Directeur artistique et illustrateur, Paiheme est connu pour ses dessins minutieux et son style vintage. Entre deux salons dédiés à la pop culture, l’artiste s’est associé à Apple pour un atelier. L’objectif ? Nous apprendre à dessiner notre premier manga sur un iPad. Incroyable, mais vrai : on a réussi à reproduire un bol de rāmen, alors que notre capacité artistique se limitait jusqu’alors à un bonhomme bâton. Conquis par son travail et son expertise, on lui a demandé ses meilleurs tips pour se lancer.
À quoi ressemblaient vos premiers dessins ?
Mes premiers croquis remontent sûrement à la maternelle. Comme tous les enfants, je faisais des dinosaures [Rires]. Je dessinais déjà beaucoup à cette époque, puis j’ai lâché l’affaire en grandissant. Je me suis lancé dans la musique, j’ai commencé des études de droit, puis je me suis remis au dessin un peu par hasard. J’ai retrouvé un ami d’enfance qui étudiait l’art, et j’ai halluciné en voyant les progrès qu’il avait pu faire. Je me suis dit que j’étais en train de passer à côté de quelque chose d’important. J’ai quitté la fac aussitôt, je me suis lancé dans une école de dessin et j’ai redécouvert les mangas et les animes grâce à mon pote, qui était très fan de toute cette culture japonaise.
Comment le dessin sur tablette s’est-il imposé à vous ?
J’ai terminé les études en 2018 et j’ai eu ma première tablette un an plus tard. Un copain m’avait prêté son iPad Pro pour que je puisse le tester durant trois mois et j’ai adoré. Je le voyais s’en servir très régulièrement, il le prenait partout où il allait, tout le temps. Ce n’était pas mon outil de prédilection, mais j’ai rapidement pris le réflexe de l’utiliser et j’ai réalisé que je m’en servais souvent.
J’ai fini par rendre la tablette à mon pote et acheter le même modèle. C’est bien plus intuitif que l’ordinateur, donc j’ai réussi à me l’approprier très vite. Il m’a suffi de deux mois pour être à l’aise dessus. D’autant plus que c’est ultrapratique : on peut l’emporter partout avec soi, les applications se lancent en deux secondes et on peut exporter et partager nos dessins très facilement sur les réseaux sociaux.
Quels sont vos indispensables pour dessiner sur une tablette ?
Si vous avez le budget, je vous recommande de commencer avec un iPad Pro. C’est hyper ergonomique et très intuitif. L’application Procreate est facile à prendre en main, même quand on ne la connaît pas. Habituellement, j’utilise Photoshop et je travaille sur mon ordinateur avec une tablette graphique, mais je me suis vite rendu compte que le passage d’un outil à l’autre était vraiment facile. Ça se fait en deux secondes.
Le stylet est aussi un élément important. Je travaille avec l’Apple Pencil Pro, il est très quali’. On peut le customiser, ajouter un grip ou une bague pour avoir un meilleur maintien. Je ne l’utilise pas spécialement, mais beaucoup de mes potes ont ajouté sur leur tablette une sorte de film plastique qui rappelle l’effet du papier. C’est comme un débloqueur de pages blanches, ça nous évite de travailler sur une surface à laquelle on n’est pas habitué et qui pourrait nous bloquer dans notre processus créatif.
Quels sont les meilleurs raccourcis que vous avez découverts sur Procreate ?
Le retour en arrière est indispensable, et il suffit de tapoter deux doigts en même temps sur l’écran. Le double tap sur le stylet permet d’alterner entre le stylo et la gomme. Une petite manip dans le menu suffit pour dupliquer des éléments et c’est très pratique pour reproduire des parties sans pour autant les dessiner à nouveau. On gagne beaucoup de temps. Pour les bulles de dialogue, je vous conseille de dessiner une ellipse avec le stylet, puis de maintenir un doigt sur l’écran pour créer une forme parfaite.
Quels conseils donneriez-vous à une personne qui souhaite se lancer ?
Le premier, ce serait d’apprendre à bien utiliser la perspective dans Procreate. Ça permet de choisir un angle et un cadrage pour créer son manga et ça détermine la symbolique de la scène, l’intensité qu’on lui donne. On gagne beaucoup de temps, car les traits sont aimantés et se posent facilement sur les repères du dessin. Par exemple, dessiner une ville vue du dessus avec un effet fish-eye peut être assez difficile quand on le fait à la main, sur une feuille de papier. Là, c’est beaucoup plus simple grâce à cette aide.
Le numérique nous permet aussi d’avoir le droit à l’erreur. On peut toujours revenir en arrière, et c’est très cool quand on débute, car on peut se permettre de dessiner des bêtises qu’on n’oserait pas faire à l’encre de Chine, utilisée par les mangakas traditionnels.
Mon plus grand conseil, ce serait de poster son travail sur les réseaux sociaux. Le regard des autres sera souvent plus tendre que le nôtre. On s’inflige toujours plus de critiques. Il faut oser se lancer et être actif.