réussite pour une rappeuse prometteuse.
Boa Joo
Pour un troisième talent féminin, une rappeuse belge moins connue mais non moins douée : Boa Joo, une artiste bruxelloise, à la fois chanteuse et rappeuse. Elle aussi déçue par le monopole masculin qui plane sur le monde du rap, elle remporte en 2019 le tremplin Girls on Stage.
Pas encore d’albums à son actif, mais plusieurs singles, Viens, Shabondy, Qu’il en pleuve ou encore Leurs mamans, qui laissent entrevoir son talent. Un rap entier, des mélodies ultra rythmées aux sonorités futuristes, et des textes engagés : l’artiste reprend les codes du rap actuel en y ajoutant sa touche perso.
On guette avec impatience la sortie de son projet Sérénade, qui devrait voir le jour d’ici quelques mois.
Damso
Il est devenu un incontournable de la scène urbaine francophone depuis plusieurs années maintenant. Originaire de Bruxelles, Damso nous avait impressionnés avec son premier album Batterie Faible salué par la critique.
En 2017, il revient avec Ipséité qui devient disque de platine en à peine un mois, grâce à des hits comme Macarena et J Respecte R. Sa carrière bat son plein, et malgré quelques polémiques, trois prochains albums vont suivre et connnaitront toujours autant de succès. En 2018 on découvre Lithopédion puis en 2020 et 2021 QALF et QALF Infinity. Son dernier opus connait déjà un grand succès avec notamment un titre phare qui passe sur de nombreuses radios chaque jour : Σ. MOROSE.
Roméo Elvis
On termine par un artiste qui, en quelques années, s’est imposé comme une référence dans le rap belge. Qui ne connait pas Roméo Elvis ? A 27 ans, le frère d’Angèle a déjà deux albums studio (Chocolat), trois EP, et de nombreuses collaborations avec d’autres artistes clés de sa génération (Lomepal, Thérapie Taxi, Caballero et JeanJass…)
Si pour certains, la période de confinement n’a pas été des plus agréables, le rappeur a lui sauté sur l’occasion et s’est lancé tête baissée dans la création : en résulte un EP, intitulé à juste titre Maison. 5 titres au total, pour un style plus cru, moins pop que Chocolat. Un son, Défoncé, mis en images dans un clip minimaliste et coloré, dans lequel Roméo Elvis nous parle de ses moments de défonce, donc. Comme il le dit lui-même, « Maison est une sorte d’apéritif avant mon second album solo”.
Son dernier disque, Tout Peut Arriver est plus intime que ses précédents projets. Le rappeur livre un long travail d’introspection. Ses textes sont beaucoup plus matures et personnels.