Il est des séries qui parviennent à se démarquer et à émerger de la multitude gravissant par la même les marches qui mènent au succès. Les gouttes de Dieu s’inscrivent sans nul doute au titre de ces dernières. Véritable succès de librairie avec ses deux millions d’exemplaires vendus elle n’a de cesse de conquérir un public toujours plus nombreux et pas nécessairement friand de manga. Gageons que le meilleur reste à venir pour cette série qui ne connaît pas encore son pic de dégustation.
Comment expliquer un tel succès ? Une part de sa réussite réside certainement dans l’originalité du sujet traité. Les manga sur l’œnologie ne sont en effet pas légion en France et il n’en fallait dès lors pas tant pour susciter la curiosité du lectorat de l’hexagone, d’autant que le pays s’enorgueillit de la qualité de sa production vinicole.
Shizuku Kanzaki afin d’hériter du patrimoine et en particulier de la collection de vins de son père défunt, doit découvrir les vins préférés de ce dernier au travers de descriptions contenues dans le testament. La tâche est ardue pour ce jeune homme qui n’a jamais bu de vin et qui n’a donc aucune connaissance en la matière bien que fils d’un œnologue réputé. Mais le pire reste à venir puisqu’il va découvrir l’existence d’un frère adoptif qui va dès lors devenir son rival. De plus ce dernier n’est autre que le brillant critique Issei Tomine.
Une fois de plus la trame principale de ce manga se dessine dans le parcours initiatique d’un jeune homme. En effet Shizuku Kanzaki se lance sur les traces d’un père qu’il ne connaissait finalement que très peu, en quête du dernier message laissé par celui-ci à ses fils. Un message bien sûr subliminal puisque contenu dans les vins sélectionnés par le défunt. Si le but ultime du défi ne se résume pas à l’héritage patrimonial le schéma narratif n’en reste pas moins classique. Si les personnages n’évoluaient pas dans le monde de l’œnologie l’intrigue serait en effet bien commune.
Là où transpire le réel talent des auteurs c’est qu’au travers d’un dessin très lissé et très réaliste ils parviennent à dépeindre toute une palette de sentiments, d’émotions et de senteurs, invitant ainsi le lecteur à trinquer et à déguster ces vins savoureux avec les principaux protagonistes de la saga. Cette rigueur que les auteurs s’imposent quant à l’aspect graphique de l’œuvre nous la retrouvons dans l’élaboration et la construction de l’univers dans lequel évoluent les personnages. S’agissant d’une série qui s’inscrit dans le monde du vin les auteurs réalisent de nombreuses recherches afin que leur histoire reste crédible ne se limitant pas à décrire les grands crus classés français…
A travers le travail des auteurs c’est leur passion pour ce breuvage qui transparaît ce qui explique peut-être en partie le succès retentissant de la série y compris (et surtout) auprès d’un public qui n’est pas le lectorat manga classique et auprès de la critique !
Nominé lors du Festival Internationnal de la Bande Dessinée d’Angoulême 2009 Les gouttes de Dieu est aussi sélectionné pour la Japan Expo Awards 2011 dans la catégorie meilleur seinen. Le millésime sera-t-il bon pour cette série ? Nous verrons bien mais une chose est sûre elle n’a pas fini de séduire !