Un univers ravagé par la guerre, la maladie ou toutes sortes de catastrophes… Voilà qui est propice à stimuler l’imaginaire des créateurs de tout poil. Plongez avec nous dans ces mondes multiples.
Des jeux vidéos…
Depuis plusieurs décennies désormais, les jeux post-apocalyptiques sont très appréciés des joueurs, quelle que soit leur formule. Pourtant, depuis la diffusion de la série Fallout sur Prime Video en avril dernier, ce genre semble profiter d’un intérêt encore grandissant de la part des joueurs du monde entier à la recherche d’environnements toujours plus hostiles.
Ainsi, si certains proposent des expériences très linéaires et mettent avant tout l’accent sur les combats, d’autres se tournent plutôt vers d’immenses mondes ouverts à parcourir, ou des épopées éreintantes où le travail sur la narration et les personnages prédominent. De cette manière, chacun peut y trouver son compte… Et nous espérons qu’il en sera de même avec cette sélection des 10 jeux post-apocalyptiques auxquels vous devez absolument jouer !
Metro Exodus
Suite largement plébiscitée de Metro 2033 et Metro: Last Light, Metro Exodus prend place en l’an 2036, période à laquelle quelques milliers de survivants s’accrochent encore à la vie dans les tunnels du métro moscovite. Le joueur est aux commandes d’Artyom, qui tente alors de s’échapper des souterrains pour mener un groupe de rangers dans un long périple à travers une Russie ravagée. On explore ainsi des paysages bien plus variés et ouverts que dans les précédents titres, et on prend goût au voyage en étant confortablement installé dans l’Aurora, le train qui va nous permettre de traverser le plus grand pays du monde.
Côté gameplay, on note quelques évolutions liées à la structure plus ouverte du jeu, avec toujours la nécessité d’économiser les balles et de se confectionner son propre équipement, mais également des affrontements encore plus brutaux et viscéraux contre toutes sortes de menaces. Et que dire de la narration ? Metro Exodus profite de l’énorme travail des développeurs dans cette catégorie pour proposer une aventure aux nombreux passages marquants, à l’image du tout dernier chapitre !
Stray
Changement brutal d’atmosphère ! Dans Stray, un jeu d’aventure dans lequel on incarne un chat tout mignon, on se retrouve rapidement seul et séparé de nos proches dans un monde tombé dans l’oubli et peuplé de mystérieux robots. Les décors font d’ailleurs partie des gros points forts du jeu, oscillant entre souterrains habités par des essaims d’insectes, zones éclairées par des néons ou ruelles bien glauques.
On va alors tenter de retrouver notre famille en résolvant d’anciens mystères liés à la disparition de la race humaine. Il sera indispensable de résoudre diverses énigmes pour progresser et même de se lier d’amitié avec un drone volant pour pouvoir communiquer avec les automates et enfin s’échapper. On note aussi le gameplay parfaitement adapté au héros qu’on incarne : on se sent très agile, furtif et adorable à la fois… Une aventure longue de cinq à six heures, mais qui vaut véritablement le coup d’être vécue.
Mad Max
On le sait, ce jeu n’a pas connu le succès commercial espéré par Warner Bros. Games… qui avait décidé de le commercialiser le même jour que Metal Gear Solid 5: The Phantom Pain ! Pourtant, malgré cet échec, Mad Max constitue une plongée particulièrement convaincante dans cet univers principalement mis en avant dans le film Mad Max: Fury Road, sorti en 2015.
