Décryptage

Paper Mario fête ses 25 ans : mais quel est le secret de la longévité de la série ?

21 mai 2024
Par Valérie Précigout (Romendil)
Paper Mario fête ses 25 ans : mais quel est le secret de la longévité de la série ?
©Nintendo

Née au tout début des années 2000, la branche des Paper Mario est le fruit d’une histoire longue de près d’un quart de siècle. De quoi justifier le lancement d’un remake de celui qui reste probablement le meilleur épisode de la série.

Pour bien comprendre la raison d’être de la famille des Paper Mario, il faut d’abord s’intéresser à son développeur. À la fin des années 1990, le studio japonais Intelligent Systems a déjà réalisé un grand nombre de jeux pour les premières consoles de Nintendo. Mais il est surtout l’un des créateurs les plus respectés dans le domaine du jeu de rôle tactique grâce à sa série la plus prestigieuse : Fire Emblem.

Ce n’est pourtant pas à lui que l’on doit la primeur d’avoir fusionné l’univers Mario avec les routines du RPG. En 1996 déjà, l’équipe de Squaresoft et une partie des créateurs de la saga Final Fantasy avaient démontré qu’une telle alchimie renfermait un vrai potentiel dans le fameux Super Mario RPG.

Les fondamentaux établis dans Super Mario RPG ont ouvert la voie à la série Paper Mario.

Bien qu’audacieuse à de nombreux égards, la branche des Paper Mario doit tout à ce titre précurseur qui a également inspiré une autre série hybride combinant plateforme et RPG : celle des Mario & Luigi qui a fait fureur sur les consoles portables de Nintendo.

Une voie tracée par Super Mario RPG

À tout seigneur, tout honneur : Nintendo ayant déjà offert aux possesseurs de Switch une refonte étincelante de Super Mario RPG fin 2023, le remake d’un épisode de Paper Mario semblait inéluctable. Pour autant, ce n’est pas le tout premier volet de la série qui a été choisi dans le cadre de cet anniversaire, mais son successeur paru en 2004 sur GameCube.

C’est déjà le vingtième anniversaire du jeu Paper Mario : la porte millénaire.

Il faut dire que Paper Mario : la porte millénaire est considéré par un grand nombre de fans comme le chapitre le plus mémorable de la franchise. Et quel meilleur moyen de célébrer les 20 ans de ce titre que de rappeler aux nouvelles générations en quoi il a contribué à bousculer les codes de la saga en s’appuyant sur une version entièrement remise au goût du jour ? Disponible à partir du 23 mai sur Nintendo Switch, ce remake nous donne l’occasion de nous interroger sur les ingrédients qui expliquent la longévité de cette série.

Fusionner le meilleur des deux genres

Dès la fin de l’année 2000 au Japon (et l’année suivante dans le reste du monde), le premier Paper Mario reprend à son compte les lignes directrices de Super Mario RPG. Mais puisqu’il n’est pas question de venir concurrencer les meilleurs épisodes du plombier sur le ring de la plateforme pure, l’opus doit assumer autant que possible son statut de jeu de rôle. Un genre qui, à cette époque, a tendance à rebuter une partie des joueurs peu friands des systèmes au tour par tour.

Les décors de papier s’imposent dès le premier volet de la série sur N64.©Nintendo

La solution trouvée consiste alors à intégrer discrètement des éléments de plateforme au sein des combats en faisant intervenir une notion de timing qui rend les affrontements beaucoup moins passifs.

Devoir interagir à un instant précis afin d’optimiser une attaque ou de réduire les dégâts subits rend le tout nettement plus fun et dynamique que dans la plupart des RPG traditionnels. Et, à l’instar de son maître à penser, Super Mario RPG, Paper Mario dote ses personnages d’une gamme de moyens offensifs si étendue qu’elle renouvelle continuellement le timing à respecter pour obliger le joueur à rester sur ses gardes.

L’art du pliage en 2D

Si la copie livrée par Intelligent Systems pour son premier Paper Mario sur N64 apparaît aujourd’hui quelque peu scolaire, la série décolle véritablement dès son deuxième opus. Paper Mario : la porte millénaire profite aussi des capacités offertes par la GameCube pour exploiter de manière encore plus astucieuse ses décors faits de papier mâché. L’impression d’évoluer dans des environnements composés d’éléments en carton-pâte fonctionne à merveille et inspire toutes sortes d’énigmes d’un genre nouveau.

©Nintendo

De nombreux bonus peuvent ainsi se cacher derrière certains pans du décor et Mario lui-même possède toutes les caractéristiques d’une feuille de papier que l’on peut plier ou froisser à volonté. Cela débouche sur une multitude de transformations inédites qui permettent de surmonter les obstacles en pliant Mario en avion de papier, en petit navire ou même en boule chiffonnée pour se faufiler dans des trous.

