Ce 21 février 2024 seront inhumés au Panthéon Missak Manouchian et sa femme Mélinée. Symbole de l’universalité de la Résistance durant la Seconde Guerre Mondiale, c’est la première fois qu’un ouvrier étranger et communiste est ainsi honoré pour ses faits héroïques envers la France. 80 ans jour pour jour après son exécution au Mont Valérien et alors que l’on fête cette année les 80 ans de la libération de Paris. C’est l’occasion de revenir sur cette période trouble mais riche en littérature.
Qui était Manouchian ?
Connu surtout dans les milieux militants, il passera à une plus grande postérité après le poème écrit par Louis Aragon qui lui sera consacré puis repris en musique dans la célèbre chanson de Léo Ferré L’Affiche rouge.
Désigné comme chef de « l’armée du crime » par les Nazis, son nom ainsi que celui de dix autres de ses camarades sera placardé sur la fameuse affiche sur fond de couleur rouge dans toute la France occupée. Le but était de le dénoncer, ils en feront un martyr de la Résistance. La légende Manouchian est née.
Arrivé en France dans les années 1920 pour échapper au génocide arménien, Missak Manouchian sera un héros de la Résistance française, mais aussi un poète. Ses poèmes viennent pour la première fois d’être publiés en Français sous le titre Ivre d’un grand rêve de liberté.
Pour en savoir plus sur ce personnage hors du commun, je vous conseille le très beau roman que lui avait consacré Didier Daeninckx intitulé Missak, bientôt adapté en bande dessinée avec Mako au crayon dans Missak Manouchian une vie héroïque.
Les grands livres de résistants
Cette commémoration prochaine au Panthéon est aussi un bon prétexte pour se plonger dans les récits de ces personnalités engagées que l’on se doit de ne pas oublier. Rappelons que nous fêterons aussi cette année les 80 ans du débarquement en Normandie et de la Libération.
Commençons avec Lucie Aubrac, une figure incontournable qui n’a eu de cesse tout au long de sa vie de militer en faveur de la paix. Dans Ils partiront dans l’ivresse elle raconte son parcours incroyable à travers neuf mois de la vie d’une résistante enceinte d’un second enfant, qui aide quatorze personnes à s’évader, passe les douanes en contrebande, ravitaille les clandestins en faux papiers et les collabos en confiture au cyanure. Un livre de combat et de mémoire.
Avec L’Armée des ombres, Joseph Kessel est aussi de ceux-là. Il raconte le quotidien extraordinaire d’hommes et de femmes ordinaires. Une lutte acharnée pour subvenir à ses besoins mais aussi une véritable ode à la liberté. Un roman que l’on devrait tous avoir dans sa bibliothèque.
Sur la même ligne, lisons ou relisons Le Silence de la mer de Vercors qui met en scène une famille française contrainte de loger un officier allemand. Réquisitoire implacable contre la barbarie hitlérienne, ce récit est devenu un classique traduit dans le monde entier et étudié par de nombreux collégiens.
Et puis bien sûr n’oublions pas deux grands hommes dont les publications ont également marqué par leur vérité et leur idéal de liberté : Daniel Cordier dans le grand récit de sa vie de résistant Alias Caracalla et Premier combat de Jean Moulin qui lui aussi fut intronisé au Panthéon. On se souvient du célèbre discours d’André Malraux.
La Résistance était aussi allemande
C’est un sujet dont on parle très peu mais qui est pourtant loin d’être anodin : au cœur de l’Allemagne nazie, la Résistance s’est aussi organisée clandestinement pour lutter contre le nazisme.
Avec Seul dans Berlin, Hans Fallada écrit un récit exceptionnel en retraçant la vie d’un immeuble berlinois à partir de 1940. On y voit toute la complexité de l’époque pour ces citoyens lambdas. Il y a ceux qui suivent le régiment ardemment, ceux qui le redoutent, d’autres qui le fuient ou se cachent.
Une Femme à Berlin est un journal resté anonyme qui couvre deux mois de 1945. La défaite est une réalité et la vie doit se recomposer sous les bombes et dans les ruines.
Dans Histoire d’un allemand, Sebastian Haffner va plus loin dans l’analyse pour comprendre les origines et les conditions établissement du nazisme. Un document toujours d’actualité.
Enfin Inge Scholl retrace dans La Rose blanche la courte histoire du mouvement de résistance allemand du même nom avant que ses membres ne soient décapités.
La Résistance dans la littérature jeunesse
La meilleure façon d’éduquer les valeurs de justice et d’humanisme et de commencer tôt. Nous trouvons aussi une large palette de publications sur la Résistance destinée à la jeunesse.
A commencer par cette excellente BD Les Enfants de la Résistance de Benoît Ers et Vincent Dugomier. Cette série qui compte 8 tomes pour le moment raconte l’engagement de trois enfants dans un village français. Elle a aussi été reprise sous forme de romans, de jeux et de produits dérivés. Un succès qui tient autant aux personnages attachants qu’à l’histoire. Et elle peut être lue aussi par les grands.
Dent d’ours de Yann et Alain Henriet, autre série dessinée à succès destinée aux adolescents mêle espionnage et drame psychologique en mettant en scène un jeune réfugié polonais parti aux Etats-Unis pour fuir l’envahisseur nazi.
Enfin, si vous souhaitez partager l’événement de l’entrée au Panthéon de Manouchian avec vos enfants, sachez qu’il existe un ouvrage destiné aux plus jeunes qui lui est consacré. Il s’agit de Missak Manouchian l’enfant de l’affiche de Didier Daeninckx, illustré par Laurent Corvaisier. C’est une question de transmission et d’avenir aussi.