On est aux commandes d’un guerrier solitaire qui tente de tracer sa route au beau milieu d’un désert sauvage, où les voitures sont la clé de la survie. On va donc pouvoir explorer le gigantesque monde ouvert qui nous est offert, se livrer à des duels mortels dans des véhicules rafistolés et affronter des hordes d’ennemis dans des combats qui reprennent le système désormais culte des Batman Arkham : un pur bonheur ! L’emphase est aussi mise sur le héros, ses désirs de nouvelle vie et tout l’aspect psychologique du personnage. Vraiment dommage que des millions de joueurs soient passés à côté d’un tel titre…
Horizon : Zero Dawn
Parmi les exclusivités PlayStation les plus marquantes de cette dernière décennie, on retrouve naturellement Horizon Zero Dawn, la nouvelle licence post-Killzone de Guerrilla Games. Ici, on contrôle Aloy, une jeune héroïne qui prend part à une quête légendaire dans un monde dominé par de colossales machines de métal aux allures d’animaux. Rejetée par sa tribu, elle se bat alors pour en apprendre plus sur son passé, stopper une catastrophe qui pourrait bien détruire le monde et survivre face à toutes ces menaces robotiques. Le gameplay s’appréhende très facilement et laisse beaucoup de liberté aux joueurs, avec tout un tas d’armes différentes, divers équipements secondaires et même la possibilité de pirater certaines machines pour progresser, chasser, se déplacer et même combattre.
Nous vous invitons à découvrir aussi Horizon Forbidden West, une aventure encore plus massive au beau milieu des ruines de San Francisco et de l’Ouest américain. De nouvelles possibilités de combats, de nouveaux personnages, de nouvelles créatures, des environnements absolument sublimes… Une suite presque parfaite !
The Walking Dead
Si The Walking Dead prend la forme d’un point & click, à l’image de la plupart des productions du studio Telltale Games d’ailleurs, il n’en reste pas moins un jeu particulièrement marquant et puissant pour tous ceux qui l’ont parcouru. Nous voilà donc plongés dans l’univers de la bande dessinée créée par Robert Kirkman, dans la peau de Lee Everett, un criminel qui se voit offrir une seconde chance dans la vie… dans un monde où les morts-vivants pullulent ! Bien décidé à survivre, notre héros doit ainsi faire face à divers événements malencontreux et protéger une fillette orpheline prénommée Clementine.
On va faire la connaissance de tout un tas de personnages tous plus attachants et criants de vérité les uns que les autres, tout en sachant que cette aventure nous pousse à faire face aux conséquences profondes et durables des décisions qu’on ose prendre. Une progression et un scénario qui laissent place à des séquences vibrantes et emplies d’émotions… Ne passez surtout pas à côté de ce titre, qui se trouve fréquemment à tout petit prix.
Fallout: New Vegas
Bienvenue dans le nouveau Vegas, celui que vous espériez ne jamais explorer ! C’est ici que Fallout: New Vegas, sans doute l’épisode le plus apprécié de la saga, nous transporte pour une aventure harassante où les factions s’entretuent pour le contrôle des rares oasis. Pourtant, cela va aussi être l’occasion pour le personnage qu’on incarne de faire la rencontre de personnages plus ou moins attachants, et avec lesquels il faudra forger des alliances si on veut pouvoir devenir le maître des lieux.
Le gameplay et la progression bénéficient aussi de quelques nouveautés majeures dans cet épisode. On pense notamment à la Roue du compagnon, très utile pour nous aider à diriger convenablement nos congénères, ou bien au système de réputation directement lié à nos choix et actions. Bien évidemment, de nombreuses nouvelles armes sont aussi de la partie, avec encore plus de possibilités et de moyens de venir à bout de la menace. Vous avez déjà terminé Fallout: New Vegas ? Alors, nous vous conseillons vivement de vous tourner vers Fallout 4 !
Dying Light
Développé par les pères de la licence Dead Island, ce titre prend la forme d’un jeu d’action-survie dans un vaste monde ouvert grouillant d’infectés mangeurs de chair… Sympa ! Au beau milieu d’une ville dévastée par un mystérieux virus, on part rapidement à la recherche de ravitaillement, de ressources pour fabriquer des armes et d’équipements pour survivre aux offensives des zombies.
Pour se différencier des autres jeux du genre, Dying Light mise ainsi sur un terrain de jeu au level design particulièrement abouti et adapté à la pratique du parkour, un point central du gameplay. Les déplacements sont très fluides et grisants à prendre en main, tandis que les combats gagnent aussi en dynamisme, et que le cycle jour/nuit marque un vrai changement dans le comportement des ennemis. Notez d’ailleurs que le jeu peut se faire en solo ou en coopération jusqu’à quatre joueurs !
