Prix du Roman Fnac 2023 : les finalistes et les 30 titres en lice

Et vous passerez comme des vents fous – Clara Arnaud (Actes Sud)

Exaltant la force et la puissance de la Nature face à l’Homme, Clara Arnaud avait abordé la vie équestre et le voyage dans son livre Au détour du Caucase, puis l’écologie en Amérique centrale avec La Verticale du fleuve. Son roman Et vous passerez comme des vents fous la voit questionner le rapport entre population locale et ours dans les Pyrénées. À la faveur d’attaques d’ursidés, l’autrice évoque cet animal mystérieux et son ancrage dans la culture régionale.

Pour mourir le monde – Yan Lespoux (Aguilo)

Après avoir regroupé ses nouvelles dans le recueil Presqu’îles, Yan Lespoux passe au roman avec Pour mourir, le monde. Un récit choral se déroulant au XVIIe siècle, à l’époque des grands empires coloniaux : au gré des navigations, on y voyage des Landes à Goa en Inde, on fait escale au Brésil en compagnie d’un corsaire portugais… Avec pour fil conducteur le lien entre grande et petite histoire, ce livre saura charmer les amateurs d’évasion dans le temps et l’espace.

Les Amants du Lutétia – Émilie Frèche (Albin Michel)

Deux octogénaires sont retrouvés morts, main dans la main, dans une chambre d’un hôtel luxueux parisien. Ils laissent à leur fille, Éléonore, une dernière lettre, pour expliquer leur geste. Pourtant Éléonore ne peut guère comprendre, et doit gérer un double deuil compliqué… Dans Les Amants du Lutétia, Emilie Frèche poursuit son étonnant œuvre romanesque, en abordant le sujet de la mort avec une touche toute personnelle, en s’appuyant sur une narratrice qui doit composer avec l’étrangeté de la décision de ses parents…

Les Dragons – Jérôme Colin (Allary éditions)

Jérôme Colin retrouve l’âge de l’adolescence, qu’il avait abordé précédemment dans Le Champ de bataille, le temps des Dragons, son nouveau roman. Suivant la rencontre de deux ados en rupture avec leur famille dans un centre éducatif spécialisé, l’écrivain montre un éveil à l’amour au cœur d’un aréopage de vies cabossées. Touchant et dur, ce beau récit évoque la marginalité avec beaucoup de délicatesse. 

Le Portrait de Mariage – Maggie O’Farrell (Belfond)

Après le décès de sa sœur aînée, Lucrèce de Médicis, 15 ans, se retrouve marié au duc Alfonso, souverain de Ferrare. Jeune, innocente, la jeune femme est entraînée dans la mécanique du pouvoir, et dans le rôle « reproducteur » attribué aux filles de la noblesse… Figure historique du XVIe siècle, cette héroïne juvénile devient un personnage romanesque magistral dans Le Portrait de mariage de Maggie O’Farrell, très belle reconstitution de la Renaissance italienne par une spécialiste du récit historique. 

Acide – Victor Dumiot (Bouquins)

Pour son premier roman, Victor Dumiot a choisi une intrigue ultra-contemporaine. D’un côté, il nous présente Julien, un personnage reclus, surfant dans les recoins les plus sombres d’Internet, à la recherche d’images pornographiques et violentes. Il tombe un jour sur la vidéo d’une agression, et s’en obsède. La victime est l’autre héroïne d’Acide : Camille, poussée dans le métro, a perdu son visage. Le récit des deux existences parallèles de ces victimes, physiques et psychologiques, nous plonge dans un univers sombre et proprement édifiant.

