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La Tapisserie de Bayeux au cœur d’une controverse sur son prêt au British Museum

25 août 2025
Par Sarah Dupont
Tapisserie de Bayeux, détail. Illustration de la bataille de Hastings en 1066, conquête normande de l'Angleterre.
Tapisserie de Bayeux, détail. Illustration de la bataille de Hastings en 1066, conquête normande de l'Angleterre. ©Isogood_patrick/Shutterstock

Le projet de transfert de la Tapisserie de Bayeux à Londres suscite des critiques. Tandis que des spécialistes alertent sur la fragilité de l’œuvre, l’Élysée assure que son déplacement est techniquement possible et sans danger.

Qui l’eût cru ? Vieille d’un millénaire, la Tapisserie de Bayeux est aujourd’hui au centre d’une controverse. Alors qu’elle doit être prêtée au British Museum de Londres à partir de septembre 2026 jusqu’à l’été 2027, l’historien de l’art Didier Rykner a lancé une pétition pour s’opposer à ce prêt, dénonçant un « véritable crime patrimonial ». Elle a déjà recueilli plus de 52 000 signatures.

Militant de la préservation du patrimoine, régulièrement pointé pour ses positions conservatrices, il a interpellé Emmanuel Macron afin qu’il renonce à ce projet. Interrogé par l’AFP le 22 août, Philippe Bélaval, chargé de mission auprès de l’Élysée, assure que l’œuvre « n’est pas intransportable » et que « l’hypothèse principale est le transport routier par camion ».

Mobilisation en Normandie

La contestation s’est également invitée dans la rue. Le 23 août, une quarantaine de personnes ont manifesté à Bayeux contre le transfert de l’œuvre, réunie à l’appel des Patriotes normands, mouvement d’extrême droite proche de Florian Philippot. Selon Ouest-France, leurs slogans visaient directement Emmanuel Macron, accusé d’avoir pris une « décision unilatérale » de céder la tapisserie au Royaume-Uni.

La fragilité du textile est au cœur des inquiétudes. Dans une vidéo diffusée en février par la préfecture du Calvados, Cécile Binet, conseillère musées de la DRAC Normandie, affirmait que la tapisserie était « trop fragile pour être déplacée sur une grande distance » et que « toute manipulation supplémentaire » constituait « un risque pour sa conservation ».

Didier Rykner a également rappelé à Reuters qu’elle était « très fragile. Il y a des déchirures et des trous dans le tissu. Le moindre mouvement, la moindre vibration peuvent causer des dommages », estimant qu’on « ne peut pas utiliser une œuvre d’art fragile à des fins diplomatiques ».

Les arguments des partisans du prêt

Face à ces critiques, l’Élysée insiste sur les garanties scientifiques. Philippe Bélaval a indiqué à l’AFP qu’« une étude extrêmement précise, signée par plusieurs personnes », a été menée début 2025 et détaille « les préconisations à prendre en termes de manipulation et de transport ». Il a ajouté que le ministère de la Culture réalisait « une étude complémentaire sur la résistance aux vibrations de la tapisserie et la possibilité de les supprimer pendant le transport, pour qu’il soit sans danger ».

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Le British Museum, futur lieu d’accueil, a pour sa part assuré dans un communiqué relayé par Reuters que « son équipe de conservation et de gestion des collections est expérimentée dans la manipulation et l’entretien de ce type de matériel » et qu’elle travaille déjà en lien avec ses homologues français.

Un récit brodé millénaire

La Tapisserie de Bayeux, longue de 70 mètres, a été réalisée à la fin du XIe siècle. Elle retrace la conquête de l’Angleterre par Guillaume, duc de Normandie, qui deviendra Guillaume le Conquérant après sa victoire à Hastings en 1066. Exposée durant des siècles dans la cathédrale de Bayeux, elle n’a quitté la Normandie qu’à deux reprises : en 1803, sur ordre de Napoléon, et en 1945, lorsqu’elle fut présentée au Louvre après la Libération. Comme le rappelle France Bleu, elle n’a donc jamais traversé la Manche.

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