Un des plus gros succès manga de tous les temps, la série Naruto créée par Masashi Kishimoto se rapproche de sa conclusion inévitable. Un état des lieux vivifiant rappelle à quel point ce shônen a évolué, dans chacun de ses aspects : narration, enjeux et graphisme. Il est l’heure d’accompagner les héros bien-aimés jusqu’au bout de leur mission.
Bientôt la fin !
La quatrième Grande Guerre Ninja bat son plein et se dirige à grands pas vers son dénouement ultime. Confrontés à Kaguya, possédée par ses enfants et dotée de pouvoirs quasi-divins, Sasuke et Naruto peuvent compter sur les nouveaux pouvoirs que leur a conférés l’ermite Rikudo. Le combat est inégal et imprévisible mais Sasuke et Naruto redoublent de ruse et d’abnégation pour tenter de défaire leur ennemi. Leurs efforts ne sauront être récompensés sans l’aide de leurs amis, en particulier celle d’Obito Uchiwa, prêt à tous les sacrifices…
L’union fait la force
Cet avant-dernier volume des aventures du petit ninja (devenu grand et plus puissant que jamais) annonce un dénouement dantesque et permet au génial Masashi Kishimoto de se concentrer sur ce qui fait la force incroyable de son récit d’aventures. Comme dans les grands classiques du genre shônen, ce n’est pas tant le héros principal qui constitue l’attrait de ce type de manga mais bien toute une galerie foisonnante de personnages hauts en couleurs, compagnons ou ennemis du héros.
Même si Naruto tient dans cette conclusion un rôle évidemment déterminant, l’accent est mis, ici plus que jamais, sur la collaboration entre les personnages pour résoudre les conflits. Et dans le monde de Naruto, la coopération n’est pas un vain mot. Elle est le maître d’œuvre d’un catalogue impressionnant de pouvoirs dont les combinaisons, qu’on ne compte plus, représentent autant de stratégies qui témoignent de la créativité sans bornes de l’auteur.
Une souplesse narrative
Comme souvent dans la saga, ces derniers volumes présentent des enjeux stressants pour le lecteur (les personnages sont piégés, face à un adversaire surpuissant), qui s’articulent comme un interminable combat, savamment découpé.
L’art de Kishimoto consiste en effet à faire durer le plaisir de ses fans sans jamais les ennuyer. Un personnage rate une approche de combat ? Alors que d’autres mangas jouent la carte de la surenchère et de la répétition, la narration dans Naruto réussit toujours à modifier les paradigmes du combat en cours. Les pouvoirs de la terrifiante Kaguya, capable d’altérer l’espace et le temps, sont ainsi un ressort génial pour transporter les héros d’un décor à un autre, influant à chaque fois sur les stratégies à adopter.
Un sommet de l’esthétique Naruto
Cette lutte suprême est l’occasion pour Masashi Kishimoto d’assumer plus que jamais l’évolution d’un style graphique qui a parfois été décrié. À ses débuts en 1999, l’auteur cultivait un style précis, parfaitement maîtrisé, et par bien des aspects avare en décors. En quinze ans (la parution de Naruto s’est achevé en 2014 au Japon), le trait est devenu plus fin, plus fouillé, mais également parfois plus approximatif. Un « défaut » largement compensé par une caractéristique propre à Naruto et qui n’a cessé de croître : l’énergie.
Cette énergie graphique se manifeste également dans les efforts déployés sur les environnements. Conscient de la nécessité de donner corps à un univers en tous points unique, en particulier dans le monde hostile créé par Kaguya, Masashi Kishimoto a déjà compris depuis quelques années qu’il avait tout à gagner à placer ses personnages dans un cadre graphiquement opulent.
De même, ces derniers volumes de Naruto regorgent d’effets inédits, toujours pertinents. Les aplats de noir, images en négatif, effets de duplication ou profusion de speed lines (effets de vitesse) ne rendent jamais les cases confuses. Au contraire, cette richesse désormais totalement débridée et appliquée à chaque aspect de la création visuelle a permis d’asseoir Naruto dans le panthéon des shônen mangas réputés pour leur dessin, aux côtés d’un One Piece ou même d’un Slam Dunk.
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Parution le 8 juillet 2016
Dessins en noir et blanc
Naruto : Tome 71, Masashi Kishimoto (Kana) sur Fnac.com
Illustrations © Kana et Masashi Kishimoto