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Les plus jeunes se méfient des lunettes connectées

01 septembre 2025
Par Pierre Crochart
Les Ray-Ban x Meta.
Les Ray-Ban x Meta. ©Ray-Ban

Vendues comme la prochaine révolution technologique après les smartphones, les lunettes connectées n’intéressent pas la génération Z.

Alors que Meta décline ses best-sellers avec Oakley et que Google a affirmé vouloir reprendre le chantier des Google Glasses, un vent de rejet commence à monter au sujet des lunettes connectées. Présentées par leurs promoteurs comme les appareils qui parviendront à remplacer les smartphones, les smart glasses posent d’importantes questions en matière de confidentialité, qui mettent particulièrement mal à l’aise les Gen Z (les personnes nées à la fin des années 1990).

Les jeunes adultes s’inquiètent des lunettes connectées

Le Washington Post se fait le relais d’une tendance qui monte sur les réseaux sociaux, en particulier TikTok. Le journal américain partage l’histoire d’une jeune femme qui raconte son malaise après une visite dans un salon de beauté, où son esthéticienne portait une paire de lunettes connectées Meta Ray-Ban. Celle-ci aurait assuré que « la batterie [n’était] pas chargée » et qu’elles ne pouvaient donc pas filmer la séance d’épilation de sa cliente. Pourtant, le récit de cette jeune femme a pris de l’ampleur sur la plateforme de vidéo et, depuis, un véritable flot de témoignages similaires sont partagés sur TikTok.

« Pouvez-vous imaginer travailler pour un service de relation client, pleurer pendant votre pause déjeuner, et en plus avoir à vous soucier que personne ne soit en train de vous enregistrer à votre insu ? », se demande notamment Vanessa Orozco dans une vidéo qui dépasse les 10 millions de vue.

@chismepod

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♬ original sound – chisme pod ❤️‍🔥

Une gêne visiblement partagée par la plupart des quelque 14 000 commentaires postés en réponse, qui imaginent des scénarios tous plus embarrassants les uns que les autres dans lesquels les lunettes connectées de Meta jouent un rôle aggravant. « Les gens de ma génération en particulier sont assez inquiets concernant le futur de la technologie, et ce que cela signifie pour nous et notre vie privée », commente la tiktokeuse de 26 ans dans les colonnes du Washington Post.

Un choc des générations

Meta, propriétaire des réseaux sociaux Facebook, Instagram et WhatsApp, est déjà leader d’un marché encore naissant, avec une projection de 4 millions de paires de lunettes connectées vendues d’ici la fin de l’année 2025. Et les retours sont globalement très positifs : d’après le cabinet d’analyse des réseaux sociaux Sprout Social, plus de 74 % des posts mentionnant les Meta Ray-Ban au mois d’août sont qualifiés de « positifs ». Les 26 % restants sont composés d’utilisateurs et d’utilisatrices qui font part de leur inquiétude au sujet d’une technologie jugée invasive – quand bien même Meta assure avoir mis en place les barrières nécessaires pour lutter contre les abus.

En effet, les lunettes de la marque affichent systématiquement une lumière vive lorsqu’elles sont en train d’enregistrer. Le recouvrement de cette LED enfreint les conditions d’utilisation des lunettes, affirme Maren Thomas, porte-parole de Meta, au journal américain. Pourtant, des tutoriels expliquant comment désactiver cette lumière culminent à plus d’un million de vues sur YouTube et les autres plateformes, et des autocollants permettant de réduire la visibilité de la lumière indiquant l’enregistrement se vendent pour quelques centimes sur les marketplaces.

Pour la chercheuse Alice Marwick, directrice de l’institut Data & Society, ce rejet de la part des Gen Z s’explique par différents facteurs. Le premier est que cette génération a grandi en étant plus exposée à la notion de consentement – qu’il soit d’ordre sexuel, ou tout simplement de droit à l’image, comme ici. C’est aussi une génération très consciente de son empreinte numérique. À l’inverse des millennials (nés au début des années 1990), qui sont dans le partage excessif de leur vie sur les réseaux, les Gen Z sont plus prudents et conscients que le contenu de leurs posts peut leur porter préjudice, notamment dans une recherche d’emploi.

« J’ai l’impression que cela fait partie de ma vie, d’être constamment inquiète au sujet de ma vie privée ou que mes données soient volées et utilisées pour de mauvaises raisons », résume Vanessa Orozco.

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Article rédigé par
Pierre Crochart
Pierre Crochart
Journaliste