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La désinformation, une menace majeure pour la liberté de la presse

04 mai 2023
Par Kesso Diallo
Pour RSF, Elon Musk est « l’exemple type » des dirigeants de plateformes numériques qui se moquent de distribuer de la propagande ou de fausses informations.
Pour RSF, Elon Musk est « l’exemple type » des dirigeants de plateformes numériques qui se moquent de distribuer de la propagande ou de fausses informations. ©Skorzewiak / Shutterstock

Reporters sans frontières alerte sur un « déluge » de fausses informations avec le Twitter d’Elon Musk et l’intelligence artificielle dans son classement annuel de la liberté de la presse.

Une liberté de la presse « noyée » sous la désinformation. À l’occasion de la Journée mondiale de la liberté de la presse mercredi, l’ONG Reporters sans frontières (RSF) a publié son classement annuel à ce sujet. Évaluant les conditions d’exercice des journalistes dans 180 pays et territoires, il révèle que ces dernières sont mauvaises dans 7 pays sur 10 et satisfaisantes dans seulement 3 pays sur 10.

« Le Classement mondial prouve l’existence d’une très grande volatilité des situations (…) Cette instabilité est l’effet d’une agressivité accrue du pouvoir dans de nombreux pays et d’une animosité croissante envers les journalistes sur les réseaux sociaux et dans le monde physique. La volatilité est aussi le produit de la croissance de l’industrie du simulacre, qui façonne et distribue la désinformation, et donne des outils pour la fabriquer », a expliqué Christophe Deloire, secrétaire général de l’ONG.

Les effets de la désinformation sur la liberté de la presse

Cette 21ème édition pointe en particulier les effets de la désinformation sur la liberté de la presse. Dans les deux tiers des 180 pays évalués, la majorité des experts de la liberté de la presse (journalistes, universitaires, défenseurs des droits humains) contribuant à l’élaboration du classement ont signalé « une implication des acteurs politiques de leur pays dans les campagnes de désinformation massive ou de propagande », a indiqué RSF.  C’est notamment le cas de la Russie, de l’Inde et de la Chine.

Plus largement, cette édition « met en lumière les effets fulgurants de l’industrie du simulacre dans l’écosystème numérique sur la liberté de la presse ». Comme l’a expliqué Christophe Deloire à l’AFP, elle permet de produire la désinformation, de la distribuer ou de l’amplifier. Le secrétaire général de RSF reproche aux dirigeants de plateformes numériques de se moquer de la distribution de propagande ou de fausses informations, avec Elon Musk qui en est « l’exemple type ». Après avoir racheté Twitter, le milliardaire a en effet mené plusieurs attaques contre la presse, suspendant par exemple plusieurs comptes de journalistes qui le critiquaient ou accolant le label « média affilié à un gouvernement » à plusieurs médias en français, américains ou encore canadiens.

Faux contenus générés par IA

À cela s’ajoute le développement de l’intelligence artificielle (IA) générative, qui a bouleversé l’univers déjà fragilisé des médias. RSF mentionne l’IA génératrice d’images Midjourney, dont la cinquième version permet d’obtenir des contenus plus réalistes. Elle a récemment été utilisée pour créer de fausses images d’une arrestation musclée de Donald Trump. « L’industrie de la désinformation dissémine des productions manipulatoires à grande échelle (…) Et voilà que l’IA digère les contenus pour régurgiter des synthèses qui font fi de la rigueur et de la fiabilité », s’inquiète l’ONG.

« La différence s’estompe entre le vrai et le faux, le réel et l’artificiel, les faits et les artefacts, mettant en péril le droit à l’information. Les capacités de manipulation inédites sont utilisées pour fragiliser celles et ceux qui incarnent le journalisme de qualité, en même temps qu’elles affaiblissent le journalisme lui-même », a-t-elle regretté.

À noter que la France est passée de la 26ème à la 24ème place dans le classement de RSF. Un « petit gain » que l’ONG explique notamment par le fait que la situation se dégrade ailleurs. « Si le cadre légal et réglementaire est favorable à la liberté de la presse et à l’indépendance des rédactions, les outils visant à lutter contre les conflits d’intérêts sont insuffisants, inadaptés et dépassés », a-t-elle indiqué.

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Article rédigé par
Kesso Diallo
Kesso Diallo
Journaliste