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Goncourt des Lycéens 2018 : à la rencontre des lycéens

22 octobre 2018
Par Juliette1

À l’occasion du dispositif qui encadre le Goncourt des lycéens, le mardi 9 octobre était consacré à la première rencontre à
Paris entre les auteurs et leur jeune jury. Dans l’amphithéâtre de l’Université Pierre et Marie Curie, les auteurs se sont défendus face à une salve de questions, émanant des classes de l’assistance, qui détonnent par leur franchise et leur pertinence.

Frere-d-ameLes finalistes du Goncourt des Lycéens 2018

  • La vérité sort de la bouche du cheval, Meryem Alaoui (Gallimard)
  • La Vraie Vie, Adeline Dieudonné (L’Iconoclaste)
  • Le Malheur du bas, Inès Bayard (Albin Michel)
  • Ça raconte Sarah, Pauline Delabroy-Allard (Minuit)
  • Frère d’âme, David Diop (Seuil)
Le lauréat 2018 est David Diop pour son roman Frère d’âme (Seuil).

Un prix pas comme les autres

Le Goncourt des lycéens est un prix à part car ce sont, non pas des pontes de la littérature et de l’Académie Française, mais bien des lycéens qui élisent démocratiquement le lauréat. Créé en 1988 par la Fnac avec le ministère de l’Éducation nationale et sous la bienveillance de l’Académie Goncourt, il fait de plus de 2000 lycéens les membres d’un jury littéraire qui décerne un prix au roman de leur choix parmi la sélection du prix Goncourt. Conçu pour inciter les jeunes à la lecture, ce prix est complété par un dispositif de rencontres et de dédicaces avec les auteurs afin que les élèves se sentent impliqués et qu’ils puissent élire un lauréat en connaissance de cause. Qui succèdera à Gaël Faye (Petit Pays) et Alice Zeniter (L’Art de perdre) pour cette trentième édition du Goncourt des lycéens ? Le lauréat sera annoncé le 15 novembre. 

Une première rencontre 

Tous les auteurs de la sélection étaient présents lors de cette première rencontre (excepté Paul Greveillac). L’enjeu était de taille : faire bonne impression auprès de ce jury littéraire intransigeant mais impressionnable. Les lycéens ont pris place dans l’amphithéâtre et après avoir manifesté haut et fort leur appartenance à des établissements venus de tout le Nord de la France, ils ont visionné un petit film conçu comme un hommage aux éditions précédentes du prix. Puis Frédéric Launay, journaliste chargé de l’animation de la journée, a rapidement introduit les quatre premiers auteurs et les questions ont commencé à fuser. Les auteurs soumis aux questions – tantôt rudes, tantôt métaphysiques, parfois naïves – des lycéens ont dû rivaliser d’ingéniosité pour ne pas perdre la face et expliquer ce qui intrigue tant les jeunes lecteurs : un roman est-il vrai ?

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Clara Dupont-Monod et Adeline Dieudonné amusées par les questions des élèves

Le pourquoi du comment 

Tout au long de la journée, les auteurs ont répondu à de nombreuses questions dont la plupart portait sur la véracité de ce qui est écrit dans leur roman. Avec plus ou moins de facilité, ils ont expliqué aux lycéens que la réalité inspirait bien évidemment leurs écrits, mais que « la réalité s’inspire aussi [des romans] ». C’est à Tobie Nathan qu’on doit ce joli parallèle, qui aboutira à la fin de la journée par une phrase marquante de Nicolas Mathieu« le roman se sert du mensonge pour dire la vérité ». Il a ensuite renchéri sur le rôle du lecteur et de son imaginaire : « Le roman est un travail de co-écriture entre l’auteur et le lecteur qui projette son imaginaire dans les ellipses narratives ». Clara Dupont-Monod a également insisté sur l’importance de la liberté de l’écrivain face à la vérité historique qui peut devenir un frein à la créativité.

Le langage comme…

Les discussions à batons rompus ont donné lieu à de nombreuses définition de la littérature et du rôle que les mots ont à jouer dans nos vies. Pour David Diop, le langage est ce qui rattache le personnage à sa culture, à son identité, et ce qui lui permet de tenir dans les situations difficiles. Adeline Dieudonné et Clara Dupont-Monod ont uni leurs voix pour affimer qu’écrire c’est arracher du temps à la réalité pour construire un monde à soi. Cette dernière sourit en évoquant le chagrin de quitter le personnage d’Aliénor d’Aquitaine qui l’accompagne depuis 8 ans (avant La Révolte, Le Roi disait que j’étais diable traitait déjà de la vie d’Aliénor). Éric Fottorino a, quant à lui, eu recours à une jolie métaphore pour décrire son rapport au langage : « J’ai toujours utilisé les mots comme des petites lampes de poche pour éclairer un chemin qui zigzague. Les mots tracent une route dans l’obscurité. »

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Thomas B. Reverdy en dédicace

Qu’en pensent les lycéens ? 

Quelques questions posées aux élèves leur ont permis de se dévoiler sur leur rapport à la lecture.

Le Goncourt des lycéens c’est quoi ? 

« Pour moi le prix Goncourt, c’est magique. » (Ayten, 2nde – Lycée Gustave Eiffel, Gagny)

« Le Goncourt élargit mes centres d’intérêt pour les livres. » (Julie, 2nde – Lycée Joliot-Curie, Dammarie Les Lys)

« Ce matin, on a rencontré les auteurs et certains élèves leur ont posé des questions et ça s’est bien passé. Ils étaient réceptifs et certains ont même fait des blagues, donc tout le monde était à l’aise. Contrairement à ce qu’on pensait, les auteurs étaient très ouverts. » (Océane, 2nde – Lycée Gustave Eiffel, Gagny)

Si vous deviez écrire un livre, votre héros s’appellerait…

« Je pense que ça serait un nom original, voire bizarre pour que les gens accrochent. » (Maëva et Fatoumata, 2nde – Lycée Gustave Eiffel, Gagny)

« Moi je lui donnerais mon prénom : Sirine. Ça serait une fille indépendante qui sauverait le monde. » (Sirine, 2nde – Lycée Jacques Fayder, Epinay-sur-Seine)

Ça fait quoi d’être juré littéraire ?

« Ça redonne de l’importance à la lecture. On a tendance à penser que les jeunes ne sont plus intéressés par la lecture alors que pas du tout : il y a encore plein de personnes qui lisent beaucoup. Ça rappelle que ce n’est pas un sujet délaissé. Pour une fois qu’on demande leur avis aux lycéens, et qu’on ne dit pas « les lycéens aiment ça » sans vraiment savoir, ou d’après les sondages… là c’est vraiment les lycéens qui décident et je trouve que c’est bien. » (Manon, 2nde – Lycée Léonard de Vinci, Amboise)

« Ça fait du bien car nos avis comptent. On sait que quand on lit le livre, notre avis à la fin, il va servir à quelque chose. » (Océane, 2nde – Lycée Gustave Eiffel, Gagny)

« On est encore jeune donc on n’a pas beaucoup d’importance mais ça nous fait participer au monde de la lecture. » (Maëva et Fatoumata, 2nde – Lycée Gustave Eiffel, Gagny)

Si tu devais écrire un livre tu l’écrirais sur…

« Pourquoi pas sur la pauvreté ? La pauvreté d’une personne qui évolue. Ou alors sur un migrant qui devient connu. » (Ayten, 2nde – Lycée Gustave Eiffel, Gagny)

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