Décryptage

« Mufasa » : pourquoi la franchise « Le roi lion » est-elle la plus importante pour Disney ?

16 décembre 2024
Par Samuel Leveque
"Mufasa" : pourquoi la franchise "Le roi lion" est-elle la plus importante pour Disney ?
©Disney Enterprises

Alors que sort au cinéma « Mufasa », le cinquième long-métrage dans l’univers du « Roi lion », retour sur une licence qui, en 30 ans, est devenue l’un des piliers de la stratégie de Disney.

À la fin des années 1980, Disney traverse une grosse crise d’identité après presque deux décennies d’échecs critiques et commerciaux au cinéma, au point que certains commencent à désigner la firme sous le nom ironique de « princesse endormie ». Une période de doutes qui trouvera toutefois sa solution à travers un retour aux adaptations de contes et de récits classiques.

C’est un carton : La petite sirène (1989), La belle et la bête (1991) puis Aladdin (1992) deviennent immédiatement cultes. En 1994, Le roi lion – improbable adaptation du Roi Lear de William Shakespeare empruntant également de nombreux éléments au classique du manga Le roi Leo – enfonce le clou en devenant le dessin animé le plus rentable de tous les temps. Trente ans plus tard, ce coup de poker est devenu une franchise à succès, qui s’apprête à accueillir Mufasa : le roi lion, cinquième film d’une licence qui compte par ailleurs des séries animées et une comédie musicale au succès mondial.

Une recette extrêmement efficace

Il faut dire que si les origines du projet sont assez nébuleuses et contestées et se sont étalées sur près d’une décennie, le résultat final a réuni une équipe en or : les réalisateurs Roger Allers et Rob Minkoff, le directeur artistique Andy Gaskill ou encore le trio Elton John, Tim Rice et Hans Zimmer à la musique. La production fait par ailleurs le pari de miser sur des acteurs de premier plan pour le doublage : Matthew Broderick (Simba), Rowan Atkinson (Zazu), James Earl Jones (Mufasa) ou encore Jeremy Irons (Scar). Le tout avec un budget, conséquent pour l’époque, de 45 millions de dollars. Le film en rapportera près d’un milliard au box-office mondial.

Il faut dire que le long-métrage n’a pas que son casting pour lui, mais aussi un scénario particulièrement réussi, arrivant à équilibrer drame et comédie, et maîtrisant parfaitement sa surprenante ellipse temporelle. Le tout avec un début plus axé sur la comédie et une seconde moitié, où le jeune Simba est devenu adulte, plus sombre et centrée sur la notion de vengeance et de justice. La métaphore autour de la montée du fascisme et de la nature de la légitimité du pouvoir, si elle n’est pas particulièrement originale, détonne alors dans le catalogue de Disney. Ses studios n’avaient en effet pas livré un spectacle aussi épique à l’écran depuis des années.

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Cette recette extrêmement efficace va donner un statut culte immédiat à l’histoire de Simba et à ses compagnons particulièrement iconiques (Timon et Pumba, un suricate malicieux et un phacochère pétomane particulièrement drôles). La bande-son du film est encore considérée, 30 ans plus tard, comme l’une des plus remarquables de l’histoire des studios Disney. Elle contient des tubes de portée mondiale comme Hakuna MatataL’histoire de la vie, ou Can You Feel the Love Tonight, ce dernier étant même resté un tube intemporel de l’histoire de la pop.

Des déclinaisons à foison

Plus encore que les précédents succès de Disney, Le roi lion est décliné de manière frénétique sous de multiples formats dans les années suivant le carton du film. Deux suites pour le marché de la vidéo sont mises en chantier, et les personnages de Timon et Pumba reçoivent leur propre dessin animé comique, diffusé entre 1995 et 1999. Disney met la série à l’honneur dans ses parcs d’attractions en créant deux parades thématiques et une attraction cinématographique futuriste exclusive à son complexe EPCOT, en Floride. Signe de la popularité inoxydable de la licence, un nouveau quartier de Disneyland Paris uniquement consacré à la licence devrait voir le jour en 2026.

Le produit dérivé le plus populaire et au succès le plus monumental sera néanmoins pendant longtemps la comédie musicale Le roi lion. Cette adaptation du premier film par Roger Allers, lancée à Broadway en 1997 et jouée des dizaines de milliers de fois sans aucune interruption (si ce n’est durant le confinement mondial de début 2020), aurait rapporté près de dix milliards de dollars à Disney (dépassant largement les revenus totaux des films Star Wars) et rassemblé au passage plus de 100 millions de spectateurs à travers le monde.

Un pilier dans la stratégie de Disney

Pas étonnant, au regard de toute cette série de succès, que Disney, dont nombre de franchises sont actuellement en crise et dont le business model se heurte à de nombreux problèmes, mise autant sur Le roi lion. Depuis 30 ans, chaque produit mettant en scène les aventures de Simba a combiné des dépenses relativement maîtrisées et des revenus conséquents, tout en conservant un énorme capital sympathie auprès d’un public intergénérationnel.

Pour la première fois depuis longtemps, Disney semble néanmoins vouloir capitaliser sur la popularité de la saga en y ajoutant quelque chose de véritablement nouveau, avec le film Mufasa : le roi lion, racontant l’histoire du père de Simba. Une fois de plus, le projet est prestigieux, avec une réalisation confiée à Barry Jenkins, le remarqué réalisateur de Moonlight, sur un scénario de Jeff Nathanson (SpeedRush HourMen in Black…).

À l’heure où Disney doit impérativement sécuriser des succès pour conserver son leadership sur le divertissement familial, le film pourrait, selon des spécialistes, effectuer un démarrage en trombe. Et si les scores du film de 2019 paraissent difficiles à reproduire, un succès même relatif de ce Mufasa ferait passer la licence dans le club très fermé des sagas ayant généré plus de 3 milliards de dollars au box-office mondial.

La suite des aventures de la famille royale la plus célèbre de la savane africaine n’est pas encore connue avec certitude, en dehors de l’arrivée du parc à thème parisien. Mais il y a fort à parier que Disney continuera de miser sur une licence devenue au fil du temps l’un des pans les plus solides de son catalogue.

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