Présenté dans la catégorie Cannes première, ce feel good movie signé Emmanuel Courcol a un petit goût de déjà-vu, mais parvient néanmoins à nous arracher (beaucoup) de sourires et quelques larmes.
À 37 ans, Thibaut apprend qu’on lui a menti toute sa vie. Tout commence quand on lui diagnostique une leucémie. Une maladie lourde, qui nécessite une greffe de moelle osseuse rapide. Sa chance de trouver un donneur compatible ? Une sur un million. Quand sa sœur passe le test fatidique, il apprend deux choses. Petit un, elle ne peut pas le sauver. Petit deux, elle n’est pas sa sœur et il a été adopté. Après le choc de cette révélation, il parvient à retrouver son frère biologique et lui demande de l’aide. Une rencontre qui signe le début d’une relation étonnante, complexe et touchante.
Quand Bourdieu rencontre Ravel
Thibaut et Jimmy ont beau partager le même patrimoine génétique, tout les oppose. Le premier est un grand chef d’orchestre de renommée mondiale. Le deuxième travaille dans une cantine. L’un a grandi dans une grande ville avec une famille plutôt aisée. L’autre dans une petite ville du Nord dans un foyer modeste. Ils n’ont pas les mêmes codes et références, mais ils se retrouvent sur une chose : l’amour de la musique.
Véritable passionné, Jimmy joue du trombone dans une fanfare et a même l’oreille absolue. Prononcez une phrase, et il vous la retranscrira en gammes et en notes. Un jeu qui commence à plaire à Thibaut, désormais investi d’une mission : montrer à son cadet tout son potentiel. La musique devient alors le pilier de leur relation, mais elle fait aussi ressurgir toutes leurs différences sociales et leurs frustrations.
Jimmy aurait-il mené la même vie que son frère si on lui avait donné toutes ses chances, dès la naissance ? Thomas mérite-t-il vraiment sa place ? Peut-on s’affranchir de son milieu et de sa condition ? L’œuvre s’interroge et nous fait cogiter sur de nombreuses questions, dont l’identité, la famille, l’adoption, ou encore sur ce qui nous lie.
Ascenseur émotionnel
Avec En fanfare, Emmanuel Courcol (dont Un triomphe avait déjà été sélectionné au Festival de Cannes en 2020) signe un film sans prétention qui ne donne pas de leçon et ne tombe pas dans les clichés que l’on craignait à la lecture du synopsis. Le réalisateur nous embarque dans son histoire dès les premières minutes avec des dialogues très bien écrits et réalistes.
Il parvient à insuffler de la joie et de l’humour dans ces moments difficiles et transcrit avec brio cette légèreté qui finit toujours par s’immiscer dans les moments les plus sombres. Le long-métrage brille par sa capacité à nous faire rire malgré son histoire tragique. On s’attache à ces personnages singuliers et on vit avec eux cette aventure faite de montagnes russes émotionnelles.
Sensible, réaliste et juste, l’œuvre doit aussi sa réussite à son excellent casting. Le duo Benjamin Lavernhe (L’Abbé Pierre – Une vie de combats) / Pierre Lottin (Vivants) est ultra-efficace et convaincant. Leur jeu est bon et ils s’amusent avec toute une palette d’émotions (de la joie à la tristesse en passant par la colère) sans jamais tomber dans l’exagération. Présenté dans la catégorie Cannes première face à Miséricorde d’Alain Guiraudie, Vivre, mourir, renaître de Gaël Morel, ou encore le très attendu Maria de Jessica Palud, En fanfare pourrait cependant peiner à se démarquer en raison de son manque d’originalité.
Il nous livre une histoire et des problématiques qui ont déjà été traitées maintes et maintes fois sur grand écran, mais parvient néanmoins à nous séduire grâce à sa sincérité et sa simplicité. Ce n’est pas LE film que la Croisette retiendra, mais il tient sa promesse de feel good movie en nous faisant passer un bon moment avec (beaucoup) de sourires, des rires, mais aussi quelques larmes. C’est validé.