Death Stranding
Après Metal Gear Solid, on retrouve Hideo Kojima aux commandes d’une toute nouvelle licence, qui s’apprête d’ailleurs à accueillir un second épisode en 2025. L’épisode original, un titre au concept très nébuleux avant sa sortie, prend place dans le futur, alors qu’un événement mystérieux connu sous le nom de « Death Stranding » a ouvert une porte entre les morts et les vivants.
Dans la peau de Sam Porter Bridges, on a alors pour mission de redonner de l’espoir à l’humanité en reconnectant tous les survivants d’une société profondément dévastée. Parfois décrit comme un simple walking-simulator, ce jeu est bien plus que ça : il profite d’ailleurs d’un scénario particulièrement bien ficelé, avec une mise en scène assez hallucinante, portée par un casting d’acteurs 5 étoiles et de somptueux visuels. Jouez à Death Stranding, il ne vous laissera pas indifférent !
The Division
Si le Black Friday est généralement synonyme de belles promotions sur divers produits, il est surtout marqué par la propagation d’une pandémie dévastatrice dans The Division. New York se transforme alors rapidement en zone de chaos où les survivants se battent pour le peu d’eau et de nourriture disponible. Aux commandes d’un soldat de La Division, une unité d’agents tactiques autonomes et entraînés à faire face aux pires situations, il est donc de notre ressort de remettre de l’ordre dans cette ville !
Le jeu prend ainsi la forme d’un shooter saupoudré d’une composante RPG, pour une aventure qui mêle combats, stratégies et jeu en ligne, puisque vous pouvez parcourir l’histoire en solo ou en coopération jusqu’à quatre joueurs. Point important à souligner : The Division a accueilli de nombreuses nouvelles mises à jour importantes depuis son lancement, avec énormément d’équipements supplémentaires, de nouvelles missions et surtout un end-game conséquent, pour des heures et des heures de jeu !
The Last of Us Part I
Comment pourrions-nous évoquer les meilleurs jeux post-apocalyptiques sans parler de The Last of Us Part I ? Impossible ! Version modernisée du chef-d’œuvre de Naughty Dog paru en 2013, ce titre nous transporte dans un monde dévasté où rôdent infectés et survivants avides de sang. On incarne Joel, un homme profondément marqué par la vie qui se voit confier la mission de faire sortir la jeune Ellie d’une zone de quarantaine militaire.
Dès lors, une aventure puissante démarre et traduit l’évolution de la relation entre les deux personnages, jusqu’à un final mémorable. Sur le chemin, de nombreuses séquences fortes s’offrent à nous, avec des combats intenses face à des créatures sordides, de l’émotion et surtout une narration maîtrisée sur le bout des doigts. Tout comme pour la franchise Horizon, nous vous invitons à découvrir The Last of Us Part II pour vivre pleinement tout ce que cette saga a à offrir.
… des comics…
Les jeux vidéos ne sont pas les seuls a bénéficier du rayonnement de la série Fallout ou de la sortie au cinéma du dernier opus de la saga Mad Max. La science-fiction post-apocalyptique offre un sacré terrain de jeu aux auteurs. Pandémie, guerre nucléaire, crise politique, le genre permet d’imaginer des mondes très durs à vivre après une catastrophe. Scénaristes et artistes s’en donnent alors à cœur joie pour développer ces nouvelles réalités et un propos social impactant. Dans l’industrie de la bande dessinée américaine, ce genre a souvent été exploité. Voici cinq comics à lire pour les fans du genre post-apocalyptique.
Sweet Tooth
Gus est un jeune garçon innocent aux cornes de cerf. À cause d’une étrange pandémie qui a été fatale pour une partie de l’humanité dix ans plus tôt, le monde a changé et une nouvelle espèce mi-humaine, mi-animale est apparue. Gus se retrouve seul à parcourir les États-Unis et rencontre un colosse mystérieux qui l’aidera à affronter les nombreux obstacles sur leur chemin.
