Douze ans après la révolution iPhone, le smartphone s’apprête à connaître l’une des plus grandes mutations de sa jeune histoire. La nouvelle décennie qui s’annonce va apporter avec elle de nombreuses innovations, à commencer par la 5G. Le réseau mobile de demain va permettre à de nouveaux usages d’émerger et au « téléphone intelligent » d’évoluer. À la veille de l’IFA de Berlin, il est déjà possible d’imaginer à quoi ressemblera le smartphone de demain.
En l’espace d’une décennie, le smartphone est devenu un outil indispensable du quotidien. L’avènement des « téléphones intelligents » est souvent associé à l’arrivée de l’iPhone en 2007. Pourtant, des mobiles avaient déjà montré la voie dès la fin des années 1990 avec les fameux PDA (assistants personnels) signés Palm, puis les mobiles de Nokia. Néanmoins, c’est bien avec le lancement de l’appareil d’Apple que le téléphone (phone) est devenu smart (intelligent) aux yeux du grand public, grâce notamment à son écran tactile.
Depuis, la planète entière a succombé au smartphone et le géant Google revendique aujourd’hui 2,5 milliards de terminaux Android actifs dans le monde. Un succès impressionnant qui cache pourtant une autre réalité : le marché traverse depuis quelques mois la pire crise de son histoire. Les ventes de smartphones ne progressent plus et ont même baissé pour la première fois l’année dernière.
À l’aube de l’an 2020, le téléphone intelligent se cherche un second souffle et plusieurs améliorations majeures devraient lui permettre de se réinventer. Les acteurs majeurs du secteur multiplient d’ailleurs les innovations depuis quelques mois, si bien qu’il est déjà possible d’entrevoir ce à quoi ressemblera notre futur smartphone.
La 5G : l’élément déclencheur de la nouvelle révolution
Avant de s’attarder sur les évolutions techniques qui attendent nos appareils, il est indispensable d’évoquer la 5G. Le réseau mobile du futur est déjà lancé dans certains pays et promet de bouleverser les usages. Si son lancement est prévu pour 2020 en Europe, il faudra du temps avant que la 5G ne soit – notamment en France – une réalité pour tous.
Présentée comme une « technologie clé », la prochaine génération de réseaux de téléphonie mobile n’est pas une simple évolution de la 4G(+). Elle promet des débits beaucoup plus élevés (selon l’opérateur Orange, la 5G offrira progressivement un haut débit mobile amélioré jusqu’à 10 fois plus rapide que la 4G) et se distingue surtout par sa très faible latence. Deux arguments majeurs qui vont lui permettre de favoriser de nouveaux usages comme la réalité augmentée ou virtuelle et d’améliorer ceux qui existent déjà (streaming en très haute définition, téléchargement, activités dans le cloud…). Le marché du smartphone ne sera d’ailleurs pas le seul à en profiter : les objets connectés ou la voiture connectée/autonome attendent eux aussi le déploiement de la 5G.
Cette dernière va aussi permettre au cloud gaming de se démocratiser, un secteur qui intéresse notamment Google avec Stadia ou le service Shadow du français Blade. Lors du Mobile World Congress, nous avions pu approcher une démonstration du cloud gaming en 5G sur le stand de Qualcomm. Pour le grand public, le jeu à la demande pourrait être l’un des premiers atouts de la 5G et les fabricants ne s’y trompent pas en misant sur les smartphones dédiés au gaming.
La course à la 5G est déjà lancée
L’ensemble du secteur se prépare à la révolution 5G et certains constructeurs proposent déjà des modèles 5G dans quelques pays (Corée du Sud, États-Unis, Chine…). C’est notamment le cas chez Samsung ou Huawei, tandis qu’Apple devrait attendre 2020. Plusieurs marques chinoises préparent également des modèles compatibles 5G et l’arrivée des premiers forfaits 5G va leur permettre d’exister sur le marché. Selon Gartner, les ventes de smartphones 5G représenteront 6 % des ventes totales de mobiles en 2020 et 51 % d’ici 2023.
Dès l’année prochaine, les modèles les plus haut de gamme (flagships) seront disponibles en version 5G.
