Stars des réseaux sociaux, commerciaux inconscients des grandes marques de ce monde, les enfants sont élevés dans un monde où l’image de soi est avant tout une chose publique. Dans Les enfants sont rois, Delphine de Vigan raconte la vie d’une mère de famille qui a fait de ses enfants des influenceurs, pour le meilleur et pour le pire.
Vivre pour être vu
Se mettre en scène, fabriquer à partir de sa vie une fiction, écrire sa « story » : les réseaux sociaux font de leurs utilisateur·ice·s les acteur·ice·s de leur propre vie. Une vie rêvée, une vie fantasmée. Mais les réseaux sociaux sont-ils des espaces d’aliénation ou outils de création ? Parce que rien n’est jamais tout noir ou tout blanc, la réalité est certainement bien plus complexe… et pernicieuse. Ce sont ces mécanismes que Delphine de Vigan analyse et décortique avec méthode, elle qui n’est inscrite sur aucun réseau, mais qui se veut une observatrice chevronnée du monde contemporain. Dans Les enfants sont rois, elle ne fait pas seulement une critique des réseaux tels que nous les connaissons, mais propose une analyse prospective : quelle sera notre vie sociale numérique dans une dizaine d’années ?
Les enfants, stars ou victimes ?
Le sujet de l’exposition au regard des autres est traité en profondeur par Delphine de Vigan, qui interroge surtout l’utilisation de l’image d’un enfant, et la monétisation de cette image. Quand on est parent, a-t-on le droit de vendre l’image de son enfant, pendant des années ? Au-delà de l’aspect juridique, c’est un problème moral et sociétal qui pose l’auteure. L’héroïne de Les enfants sont rois, Mélanie, se trouve brutalement face à ces considérations lorsqu’un de ses enfants, influenceur pour de nombreuses marques, disparaît…
La belle trajectoire de Delphine de Vigan
De l’avènement de la téléréalité au début des années 2001 aux années 2030, Delphine de Vigan brosse un panorama sans concessions du monde de l’image. Comme souvent chez l’auteure, les problèmes des adultes occultent les douleurs des enfants. Comme dans son premier roman, No et moi, où le chagrin des parents éclipsait le mal-être d’une jeune fille en deuil elle aussi. Ou dans Les Loyautés où un ado se mettait à boire pour encaisser les secrets de famille confiés par ses parents. Page après page, les livres de Delphine de Vigan nous invitent à ouvrir les yeux sur les victimes invisibles de nos maux contemporains.
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Parution le 4 mars 2021 – 352 pages
Les enfants sont rois, Delphine de Vigan (Gallimard) sur Fnac.com
