Certains titres sont inclassables et malgré toute l’énergie dépensée dans l’élaboration de cette sélection de coups de coeur dessinés, nous n’avons pas réussi à les faire entrer dans les cases (humour de bédéiste). La narration est libre, les codes explosés, le talent immense. Comment la guerre nous transformerait aujourd’hui ? Existe-t-il une part de libre-arbitre ? Des sujets aussi libres que les albums qui les traitent.
Notes pour une histoire de guerre
Gipi (Futuropolis)
Trois adolescents dans un pays en guerre deviennent des petits truands par nécessité et par choix. Sous forme d’anecdotes, l’un d’entre eux nous raconte leur quotidien. Premier roman graphique de l’italien Gipi publié en France en 2005, Notes pour une histoire de guerre est une réflexion puissante sur les choix faits pendant des situations de conflit. Gipi se distingue également par un dessin très épuré, en bichromie, qui sert avec talent le récit.
Le grand récit, Tome 1 : Alpha… directions 
Jens Harder (L’An 2)
Premier tome d’une trilogie en cours sur l’histoire de l’humanité, Alpha… directions se concentre sur la création de l’univers et l’apparition de la vie sur Terre. En toute simplicité ! La démesure du projet de l’Allemand Jens Harder et les 350 pages de ce pavé graphique peuvent impressionner le lecteur, mais c’est sans compter sur le talent et l’intelligence de l’auteur. Dans des planches en bichromie, la précision scientifique du voyage à travers le temps s’accompagne de références à la mythologie et à l’art, le tout conté sur un ton humoristique et jubilatoire. (2 Tomes, série en cours).
Ar-Men, l’Enfer des enfers
Emmanuel Lepage (Futuropolis)
C’est l’histoire d’un phare situé près de l’île de Sein surnommé « L’Enfer des enfers ». C’est pourtant dans ce lieu hostile que Germain, l’un de ses gardiens, a préféré fuir le continent et ses souvenirs. Dans cette BD, Emmanuel Lepage mêle avec brio plusieurs récits, plusieurs époques, le réel, l’onirique et le mythologique. Les planches aquarellées du dessinateur subliment le scénario et font de cette BD un incontournable du genre.
Jimmy Corrigan 
Chris Ware (Delcourt)
Jimmy Corrigan est un homme mal dans sa peau, immature, socialement inadapté et sous l’emprise d’une mère possessive. Jimmy n’a jamais connu son géniteur, il lui a substitué la figure de Superman. Il reçoit un jour une lettre qui bouleverse sa vie : son père biologique demande à le rencontrer. Animé par la curiosité et la perspective de transformer le cours d’un destin peu enviable, Jimmy part à la rencontre de cet être longtemps fantasmé. Cette superbe analyse des relations père-fils permet à Chris Ware de déstructurer le format classique de la bande dessinée. Un album aussi beau qu’original.
Légendes de la Garde, Tome 1 : Automne 1152
David Petersen (Gallimard)
La garde de la Hache noire est chargée de protéger le peuple des souris. Parmi eux, les courageux Kenzie, Saxon et Lieam mettent à jour un sombre complot contre le royaume. Ils devront faire preuve d’un grand courage pour sauver la forteresse Lockhaven de sa chute. Petersen nous offre une série absolument splendide. Les illustrations, qui puisent leur originalité dans le passé de graveur de l’auteur, sont aussi riches et colorées que le sont les aventures de nos chevaliers à quatre pattes. Légendes, chants médiévaux, poèmes… Petersen cultive un tel sens du détail que l’on croirait presque à ce « petit monde d’en bas ». (3 Tomes, série en cours).
Little Tulip
Jérôme Charyn, François Boucq (Le Lombard)
New York, dans les années 1970. Paul, un tatoueur d’origine russe, aide la police à établir des portraits-robots. Une série de meurtres lui rappelle sa jeunesse dans un goulag où seuls sa rage et ses talents de dessinateur lui ont sauvé la vie. Little Tulip est l’histoire hallucinante d’un survivant. Boucq nous émerveille quels que soient les univers qu’il dépeint : du polar comme ici, à l’humour dans Jérome Moucherot, en passant par le western dans Bouncer. Charyn, grand écrivain américain, forme avec Boucq un duo remarquable. Un récit absolument essentiel.
Le Déclic, Intégrale
Mila Manara (Drugstore)
Véritable fer de lance de la bande dessinée érotique européenne, Manara signe avec Le Déclic l’une des œuvres les plus emblématiques du genre. Le pitch : Claudia, femme plutôt prude, subit une opération contre son gré. On lui implante une puce dans le cerveau qui permettra à son ravisseur d’influer sur sa libido et ses désirs grâce à une simple télécommande. C’est l’occasion pour l’auteur de lui faire vivre un ensemble de situations toutes plus torrides les unes que les autres. Et si ce n’était que ça ! Le maître italien, grand amoureux des femmes, sublime leur corps grâce à son dessin exceptionnel.
L’Aimant
Lucas Harari (Sarbacane)
Lucas Harari fait son entrée dans l’univers de la BD en 2017 avec L’Aimant, publié aux éditions Sarbacane. Ce premier coup d’essai est un succès. Le dessin minimaliste et le travail de la couleur subliment une intrigue glaciale. Dans ce thriller agrémenté de fantastique, nous faisons la connaissance de Pierre, un jeune étudiant parisien en architecture qui part en Suisse, au cœur des Alpes, pour visiter les thermes de Vals. Le bâtiment, conçu par le célèbre architecte Peter Zumthor, va exercer une étrange et forte attraction sur le jeune homme…. Quel secret se cache derrière les pierres ?
—
Aller + loin : Bédéthèque idéale : les 200 BD à lire dans sa vie
