Notre poète moustachu, truculent chanteur à l’accent marqué et excellent gratteur de corde par ailleurs n’aura vécu que 60 ans tout rond. Mais comment mesurer l’héritage que laisse Georges Brassens ? Un lègue impalpable, immatériel, qui reste sans commune mesure ou presque dans le monde de la francophonie. A l’occasion de l’anniversaire de sa naissance, il y a 100 ans cet automne, petit tour d’horizon sur LE grand nom de la chanson française et les multiples parutions qui vont avec.
Quand le compteur tourne et finit par retomber sur un chiffre rond, la perche nous est tendue pour un coup d’œil dans le rétro en bonne et due forme. Bonne musique et bons mots ne sont-ils pas la meilleure des associations ? Anniversaire de la naissance d’un des plus grands noms de la chanson française, incompris et parfois regardé de traviole en son temps alors qu’il est aujourd’hui quasi sacralisé et que plus grand monde n’oserait le critiquer, c’est ça Georges Brassens ! Un génie modeste, un modeste géant. Une dégaine d’ours mal léché qui avait le mot juste, la critique culottée et la prose élastique. On fête cette année les 100 ans de notre poète moustachu favori dont les chansons font aujourd’hui partie intégrante du patrimoine et d’un héritage commun… N’en déplaise à certains.
Jeu, Sète et match !
Un sourire ! C’est souvent la réaction naturelle à l’écoute d’une chanson de Georges Brassens. Quel que soit l’âge ou le sexe de l’auditeur, son état de fatigue ou le moment de la journée, une chanson de Brassens c’est toujours aussi plaisant et assez truculent. Facile à entendre et à fredonner, mais pas toujours à chanter. La marque de fabrique d’un artiste qui malgré l’apparente simplicité du format voix-guitare, a su éléver l’art de la chanson à un niveau bien supérieur à beaucoup de ses contemporains. En revanche, pudibonds, vieux & jeunes ronchons et autres bas de plafond, passez votre chemin.
Ce n’est un secret pour personne, Georges Brassens est né à Sète en octobre 1921 dans un environnement que les sociologues actuels qualifieraient de populaire. Un père et une mère foncièrement diffèrents, de caractère comme de confession (elle, fervente catholique, lui est anticlérical), mais que le phonographe familial et l’amour de la chanson réunis. Une ville indiscutablement liée au chanteur jusque dans ce presque testament.
Des vers… Et des pas mûres !
Si à la maison on chante continuellement, à l’école communale c’est un autre genre de musique pour Georges Brassens. Pas très bon élève, espiègle, bagarreur et rêveur, c’est l’un de ses professeurs qui le mettra sur le chemin de la poésie et lui évitera une sortie de route qui aurait pu lui coûter cher.
La poésie, une révélation qui transformera sa vie. Comme ça l’est souvent raconté dans les diverses biographies qui lui sont consacrées, cette passion du bon mot, (qu’il soit beau ou qu’il soit gros) le conduiront à gratter une guitare pour faire le lien entre ces deux arts majeur (la poésie et la chanson donc) et avoir ainsi la possibilité de diffuser ses rimes et autres vers scrupuleusement soignés au plus grand nombre.
C’est Jacques Canetti qui le remarque le premier et qui produira ses premiers disques au début des années 50. Si en ces temps d’après-guerre, dans un environnement musical hexagonal emprunt de bons sentiments et d’une forme de nationalisme (une France fière d’avoir remporté la bataille), Georges Brassens irrite autant qu’il séduit et ses prestations de cabarets en cabarets appuyées par quelques « prescripteurs » influents lancera une carrière et une réputation bien loin d’être mauvaise quand on y réfléchit.
C’est à cette époque qu’il rencontre un ami pour la vie, l’écrivain/scénariste René Fallet qui aura ces quelques lignes dans le déjà très populaire hebdomadaire Le Canard Enchainé :
« La voix de ce gars est une chose rare et qui perce les coassements de toutes ces grenouilles du disque et d’ailleurs. Une voix en forme de drapeau noir, de robe qui sèche au soleil, de coup de poing sur le képi, une voix qui va aux fraises, à la bagarre et… à la chasse aux papillons. »
Tonton flingueur ou tonton farceur ?
Tout est donc déjà dit en cette année 1953. Les années 60 et 70 confirmeront l’essai de la décennie précédente. Alors que le monde défile et manifeste, Brassens assumera ce texte à contre-courant des idéologies majoritaires : Mourir pour des idées, non merci chantera notre bonhomme. Quant à qualifier de phallocrate l’auteur des Passantes ou de la complainte de filles de joie… Laissons-cela aux aigri.e.s de tout poils.
La suite vous la connaissez plus ou moins : environ 200 chansons, des rues, des écoles, des bibliothèques, des salles de spectacle, des monuments qui portent aujourd’hui son patronyme. Une silhouette avec cette pipe au bout du bec, un esprit vagabond, libertaire et anticonformiste pour une aura dans le monde francophone qui a dépassé depuis fort longtemps les frontières de l’hexagone. Brassens est célébré des Antilles à l’Afrique francophone (Sam Alpha, Kristo Nupumby), de l’Espagne à la Reunion (Paco Ibanez, Danyel Waro) de l’Occitanie à la Kabilye (Claude Marti, Idir)… Et à entendre ces derniers temps pré-électoraux tous ces débats stériles et autres scandales peu ragoutants, on se dit qu’un Brassens avec son bel accent virevoltant, aurait eu une belle matière première si il était encore avec nous du haut de ses 100 ans.
Vinyles, CD, DVD, coffrets, hommages, livres… Un très large choix
Des hommages tous azimuts dont on notera le très attendu Brassens Dans Le Texte par François Morel & Yolande Moreau qui, dans un chouette livre-disque, revisitent avec leur bagout particulier l’œuvre du Sétois. Théatral, émouvant, vivant et souvent très drôle, évidemment.
Mais vous pouvez aussi compter sur Maxime Le Forestier qui n’a jamais caché son adoration totale pour Brassens ou une partie de la nouvelle scène électro & rock qui collectivement, a gravé un beau moment capturé un peu plus tôt dans l’année à la Cooperative de Mai. Un tribute-album/hommage qui peut surprendre mais qui reste dans la droite ligne de ces « détournements » sonores qui remplissent les bacs des disquaires depuis la disparition du chanteur. A l’image d’un hommage jazz tout récent qui est publié ces jours-ci egalement…
Des enregistrements publics inédits en vinyles ou DVD (merci l’INA). Des coffrets en exclu (merci la Fnac). Des compilations bien fichues et joliment emballées. Des livres sous diverses formes (biographies, BD, entretiens, recueil de textes, jeunesse…), des DVD, des spectacles… Il ne vous reste plus qu’à venir vous promener dans les rayons réels et virtuels pour découvrir ce vaste choix éditorial qui célèbre les 100 ans du légendaire chanteur.
Un large choix que vous pourrez aussi retrouver à l’occasion des 100 ans de Georges Brassens au rayon disques de la Fnac Montparnasse. On vous y attend !
A vous de jouer !
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