Pliable, intégral, double, nouveaux formats… : l’écran dans tous ses états
Élément le plus visible de nos smartphones, l’écran a déjà fortement évolué depuis les débuts du téléphone. Avec l’arrivée de l’écran pliable, il continue d’alimenter les débats en étant présenté comme la prochaine révolution du secteur. Samsung propose un avant-goût du futur avec son Galaxy Fold (sans oublier le Mate X de Huawei), mais il est encore trop tôt pour parler de révolution.
Les débuts des appareils pliables sont compliqués et les deux géants du secteur ont préféré revoir leur copie avant de commercialiser – au prix fort – leurs modèles respectifs. Cette très chère innovation n’a pas encore totalement convaincu, mais demeure prometteuse. Elle pourrait permettre au smartphone de se transformer en appareil 2-en-1 encore plus polyvalent et offrir de nouveaux usages. Il faudra toutefois attendre une baisse de prix pour le voir se démocratiser. De son côté, LG a fait le pari du double écran et présentera son nouveau modèle lors de l’IFA.
À court terme, le futur de l’industrie mobile pourrait surtout passer par l’écran intégral. Depuis quelques années, les fabricants multiplient les efforts pour offrir des appareils « borderless » (sans bords) en optant pour une encoche ou une caméra escamotable. Le dernier exemple notable nous vient d’Asus avec son Zenfone 6 équipé d’un appareil photo rotatif. Pourtant, ces améliorations ne sont que temporaires. Les innovations apportées aux dalles (avec capteurs sous l’écran, incurvées, trouées…) et l’arrivée de la caméra cachée sous la surface de l’écran vont permettre de voir débarquer des smartphones vraiment bordeless sans « gadget » au niveau de la caméra frontale. Plusieurs fabricants tels que Xiaomi, Samsung ou Oppo avec l’écran Waterfall veulent faire ce pari et les premiers modèles pourraient être commercialisés au cours des prochains mois.
Cette année, on a pu voir de nombreux modèles (Samsung Galaxy S10, OnePlus 7 Pro, Xiaomi Mi 9T…) équipés d’un lecteur d’empreintes sous l’écran, mais cette option est réservée aux dalles OLED. Néanmoins, les fabricants commencent à évoquer son arrivée sur des écrans LCD et des modèles d’entrée et milieu de gamme pourront ainsi en profiter. Le smartphone a également tendance à s’allonger en passant au format 21:9.
Enfin, la nouvelle année pourrait être marquée par l’arrivée de nombreux smartphones équipés d’un écran avec un taux de rafraîchissement de 90 Hz ou plus (jusqu’à 120 Hz). Les modèles dédiés au gaming ont été les premiers à opter pour cette fréquence – qui permet une expérience plus fluide – et ils ne sont plus seuls. Les OnePlus 7 et 7 Pro ont fait ce choix et Google pourrait imiter la marque chinoise avec son Pixel 4.
L’appareil photo : la course aux mégapixels est relancée
L’appareil photo est un élément déterminant dans le choix d’un smartphone, et là encore, les progrès sont spectaculaires. Pratique, le mobile est un allié de taille pour immortaliser ses meilleurs moments et les partager sur les réseaux sociaux. Les smartphones ont signé le déclin des compacts et la tendance n’est pas près de s’inverser.
Les capteurs photo ont tendance à se multiplier – Nokia a lancé cette année un smartphone avec cinq capteurs au dos – et Samsung a relancé la guerre des mégapixels. De nombreux modèles embarquent aujourd’hui un capteur de 48 mégapixels (Sony ou Samsung) et on trouvera des modèles équipés de capteurs de 64 mégapixels signés Samsung d’ici la fin de l’année. Et l’ambitieuse entreprise sud-coréenne ne compte pas s’arrêter là. Elle a déjà annoncé un capteur de 108 mégapixels en partenariat avec Xiaomi.
Le constructeur chinois devrait être le premier à proposer l’ISOCELL Bright HMX sur l’un de ses appareils. D’autres constructeurs pourraient ensuite opter pour ce grand capteur (1/1,33 pouce) qui permettra de capter plus de lumière. À l’instar des capteurs 48 et 64 mégapixels, il a recours au pixel binning qui fusionne quatre pixels en un pour offrir des photos de 27 mégapixels (108/4).