Les Parts oubliées – Charmaine Wilkerson (Buchet Chastel)

Connaissons-nous vraiment nos histoires de familles ? Dans Les Parts oubliées, Charmaine Wilkerson imagine le destin de Byron et Benny, qui découvrent un enregistrement laissé par leur mère à sa mort. Celui-ci les entraîne des années en arrière, loin des États-Unis, dans les Caraïbes. Puis les allers-retours entre passé et présent se multiplient : des pièces s’ajoutent au puzzle, mais celui-ci semble s’agrandir, à la faveur de cette saga familiale haletante qui questionne notre rapport à l’identité. Et aux secrets de famille…

Souviens-toi de ne pas mourir sans avoir aimé – Marc-Alexandre Oho Bambé (Calman Levy)

Poète, Marc-Alexandre Oho Bambé sait donner du rythme à la prose : son roman Souviens-toi de ne pas mourir sans avoir aimé use d’une langue swinguante pour mieux parler de jazz, genre musical d’importance capitale pour le narrateur, qui souhaite transmettre à sa fille l’esprit et la philosophie de cette musique.

Le Grand Secours – Thomas B. Reverdy (Flammarion)

Avec son thème (la violence en banlieue), son enjeu (un incident entre jeune et institution provoque une émeute urbaine) et son traitement, à la frontière du roman et du document, Le Grand Secours est brûlant d’actualité. Thomas B. Reverdy nous installe au cœur de la périphérie des villes françaises, en mettant en scène lycéens et profs face à la violence. Saisissant.

Une journée de chien – Sander Kollaard (Éditions Héloïse d’Ormesson)

Seul et célibataire, mais aimé de ses collègues et jamais loin de son chien, Henk a tout de l’homme tranquille. Pourtant, Une journée de chien nous prouve qu’il faut se méfier des apparences ! Un samedi qui ne ressemble pas aux autres, ce personnage ordinaire va découvrir certaines joies du quotidien auxquelles il ne s’adonnait plus, au cours de ce récit initiatique drôle et salutaire signé de l’auteur néerlandais Sander Kollard.

La Mer de la tranquillité – Emily St-John Mandel (Éditions Payot et Rivages)

Entre science-fiction et récit philosophique, La Mer de la tranquillité nous entraîne dans les méandres du temps. Au fil de chapitres consacrés à différents personnages vivant en différentes époques, Emily St-John Mandel tisse un récit rythmé par de multiples résonances, avec pour fil rouge une méditation sur le temps qui passe, le besoin de contrôle et les espaces de liberté des humains.

Le Tiers Pays – Karina Sainz Borgo (Gallimard)

Le Tiers Pays désigne un immense cimetière illégal latino-américain. Le roman débute lorsqu’une migrante, Angustias, se rend sur les lieux afin d’obtenir un lieu de sépulture pour sa famille. Dans une atmosphère où règnent misogynie et violence, la jeune femme trouvera une alliée de choix, en la personne de Visitacion, créatrice du lieu, au cours d’un récit tentaculaire parfaitement maîtrisé par une Karina Sainz Borgo au sommet de son art. 

Panorama – Lilia Hassaine (Gallimard)

Après Des choses sans importance et Soleil amer, Lilia Hassaine nous fait visiter une France nouvelle, rebaptisée « Transparence », où les maisons ont été remaniées en de grandes cages de verre. Chacun ainsi peut observer la vie de ses voisins. Et empêcher les crimes domestiques. Sauf que le système a bien des revers, et une commissaire de police sortant de sa retraite ne tarde pas à en ressortir les contradictions… Entre dystopie politique et roman policier, Panorama nous démontre l’absurdité des sociétés de contrôle et de surveillance dans un style original.

Le Grand Feu – Léonor de Récondo (Grasset)

Avec des romans comme Amours, Point cardinal ou Revenir à toi, Léonor de Récondo multiplie les formes pour imposer une écriture du secret et de l’identité aussi captivante que maîtrisée. Dans Le Grand Feu, c’est à travers le portrait d’une fille de marchands, dans la Venise du XVIIIe siècle que l’autrice déploie encore une fois son style généreux pour évoquer la vie musicale d’époque, en particulier la figure de Vivaldi. Un sujet très personnel pour une romancière également violoniste !

Vous ne connaissez rien de moi – Julie Héraclès (JC Lattès)

A la Libération, les femmes françaises accusées d’avoir eu des relations avec les Allemands étaient tondues et marquées au fer rouge dans des lynchages collectifs barbares. Julie Héraclès donne chair à l’une de ses martyres, immortalisée par une photo de Robert Capa à l’époque, dans son roman Vous ne connaissez rien de moi, portrait bouleversant d’une victime des temps les plus troubles de l’Histoire récente.

