Avec les toits pour seul refuge, le jeune soldat fuit le choléra qui ravage la Provence en 1830, autant que la barbarie contamine le cœur des hommes comme la peste.
« L’homme est aussi un microbe têtu. »
Un homme traqué
Lorsqu’Angelo Pardi, jeune colonel de hussards, arrive en Provence en 1832, pour fuir son Italie natale après avoir tué en duel un officier autrichien – acte qui le condamnera à coup sûr à la potence – il ne se doute pas qu’il va se retrouver poursuivi par un autre danger tout aussi fatal.
Le choléra dévaste la région. L’épidémie progresse vite et rien ne semble pouvoir l’arrêter. Traversant le pays à la recherche de son frère de lait, Giuseppe, Angelo galope à travers les sinueux sentiers bravant tous les dangers. Mais son périple ne fait qu’attirer l’opprobre sur sa personne. Accusé de répandre la maladie et même d’empoisonner les fontaines, celui-ci ne trouvera bientôt plus la paix que sur les toits de Manosque, aboutissement de son parcours, et son seul recours.
« On l’entendait qui disait sur un ton de harangue : « Il a jeté du poison dans la fontaine des Observantins. C’est un complot pour faire périr le peuple. C’est un étranger. Il a des bottes de milord. » »
Le sauveur de l’humanité
C’est d’abord la puissance d’évocation de Jean Giono qui impressionne. Sa maîtrise de la narration donne lieu à des descriptions flamboyantes de la Provence au XIXe siècle. Une nature belle et éternelle qui ne saurait être entachée par tout ce que l’humanité a de plus vil.
Perché sur ses hauteurs, Angelo ne peut qu’observer avec horreur les comportements barbares de ses contemporains. Car, comme dans La Peste de Camus (lire notre article La Peste), l’épidémie est une allégorie. Elle agit ici aussi comme « un révélateur, un réacteur chimique qui met à nu les tempéraments », comme le décrit lui-même son auteur.
Devant l’amer constat d’une humanité dévorée par la peur, l’égoïsme et la haine, Le hussard sur le toit met aussi en valeur des qualités fondamentales que sont la bonté, le dévouement et l’amour, qu’Angelo trouvera bientôt en la personne d’une belle aristocrate nommée Pauline, qui le recueillera envers et contre tout. Jamais contaminé, passant à travers les mailles de tous les filets, le jeune soldat semble protégé par sa grandeur morale, comme immunisé de tous les maux de la Terre.
Cette fable écrite sous forme d’un roman d’aventures épique et audacieux publiée en 1951, sera adapté au cinéma par Jean-Paul Rappeneau en 1995 avec Juliette Binoche et Olivier Martinez. Désormais classique et chef-d’œuvre de la littérature française, sa lecture n’a peut-être jamais été aussi urgente.
Vous pouvez retrouver notre sélection d’actualité sur les romans épidémiques dans Les Curiosités littéraires.
« Venez, penchons-nous à cette fenêtre, non pas pour perdre l’équilibre mais pour le retrouver. »
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Parution originale novembre 1951 – 499 pages
Le hussard sur le toit, Jean Giono (Gallimard) sur Fnac.com
Aller + loin : 1 mois/1 classique, la bibliothèque idéale
Photo d’illustration © JacekAbramowicz sur Pixabay