Des scientifiques d’une université américaine ont développé une montre connectée d’un nouveau genre. Le capteur pouvant mesurer le rythme cardiaque est connecté au système par un blob.
Jasmine Lu et Pedro Lopes, de l’Université de Chicago aux États-Unis, ont développé une montre connectée dont une partie fonctionne avec un blob, cet organisme unicellulaire quasi-immortel. Une façon de proposer une alternative pour réduire les déchets électroniques et poser des questions sur notre rapport aux objets du quotidien.
Un être vivant conducteur
Ces dernières années, la présence dans nos foyers des montres connectées, smartphones, tablettes et autres ordinateurs portables n’a cessé d’augmenter. Nos usages ont explosé et ces appareils font partie de notre vie quotidienne. Le problème de ceux-ci, c’est qu’on ne sait pas encore réellement quoi en faire lorsqu’ils cassent. Certes, des législations sont mises en place pour améliorer leur durabilité et leur réparabilité, mais la plupart du temps, un appareil cassé finit à la poubelle et vient alimenter les quelque 40 millions de tonnes de déchets électroniques générés chaque année.
Les deux scientifiques de l’Université de Chicago sont partis de ce constat pour développer un nouveau moyen d’alimenter une montre connectée. Celle-ci ne fonctionne vraiment que lorsque le Physarum polycephalum, plus communément appelé blob, placé à l’intérieur, est en bonne santé. Cet organisme jaune à l’apparence gluante a des propriétés étonnantes et utiles. Il est capable, par exemple, de conduire de l’électricité. Il est alors placé dans un petit compartiment réservé de la montre et doit être nourri pour grandir et rejoindre une autre partie du compartiment. Alors, seulement le capteur permettant de mesurer le rythme cardiaque est alimenté en énergie pour fonctionner.
Une relation plus profonde à son appareil
Après avoir développé un prototype, les scientifiques l’ont fait tester à cinq personnes pendant deux semaines. Lors des sept premiers jours, la consigne était de nourrir le blob (avec un mélange d’avoine et d’eau) jusqu’à ce qu’il se développe suffisamment pour faire fonctionner le capteur. Imaginez un Tamagotchi, mais en réel. Pendant la seconde semaine, il était interdit aux testeurs de nourrir le blob, qui se mettait alors à sécher et à entrer en sommeil profond. Pendant ces 15 jours d’expérience, les participants ont pu écrire leurs pensées dans un journal.
Nous découvrons donc que ceux-ci se sont attachés sentimentalement à ce blob et que s’en occuper chaque jour a modifié leur perception de cet appareil électronique. Certains, selon l’université, ont même comparé l’expérience au fait d’avoir un animal de compagnie. Les participants ont même été choqués et tristes lorsqu’il leur a été interdit de nourrir le blob pendant une semaine (ce qui ne le tuait pas, le blob étant capable de rester dans un état de sommeil pendant de longs mois, voire des années avant d’être « réactivé »).
Jasmine Lu a pu partager sa vision sur ce projet :
« Nous pouvons prendre soin de nos appareils de différentes manières, par exemple en les nettoyant, en les entretenant ou en les réparant lorsqu’ils sont cassés. Mais dans la conception actuelle des appareils grand public, ces aspects du soin sont moins mis en avant ou sont rendus inaccessibles ; ils sont conçus pour que vous les jetiez, au lieu de vous engager davantage avec eux. Je pense donc qu’il y a un avantage à se concentrer sur cet aspect de l’entretien des appareils plutôt que sur leur simple consommation. »
Si un tel objet sortait un jour, il permettrait à la fois de contenir moins de composants, d’être plus durable et de proposer une relation plus profonde entre l’humain et son appareil.