Du même sang – Denene Millner (Le Cherche Midi)

Embrassant la vie de trois femmes afro-américaines sur deux générations, Du même sang a l’ardeur des grands romans sociétaux d’outre-Atlantique. Denene Millner y dépeint ségrégation, racisme intériorisé et ambiguïté morale entre la fin des années 1960 et aujourd’hui, dans une fresque prônant la tolérance face à la violence systémique.

Le chien des étoiles – Dimitri Rouchon-Borie (Le Tripode)

Après ses récits judiciaires et son roman poignant Le Démon de la colline aux loups, Dimitri Rouchon-Borie livre une deuxième fiction : Le Chien des étoiles. Récit d’itinérance, ce road book nous plonge dans la nuit de Gio, un jeune gitan atteint de cécité à la suite d’une agression. Sa contemplation fait tout le sel de ce roman à l’atmosphère belle et singulière.

Humus – Gaspard Koenig (Les éditions de l’Observatoire)

Peut-on tout changer avec une idée ? L’environnement mérite-t-il que des jeunes gens engagent toute leur vie et se fasse des ennemis pour soutenir cette cause ? Autant de questions que posent Humus, nouveau roman de Gaspard Koenig qui nous plongent dans le quotidien de deux étudiants qui se décident à soutenir la cause de l’écologie à tout prix, et doivent composer avec les contradictions entre leur idéalisme et la réalité.

Veiller sur elle – Jean-Baptiste Andrea (L’Iconoclaste)

Au début du XXe siècle, en Italie. Un sculpteur issu de la pauvreté rencontre une jeune femme originaire d’une grande famille bourgeoise. Le sort les amène à se rencontrer, à s’aimer, à se fuir, à se retrouver, pendant que leur pays bascule dans le fascisme. Après Ma Reine, le réalisateur, scénariste et écrivain Jean-Baptiste Andréa nous emmène encore une fois dans son imaginaire fait de passions déchirantes et de belles rencontres avec Veiller sur elle.

L’Enfant dans le taxi – Sylvain Prudhomme (Minuit)

Prix Femina 2019 pour Par les routes, Sylvain Prudhomme continue d’explorer les quêtes intimes d’hommes simples, précipités malgré eux dans les dérives de l’existence. L’Enfant dans le taxi raconte deux recherches : celle d’un fils illégitime qui veut connaître sa famille paternelle ; celle d’un personnage en pleine séparation, qui scrute la vérité des êtres. Leurs destins liés donnent à ce roman élégant une dynamique toute particulière.

Trust – Diaz Hernan (L’Olivier)

Entre Succession, Gatsby le Magnifique et Le Loup de Wall Street, Trust nous entraîne dans les coulisses de la haute finance et de la richesse. Mettant en scène un couple richissime malgré la crise de 1929, Hernan Diaz nous fait traverser les années de Grande Dépression auprès de ces personnages qui cultivent les apparences autant qu’ils font fructifier leur patrimoine. Un roman vertigineux, qui a valu à son auteur le Prix Pulitzer.

La Foudre – Pierric Bailly (P.O.L)

Les Enfants des autres, Le Roman de Jim… Pierric Bailly aime les atmosphères familiales étranges, les romans réalistes où surgit une certaine bizarrerie. La Foudre en témoigne à nouveau en cette rentrée littéraire : l’auteur nous plonge dans le drôle de destin d’un berger qui apprend qu’un ami d’enfance vient de tuer son voisin. Et qui se rapproche, en tentant d’en savoir plus, de la femme de cet ami… De quoi nourrir une intrigue à la morale aussi ambigüe qu’édifiante. 