Avec cette œuvre, Jeff Lemire a montré qu’il était l’un des meilleurs conteurs de la BD américaine. L’auteur mêle des thématiques sérieuses à l’aspect survie à un regard enfantin qui rend le récit attachant. Les décors de Lemire sont sublimes et son trait brut offre une autre dimension au comics.
Urban Comics a édité la série en trois intégrales, suivie d’un quatrième tome qui propose une nouvelle plongée dans cet univers 300 ans plus tard. Le titre a aussi attiré l’attention de Netflix qui a récemment mis en ligne la troisième saison de son adaptation TV.
Extremity
Dans un univers mêlant fantasy et décor post-apocalyptique, le lecteur rencontre Thea, jeune femme à l’âme d’artiste. Mais ce dont elle rêve, c’est d’avoir sa vengeance contre le clan qui a tué sa famille. Cependant, la guerre et ses conséquences risquent d’être terribles pour elle et ceux qui l’entourent.
Cette œuvre a révélé le talent de Daniel Warren Johnson, auteur complet à la patte graphique très identifiable. Il écrit des personnages très attachants et s’interroge sur la thématique de la vengeance. L’artiste offre surtout un univers très consistant avec des dessins fourmillant de détails et de la violence savamment illustrée.
Le comics est disponible en un tome chez Delcourt. Pour ceux qui aimeront le style de Warren Johnson, l’auteur est derrière de nombreux récits de grande qualité comme Murder Falcon, aux influences métal, Wonder Woman: Dead Earth, autre récit post-apo avec la célèbre héroïne, ou encore les célèbres Transformers avec la dernière série en date chez Urban Comics.
Geiger
Dans un monde ravagé par un événement nucléaire, règne à la surface la loi du plus fort. Ceux qui n’ont pas réussi a trouvé refuge au moment de la catastrophe il y a des années doivent lutter pour survivre. Un certain bunker est d’ailleurs protégé par un mystérieux héros phosphorescent, qui semble très attaché à certaines personnes y résidant.
Avec Geiger, Geoff Johns, auteur de renom de l’écurie DC Comics, crée ici un tout nouvel univers. Si le cadre manque un peu d’originalité, l’auteur réussit son introduction d’un nouvel univers étendu qui sera développée par la suite. La présence de Gary Frank au dessin garantit des pages maîtrisées et prenantes.
Avec ce tome, Johns lance sa propre gamme de comics qui évoluent dans une même continuité. Pour le moment, Urban Comics n’a publié qu’un seul volume. Mais l’auteur s’est entouré de grands talents de l’industrie pour développer son univers à travers d’autres séries aux États-Unis, comme Junkyard Joe, Redcoat ou Rook: Exodus. À voir quelle stratégie adoptera l’éditeur français.
DMZ
DMZ nous plonge dans une Amérique marquée par une nouvelle guerre de Sécession. Matty Roth, jeune photographe, s’aventure dans un New York devenu zone démilitarisée avec une équipe de journalistes. Quand tous ses accompagnants sont abattus, le jeune homme se retrouve à parcourir seul ce qui était autrefois la fameuse métropole.
Brian Wood livre ici un récit haletant, en poussant son personnage toujours un peu plus loin. Suivre le parcours de ce reporter n’est pas de tout repos et, même si l’œuvre a presque 20 ans, son contexte politique est d’autant plus d’actualité aujourd’hui. Un mot également pour les planches très efficaces de l’artiste Riccardo Burchielli.
Le comics est disponible en cinq intégrales chez Urban Comics et a également eu droit à une adaptation, sans grand succès, sur Prime Video. Les aficionados du 7e art verront sûrement quelques similarités avec le film Civil War d’Alex Garland sorti en avril dernier, mettant en scène une équipe de journalistes qui parcourt une Amérique déchirée par une guerre civile.
Low
Dans un futur très lointain, l’humanité a été obligée de se réfugier dans des cités sous-marines pour survivre à un soleil mourant. Alors que l’espoir se fait rare, Stel Caine, une scientifique chevronnée, veut sauver l’humanité et s’efforce d’envoyer des sondes dans l’espace pour trouver de nouveaux mondes habitables, mais le résultat n’est pas celui qu’elle espérait.
