Décryptage

De vinyle en ville : la musique à Bristol

29 juin 2022
Par Louis
De vinyle en ville : la musique à Bristol

Après un détour par les quatre coins de la France, De vinyle en ville revient au Royaume-Uni, dans le sud-ouest de l’Angleterre. Direction Bristol ! Ville d’origine du street artist Banksy et théâtre des péripéties de la série Skins, elle a fortement été marquée par la culture underground à partir de la fin des 70s. Elle rayonne dans les années 90 en tant que terre de naissance du trip-hop. Tour d’horizon sonore d’une cité culturelle majeure du pays.

Bristol avant les 90s : l’underground avant tout

Everybody's got to learn sometime The Complete Rialto Records 1979-1982Avant les années 90, Bristol est loin d’être considérée comme un réservoir à tubes. Si le groupe de pop The Korgis provoque un petit raz-de-marée avec le mélancolique Everybody’s Got To Learn Sometime, la ville n’est pas un berceau à stars. On peut néanmoins noter que deux des trois fondatrices de la grosse cylindrée Bananarama sont nées à Bristol, mais le trio s’est en réalité formé dans la capitale. Il faut aller à Bath, à une petite vingtaine de kilomètres, pour voir éclore un groupe majeur de la new wave, Tears For Fears, à l’origine d’une poignée de titres incontournables des 80s.

Albums 1981 1984 CoffretMais restons à Bristol, où le mot d’ordre reste l’underground. Avec l’émergence du punk et de son apologie du « do it yourself » (fait maison), le fait de pouvoir faire de la musique, de pouvoir s’exprimer librement sans être un virtuose, prend le pas sur toute notion de succès et de profit. Ainsi, de nombreux groupes se forment, tout en restant cantonnés dans la sphère punk et post-punk. The Cortinas sont généralement considérés comme les figures majeures du punk à Bristol (à noter que leur guitariste Nick Sheppard officiera chez The Clash pour les dernières années de la formation londonienne). Specimen exerce une certaine influence dans la sphère du gothique tandis que Vice Squad, emmené par la chanteuse Beki Bondage, propose des titres sulfureux avant de s’attirer les foudres de la sous-culture punk en signant chez une major en 1981. Enfin, The Pop Group, influencé par divers courants musicaux, ne connaît pas de succès mainstream mais une poignée d’artistes n’hésitent pas à se déclarer héritiers de cette formation.

For how much longer do we toleAu cours des années 80, la culture hip-hop prend également de l’ampleur et, grâce à un important brassage culturel, une constellation de collectifs se forme à Bristol. C’est le début de ce que l’on appelle le Bristol sound. Dans ce mouvement, on retrouve The Wild Bunch, dont plusieurs membres vont former plus tard ce qui sera sans doute le groupe le plus connu de la ville : Massive Attack.

Bristol dans les années 90 : épicentre du trip hop

Blue LinesAu début des années 90, Bristol, bien qu’influencée par la culture underground, passe dans une autre dimension. Elle devient l’épicentre d’un mouvement musical fascinant : le trip-hop. Genre hybride basé sur le hip-hop et modelé par différents horizons musicaux (la musique électronique en particulier), il donne lieu à des compositions généralement atmosphériques et est popularisé par deux groupes majeurs.

MezzanineTout d’abord, Massive Attack, évoqué plus haut. Avec l’énigmatique Tricky dans ses rangs à ses débuts, ce groupe (ou plutôt collectif) donne un coup de pied dans la fourmilière du hip-hop anglais en jonglant avec les styles pour un résultat aussi sombre qu’enivrant. Avec des invités de choix comme Horace Andy, Tracey Thorn (Everything But The Girl) ou encore Elizabeth Fraser (Cocteau Twins), la formation sait très bien s’entourer pour un résultat sensationnel. Le premier album, Blue Lines, sorti en 1991, est souvent considéré comme le premier disque de l’histoire du trip-hop, et comme un véritable chef d’œuvre. Protection poursuit brillamment la route de son prédécesseur, alors que Mezzanine, malgré des tensions grandissantes au sein du collectif, connaît un succès vertigineux, notamment grâce au tube planétaire Teardrop (qui sera repris par Dr. House pour en faire son générique). En dépit de quelques passages à vide – et encore tout est relatif – Massive Attack reste un nom mythique de la musique britannique.

DummyNom tout aussi mythique, Portishead, aussi originaire de Bristol, joue à armes égales dans l’univers trip-hop. Avec un Dummy délicieusement glacial, la formation emmenée par Beth Gibbons signe un départ proche de la perfection. Au même titre que Teardrop, le torride Glory Box reste un monument du genre. Tout comme Massive Attack, l’exercice du deuxième album se passe sans encombre : Portishead, sorti en 1997, fait plus que satisfaire la presse spécialisée et le public. L’avenir du groupe est ensuite mis entre parenthèses pendant une dizaine d’années, avant un retour bluffant avec Third. Assez éloigné des contrées trip-hop et plus expérimental, cet album prouve que cette longue pause n’a pas porté atteinte au talent créatif du trio.

Tuesday Maybe Edition DeluxeEn dehors de ces deux géants, c’est toute une scène électronique qui se développe en parallèle à Bristol dans les années 90, en particulier dans le domaine de la drum n’bass. Roni Size, notamment avec son album New Forms, fait partie des artistes les plus populaires de ce style fougueux. Son ancien acolyte, DJ Krust, est également réputé chez les adeptes du genre. Dans un domaine plus dance et moins dn’b, le duo Way Out West contribue aussi à la popularisation de l’électro made in Bristol.

Bristol aujourd’hui : retour au punk

CrawlerSi dans les années 2000, Bristol peut toujours compter sur le succès des groupes qui ont brillé lors de la décennie précédente, la ville peine à trouver un nouvel ambassadeur digne de ce nom. Néanmoins, comme dans le reste du Royaume-Uni, elle bénéficie aujourd’hui d’un retour en force du punk et une petite scène se développe autour de ce style. Le groupe Idles fait partie des piliers de ce renouveau dans le pays et chaque sortie d’album est accueillie chaleureusement. Le dernier en date, Crawler, ne fait pas exception à la règle.

Giant SwanOutre la formation de Joe Talbot, d’autres candidats frappent à la porte, comme Giant Swan qui propose une techno façonnée avec le grain du punk, Heavy Lungs, auteurs de quelques très bons EP, dont Measure, ou encore Grandmas House et son rock révolté. Dans un registre plus folk, Katy J Pearson fait figure d’étoile montante. La grande relève de Bristol arrive-t-elle ? Affaire à suivre.

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Article rédigé par
Louis
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