En ce moment même, le Jeu de Paume consacre une importante rétrospective à l’œuvre de Julia Margaret Cameron, photographe avant-gardiste de la deuxième moitié du XIXe siècle. Intitulée Capturer la beauté, l’exposition est à découvrir jusqu’au 28 janvier 2024.
« J’aspirais à capter toute la beauté qui se présentait devant moi et finalement, cette aspiration a été satisfaite », a déclaré Julia Margaret Cameron, photographe à la carrière aussi brève qu’intense, qui officia de 1864 à 1875. De son 48e anniversaire, jour où sa fille aînée lui offre son premier boîtier, jusqu’à la fin de sa vie, l’artiste britannique n’a eu de cesse de s’illustrer dans le genre du portrait, donnant à voir des compositions aux influences multiples.
Jusqu’au 28 janvier prochain, le Jeu de Paume revient sur cette carrière fulgurante dont l’œuvre prolifique pour son temps fut peu appréciée du vivant de son auteure. Nommée à juste titre Capturer la beauté, la rétrospective propose de découvrir un ensemble d’une centaine de tirages. Entre ses expérimentations et ses portraits contemporains, historiques, littéraires ou allégoriques figuratifs se cachent des fragments de ses écrits de même que quelques objets. Voici trois bonnes raisons de se rendre à l’exposition.
1 Première rétrospective en France depuis 40 ans
La rétrospective organisée par le Jeu de Paume s’impose comme un véritable évènement. Cela faisait 40 ans qu’une institution française n’avait pas célébré le grand œuvre de Julia Margaret Cameron. Capturer la beauté présente ainsi une centaine de monochromes issus, pour l’essentiel, des collections du Victoria and Albert Museum de Londres. Quelques prêts exceptionnels de la Bibliothèque nationale de France, du musée d’Orsay et de la Maison Victor Hugo s’ajoutent également aux cimaises. Représentatif de sa pratique, l’ensemble exposé en ce moment est aussi conséquent lorsque l’on sait qu’au fil de sa carrière, l’artiste a produit près de 1000 photographies.
2 Une artiste d’avant-garde
Comme un certain nombre d’illustres artistes, l’œuvre de Julia Margaret Cameron était vivement critiquée de son vivant. Pourtant, avec le temps, sa pratique s’est révélée être révolutionnaire. En marge des conventions de son époque, la photographe portait un attrait tout particulier pour ce qui relevait alors de l’imperfection. Qu’elles s’expriment au travers de rayures, de bavures ou de taches, les traces de son passage, toujours visibles, font partie de ses compositions.
Ses gros plans se nimbent ainsi d’une imprécision qui adoucit les traits de ses sujets, les rendant presque irréels. « Mrs Cameron, qui était photographe amateur, est la première personne à avoir eu l’intelligence de s’apercevoir que ses erreurs faisaient sa réussite, et à créer dès lors des portraits systématiquement flous », écrira en ce sens le poète et critique anglais Coventry Patmore, en 1866.
3 Redécouvrir de grandes figures littéraires et scientifiques
Julia Margaret Cameron se plaisait à immortaliser ses proches, sa famille, ses employés de maison, les habitants de son village, mais également ses célèbres voisins. Artistes les plus éminents de son temps, scientifiques… Parmi eux figurent John Hershel, Charles Darwin, Alfred Tennyson, George Frederic Watts ou encore sa nièce, Julia Jackson, qui donnera naissance, en 1882, à Adeline, plus connue sous le nom de Virginia Woolf. Un podcast exclusif – réalisé par le programme Kering Women in Motion, qui soutient la rétrospective – offre par ailleurs une lecture de passages dans lesquels l’écrivaine retrace le parcours de son aïeule.
En outre, grandement inspirée par ces importantes figures et leurs créations, la photographe puisait aussi bien dans la littérature, l’histoire ou la religion pour composer ses portraits. Au fil de ces derniers, les visiteurs peuvent reconnaître des épisodes de la Bible, des personnages tirés de la mythologie gréco-romaine ou de textes classiques signés William Shakespeare, John Milton ou Alfred Tennyson pour ne citer qu’eux. Un jeu de devinettes se déploie ainsi dans les galeries du Jeu de Paume.