Avec Low, Rick Remender propose un récit empli d’optimisme, en comparaison avec ses travaux précédents. L’auteur majeur de la scène indépendante américaine livre un message d’espoir intrigant, parfaitement épaulé par Greg Tocchini. Les planches de l’artiste constituent un argument majeur de la lecture, tant il arrive à sublimer l’histoire.
La série est publiée en 5 tomes par Urban Comics. Au-delà de ce comics, l’œuvre très diversifiée de Rick Remender est vivement conseillée, entre thriller (Une soif légitime de vengeance), SF (Black Science) ou fantasy (Seven to Eternity).
… et des romans
La littérature n’est pas en reste. Plongée en cinq pépites littéraires dans le genre le plus en vogue de la pop culture actuelle… et un pas de côté avec un roman graphique.
La Route, de Cormac McCarthy, par Manu Larcenet
La rencontre entre deux géants ne pouvait déboucher que sur un incroyable morceau de bravoure. Près de dix ans après l’adaptation en BD d’un autre grand roman, Le Rapport de Brodeck, de Philippe Claudel, Manu Larcenet, l’un des plus brillants coups de crayon du 9e art français, se frotte au classique indétrônable du genre postapocalyptique : La Route de Cormac McCarthy.
Un père et son fils déambulent dans les immensités sauvages, désertiques, dévastées, à la recherche d’un refuge, d’un espoir ou alors d’une mort rapide, comme une échappatoire. Porté par le coup de crayon lourd et sombre de Manu Larcenet, croquant à merveille un monde réduit en poussière et en cendres, on embarque pour un voyage dystopique terrifiant, dominé par les hordes de pillards et les fanatiques religieux adeptes du cannibalisme.
La Route confronte le regard d’un adulte brisé qui a vu la civilisation s’effondrer et celui d’un enfant né dans le chaos, mais qui continue, malgré tout, à espérer. Et cette question qui plane sans cesse sur un album de haute volée l’humanité mérite-t-elle vraiment d’être sauvée ? Manu Larcenet a une réponse très personnelle à vous donner.
Ravage de Barjavel
2052. Le monde entier a cédé à la technologie qui a envahi les moindres recoins d’humanité qui persistaient dans certaines strates de la société. Les citoyens sont devenus entièrement dépendants de la robotique. Chaque individu est assisté par une machine qui répond à ses besoins et le soulage de tout effort. Grâce à la sainte technologie, la vie est placée sous le signe de la facilité et de l’assistanat.
Mais un jour, c’est l’effondrement : panne totale d’électricité, la Terre est plongée dans le noir. En un claquement de doigts, le monde bascule dans l’horreur, les hommes s’entretuent et cèdent à la barbarie, Paris est ravagé par les flammes, le choléra s’attaque aux survivants. Au milieu du chaos, François, étudiant agronome, décide de former un groupe prônant un retour à la terre comme seul moyen de donner une seconde chance à l’humanité. C’est le début d’un combat pour la survie de l’espèce, une belle utopie qui sombre progressivement dans un nouveau cauchemar.
Chef-d’œuvre pionnier de la SF française, paru en 1943, monument visionnaire qui dissèque avec une actualité terrifiante notre rapport addictif à la technologie et le risque d’un effondrement, Ravage est ce que la dystopie littéraire fait de meilleur. Seule ombre au tableau, la lente dérive droitière de son auteur pendant l’Occupation, qui fera dire à ses détracteurs que son roman est un manifeste vichyste.
Swan Song de Robert McCammon
Écrit en pleine présidence Reagan, alors que la guerre froide repart de plus belle, Swan Song (1987) est rempli des peurs que fait jaillir le possible affrontement entre les États-Unis et l’URSS. Dans ce diptyque, couronné du prestigieux prix Bram Stoker, récompensant les meilleures œuvres de genre, Robert R. McCammon imagine un monde plongé dans le chaos après une escalade des tensions qui a fait éclater une effroyable guerre nucléaire. Missiles et fusées se croisent dans le ciel et font s’abattre sur la Terre des tornades de feu.