Le fait que les décors et les personnages soient en papier doit être mis en perspective avec la réalisation 2D afin de trouver d’autres solutions pour avancer dans le jeu. Notre héros étant matérialisé sur un seul plan, son absence de profondeur lui permet par exemple de se tourner dans le sens le plus fin d’une feuille de papier pour se glisser entre des barreaux.

Mario se plie en quatre dans le remake de Paper Mario : la porte millénaire.

Les épisodes suivants ont logiquement continué d’explorer le vaste champ des possibilités offertes par cet élément singulier pour se distinguer habilement des autres titres du genre. Mais il a tout de même fallu attendre 2016 pour voir les décors en papier recouverts de peinture dans Paper Mario: Color Splash sur Wii U, qui barbouille le concept d’une bonne dose de plaisanteries colorées.

Quatre ans plus tard, Paper Mario: The Origami King allait encore plus loin sur Switch en repoussant l’art du pliage dans ses derniers retranchements. Sur 3DS aussi, Paper Mario: Sticker Star s’était amusé à peupler l’univers du jeu d’autocollants à collectionner pour redéfinir habilement les rouages de la série. On se retrouvait ainsi à devoir gérer un véritable album d’images, incluant même des stickers brillants, pour progresser dans l’aventure.

Paper Mario: Color Splash sur Wii U (2016).©Nintendo

Un humour théâtral

Si l’humour est une composante clé dans les RPG dérivés de l’univers Mario, il trouve un moyen d’expression particulièrement original au sein de la branche des Paper Mario. Il ne se passe pas un instant sans que l’on ait envie d’esquisser un sourire devant la teneur souvent décalée des dialogues.

On se délecte de l’absurdité des situations autant que de l’efficacité de la mise en scène durant les combats. Car les affrontements ont lieu sur une scène de théâtre, avec un vrai public qui réagit en fonction de notre performance. Enchaînez les boulettes et vous ne manquerez pas de vous faire huer par des Koopas déchaînés et des Toads en furie.

©Nintendo

Mieux vaut donc bien maîtriser le timing pour éviter de voir le public venir jouer les trouble-fêtes en plein duel. Surtout que la ferveur des spectateurs est le seul moyen d’accumuler l’énergie nécessaire au déclenchement des pouvoirs les plus désopilants.

Tout cela confère d’ailleurs à Paper Mario : la porte millénaire une profondeur de jeu bien plus appréciable que dans Super Mario RPG grâce à une plus grande richesse tactique. Il arrive même que certains éléments du décor s’abattent sur la scène en écrasant tout un groupe d’ennemis sous leur poids.

©Nintendo

Mais c’est surtout en dehors des combats que la série Paper Mario déploie le plus d’idées farfelues pour nous faire rire aux larmes. Entre le design délirant des compagnons du plombier et le ridicule des moyens utilisés pour s’extirper des situations les plus folles, tous les Paper Mario ont en commun cette envie insatiable de provoquer l’hilarité. On en ressort avec le sentiment d’avoir assisté à un festival de bouffonneries complètement déraisonnable qui s’adresse réellement à toute la famille.

Des invités pas comme les autres

Non content de permettre à Mario de s’entourer d’une galerie de compagnons improbables, Paper Mario : la porte millénaire a le bon goût de nous mettre aux commandes de Bowser et de la princesse Peach. Les règles sont alors totalement remises à plat pour proposer des approches inédites dans l’esprit des deux figures iconiques de la saga. Sous la carapace du roi des Koopas, on nous invite par exemple à faire des ravages dans des niveaux de plateforme où quasiment tous les obstacles sont destructibles.

©Nintendo

De son côté, la princesse du royaume Champignon est forcée de dialoguer avec un super-ordinateur aux préoccupations existentielles. Du grand n’importe quoi totalement assumé par les concepteurs de cet épisode qui ont pris un malin plaisir à sortir les personnages de leur zone de confort pour les forcer à réagir de manière inédite.

Une approche que Super Paper Mario a de nouveau développée sur Wii en 2007, donnant même à Luigi une occasion de s’illustrer à sa façon. Cet épisode très audacieux avait aussi la particularité de combiner le plan 2D avec une perspective en 3D pour nous permettre de jongler entre les dimensions d’une manière vraiment novatrice. Au fil de son existence, la saga est ainsi parvenue à faire preuve d’une inventivité sans cesse renouvelée qui explique en grande partie l’attachement des joueurs à son égard.

©Nintendo

Il n’y a bien que la famille des Mario & Luigi qui soit parvenue à pousser le délire aussi loin pour surprendre les fans avec des concepts totalement fous. Contre toute attente, l’intrusion d’éléments propres au jeu de rôle au sein de la franchise Mario ne l’a pas rendue plus austère, bien au contraire. Elle a réussi à engendrer une série de spin-offs décomplexés qui fonctionnent précisément parce qu’ils ne se prennent jamais au sérieux et s’amusent à détourner les codes de la saga avec un savoir-faire imparable.

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