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Le Web3 contient-il “les graines d’un cauchemar dystopique” ?

18 avril 2022
Par Marion Piasecki
Le Web3 a encore beaucoup de problèmes à résoudre.
Le Web3 a encore beaucoup de problèmes à résoudre. ©Morocko / Shutterstock

Pour ses défenseurs, le Web3 est une utopie où la blockchain règlera beaucoup de problèmes que nous avons sur internet aujourd’hui. Le cabinet d’analyse Forrester a tempéré cet enthousiasme dans un rapport publié fin mars.

« Le Web3 promet un meilleur futur numérique mais contient les graines d’un cauchemar dystopique », tel est le titre du rapport au vitriol publié par le cabinet d’analyse américain Forrester. Il y présente les principaux arguments en faveur de la blockchain et des cryptomonnaies pour mieux les remettre en question.

Une décentralisation peu accessible

L’un des principaux arguments du Web3 est le fait de décentraliser internet pour qu’il soit aux mains des utilisateurs plutôt que des grandes entreprises comme les GAFAM. Forrester considère que nous en sommes encore loin, puisque les cryptomonnaies se concentrent déjà autour de quelques acteurs principaux, comme Bitcoin et Ethereum. Elles favoriseraient donc les riches et la formation de monopoles.

D’après lui, le problème des inégalités à l’éducation au numérique sera d’autant plus criant dans le Web3. Par exemple, l’utilisation de code source ouvert (open source) ou de contrats intelligents (smart contracts) n’a de sens que pour les personnes qui comprennent comment le code fonctionne. De même pour ce qui est fait des données personnelles — un point-clé du Web3 — le cabinet estime que la majorité des utilisateurs ne s’en préoccupera pas, par manque de connaissances ou par indifférence.

Un univers dérégulé et risqué

Le cabinet Forrester recommande de faire preuve d’une « extrême prudence » vis-à-vis du Web3, particulièrement pour les investisseurs car c’est « un environnement dérégulé où les actions des arnaqueurs et des fraudeurs font dériver les meilleures intentions ». Les arnaques auraient une visibilité plus importante que les projets qui ont réellement de la valeur.

La question de la sécurité est donc centrale : si l’on ne peut pas faire confiance aux entreprises et aux banques actuellement, pourquoi ferait-on confiance, dans le Web3, à une poignée de développeurs inconnus ? Le manque de protection légale des consommateurs — une conséquence logique de la décentralisation — est en effet un problème épineux sur lequel planchent les acteurs des blockchains et des cryptomonnaies.

Finalement, Forrester s’inquiète que le Web3 ne fasse que reproduire d’anciens problèmes : « Nous voyons déjà les mêmes tendances de créations de monopoles, d’exploitation et de valorisation que les enthousiastes du Web3 accusent d’avoir sali l’actuel World Wide Web. »

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Article rédigé par
Marion Piasecki
Marion Piasecki
Journaliste