Tandis que le monde disparaît sous leurs yeux ébahis, les derniers survivants se débattent et s’accrochent à la vie. Sister Creep, jeune SDF new-yorkaise, s’en remet à ses visions mystiques. Le jeune Roland, lui, pense avoir trouvé sa voie auprès d’une secte survivaliste de l’Idaho, dirigée par un ancien héros de guerre qui confond patriotisme et totalitarisme. Le géant Black Frankenstein, ancien boxeur, traîne son immense carcasse à la recherche du dernier combat de sa vie. Et puis il y a Swan, une gamine trimbalée partout et détenant un étrange pouvoir qui est peut-être la clé de la survie de l’humanité.
Roman choral effréné, Swan Song se dévore sans compter. Une pulp fiction savoureuse où le diable s’amuse du malheur des humains. Un nouveau coup de maître pour Monsieur Toussaint Louverture, merveilleux éditeur de genre à qui l’on doit la saga Blackwater ou, plus récemment, le roman Katie de Michael McDowell.
Qui après nous vivrez d’Hervé le Corre
« Le confinement, les rues vides, les camions frigorifiques à New York pour conserver les corps, l’effroi des premières semaines m’ont causé un choc. » Voilà comment Hervé Le Corre racontait au journal Le Monde son Covid, véritable point de départ de l’écriture de Qui après nous vivrez, première incursion dans l’anticipation et le post-apo pour cette figure incomparable du roman noir français.
Le noir est bien présent, d’ailleurs, dans cette dystopie sombre, violente, anxiogène qui pointe du doigt la responsabilité des années 2020 dans le chaos qui vient. Le récit s’étale sur trois générations comme une gradation de la désolation qui s’empare du monde. On suit à travers le temps plusieurs groupes de survivants qui semblent étroitement liés entre eux.
Descente aux enfers aux allures de western sanglant, portée par la langue merveilleuse, reconnaissable entre mille, d’Hervé Le Corre, le roman porte en lui une lueur qui réchauffe le cœur : les enfants. Innocents, biberonnés à l’espoir, bien plus valeureux que les adultes, ils incarnent la possibilité d’un avenir qui aurait échappé au pire.
Station Eleven, Emily St. John Mandel
Emily St. John Mandel fait figure d’ovni parmi les nombreux auteurs traitant de la fin du monde. Conte poétique où le lyrisme dispute au noir, Station Eleven prouve que le genre post-apocalyptique n’est pas qu’un show sanglant à grand spectacle. C’est aussi un miroir tendu vers nos sociétés et sur ce qui fonde l’humanité.
Du jour au lendemain, le monde est frappé par un virus foudroyant et 99 % de la population de la planète succombe. Plus d’électricité, plus d’avions, de portables, de médicaments, de gouvernement. L’anarchie règne. Les survivants s’adaptent. Kirsten n’était qu’une enfant au moment où la pandémie s’est déclarée, mais elle a vu la mort de près. Alors jeune comédienne prometteuse du Théâtre de Toronto, elle était en pleine représentation du Roi Lear quand elle a vu Arthur, son compagnon de jeu, s’écrouler devant une audience médusée.
Vingt ans après ce drame et l’irrémédiable effondrement du monde, elle est devenue l’une des vedettes de La Symphonie itinérante, un orchestre et une troupe de théâtre, qui se déplace d’une communauté à l’autre dans la région des Grands Lacs pour y jouer Shakespeare et Beethoven, et ainsi préserver les merveilles de l’Ancien Temps, en attendant le jour béni où le monde se relèvera.
Traversée de part en part par une mélancolie qui serre le cœur et l’idée rassurante que l’art préserve l’humanité du chaos, Station Eleven refuse d’imaginer le pire pour choquer son lecteur. Emily St. John Mandel fait le choix de l’espoir et de la foi, pour qu’un jour renaisse un monde meilleur. Un bijou méconnu, adapté en série par HBO.