À l’avant, les fabricants cherchent par tous les moyens à faire disparaître le capteur (appareil photo escamotable, rotatif, tiroir, aileron…) et optent depuis quelques mois pour des écrans poinçonnés. Cette option devrait se multiplier tandis qu’Oppo et Xiaomi ont récemment présenté des caméras selfies dissimulées sous l’écran du smartphone.
Composants : une puissance mieux maîtrisée et de l’IA à tous les niveaux
Les smartphones continuent d’embarquer de composants toujours plus petits et performants. Depuis quelques années, même les modèles d’entrée ou milieu de gamme sont capables de proposer des performances satisfaisantes pour la plupart des usages.
Dès 2020 et l’arrivée de la 5G, le smartphone aura besoin d’encore plus de puissance pour répondre aux nouveaux usages. Les puces les plus récentes (Qualcomm Snapdragon 855+, Samsung Exynos 9825) sont déjà prêtes pour demain et sont pour certaines capables de supporter des écrans affichant des définitions WQUXGA (3840 x 2400 pixels) ou 4K UHD (4096 x 2160 pixels), des caméras de 22 Mpx, avec l’enregistrement vidéo 8K à 30 fps ou le stockage en UFS 3.0.
Les modèles équipés de 8 à 12 Go de RAM (comme le Galaxy Note 10) vont également se multiplier au cours de l’année. Les années à venir seront aussi marquées par une course à la finesse de gravure avec des SoC gravés en 7 nm ou 5 nm pour les appareils Android ou l’iPhone. Le gain de puissance s’accompagnera d’une amélioration de la consommation et donc d’une meilleure gestion de l’énergie.
L’avenir du smartphone passe par la réalité augmentée
Ces améliorations vont permettre à la réalité virtuelle et augmentée de se démocratiser sur smartphone. Si Pokémon GO a donné un aperçu du potentiel de la réalité augmentée et Maps commence à proposer des fonctionnalités AR, la réalité augmentée sur smartphone n’en est qu’à ses balbutiements. Les deux géants du secteur, Apple et Google, travaillent depuis plusieurs années sur cette technologie qui va profiter des années 2020 pour bouleverser nos smartphones. De nombreux jeux et applications (e-commerce, réseaux sociaux, navigation) devraient en profiter.
Des smartphones taillés pour l’IA
L’intelligence artificielle n’est pas en reste et c’est même elle qui doit permettre au smartphone de devenir « plus intelligent ». Google multiplie les améliorations en ce sens avec son Assistant tandis que ses Pixel (XL) ont séduit en misant sur l’IA. Cette dernière va continuer d’apporter son lot d’améliorations dans divers domaines comme la photo, les performances, la gestion de la batterie ou l’automatisation des tâches. Pour cela, de plus en plus d’appareils vont embarquer des puces dédiées appelées NPU (Neural Processing Unit).
Batterie : une recharge toujours plus rapide
Déjà présente sur de nombreux modèles, la recharge rapide (voir notre dossier dédié) va continuer à progresser dans les années à venir. Toujours plus performant, le smartphone peine à faire progresser son autonomie et il est encore difficile de trouver des modèles capables de dépasser, voire simplement d’atteindre deux jours d’usage sans recharge.
L’an 2020 ne permettra pas toujours pas au téléphone intelligent de se rapprocher de l’illustre 3310, mais des progrès seront à noter. Outre des composants moins énergivores, la charge rapide va devenir encore plus véloce dans les années à venir. La marque qui monte, Xiaomi, a présenté un chargeur 100 W qui promet de recharger votre appareil en 17 minutes. Chez Vivo, la technologie FlashCharge 120 W promet le plein d’une batterie de 4 000 mAh en moins d’un quart d’heure.
Il ne s’agit toutefois que de démonstrations et de nombreuses interrogations entourent ces systèmes. Les fabricants devront notamment rassurer sur leur capacité à limiter la chauffe des mobiles, avant tout lancement commercial. La charge « super » ou « ultra » rapide devrait donc arriver progressivement sur nos appareils.