L’hôtel des oiseaux – Joyce Maynard (Philippe Rey)

Dans son nouveau roman, Joyce Maynard dépeint une identité faussée : la fille d’une ancienne terroriste vit en effet sous un faux nom, loin de New York où sa mère a sauté avec la bombe qu’elle préparait. Un passé ombrageux qui ressort lorsqu’à nouveau, cette héroïne doit se cacher et rejoindre l’Amérique Centrale… Un nouveau projet, une nouvelle adaptation : L’Hôtel des oiseaux est un roman de la résilience et de la résistance. Éclairant.

Ce que je sais de toi – Éric Chacour (Philippe Rey)

Dans l’Égypte du temps de Nasser, un médecin bourgeois rencontre un jeune homme pauvre près de son dispensaire. Entre eux naît une relation qui semble incongrue, et qui pourtant fait sens. Face aux carcans de la société, leur ouverture d’esprit semble promise à se briser contre un mur. Et pourtant… Dans son premier roman, Éric Chacour s’inspire d’un contexte historique bien particulier pour écrire une histoire aux résonances universelles : Ce que je sais de toi mélange les enjeux moraux et les niveaux de lecture avec maestria. 

La Danse des damnées – Kiran Milwood Hargrave (Robert Laffont)

Après Entrez dans la danse de Jean Teulé, un autre roman évoque l’épidémie de « danse » qui frappa la ville de Strasbourg en 1518 : La Danse des damnées. Kiran Milwood Hargrave donne une version particulièrement féminine de ce fait historique significatif de l’Europe du début de la Renaissance. Et livre une belle histoire de revanche et d’humanité.

Les Silences des pères – Rachid Benzine (Seuil)

Un fils retrouve une série de cassettes audio enregistrées par son père décédé. Leurs contenus ? Une véritable autobiographie, dont les principaux éléments étaient ignorés du reste de la famille. Pour le fils commence alors une quête à la recherche de l’identité de cette figure paternelle si réservée, que raconte par le menu Les Silences des pères, très bel exercice de style autour de la mémoire et de la manière de se raconter soi-même, signé du spécialiste du conte philosophique Rachid Benzine.

Nos cœurs disparus – Céleste Ng (Sonatine)

Quand la tyrannie a pris le dessus, les livres exaltant la liberté sont interdits. Et leurs auteurs disparaissent, aussi, parfois. C’est le cas de Margaret, poétesse, que tente de retrouver son fils, Bird. Dans sa quête, il peut compter sur l’appuie des résistants, qui, dans cette dystopie signée Céleste Ng (Tout ce qu’on ne s’est jamais dit), sont des bibliothécaires clandestins. Nos cœurs disparus relate la lutte universelle contre l’oppression à travers une fiction d’anticipation aux enjeux vertigineux !

La dernière place – Négar Djavadi (Stock)

Partant d’un événement majeur pour l’Iran (la chute d’un avion décollant de Téhéran lors d’une escalade diplomatique entre l’Iran et les États-Unis), et significatif pour lui (l’un de ses proches était à bord), Négar Djavadi relate l’histoire immédiate de ce pays en proie à de profondes divisions depuis la révolution de 1979 et aussi le destin d’une victime. De quoi nourrir, dans La Dernière Place, un récit qui croise géopolitique et intimisme.

Les Âmes errantes – Cécile Pin (Stock)

Pour son premier roman, Cécile Pin nous fait suivre le destin de trois orphelins réfugiés à Londres après leur départ du Vietnam à la fin des années 1970. Ces « boat-peoples », comme on disait alors, ont vécu mille vies avant d’arriver à destination : l’autrice en raconte les turpitudes et les rebondissements dans Les Âmes errantes, roman de l’exil et de la reconstruction.

Le Dernier Revival d’Opal & Nev – Dawnie Walton (Zulma)

Inventant un duo musical fictif composé d’une reine de l’afropunk et d’un songwriter arriviste, Le Dernier Revival d’Opal & Nev conte l’aréopage de la hype américaine, et le lien entre mode, rock, rébellion et presse. Une jolie manière de dépeindre l’envers du show-business, et une belle façon de découvrir la plume de Dawnie Walton, nouvelle reine de la littérature pop outre-Atlantique.