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On y était : le concert enragé des Idles à Paris

14 mars 2024
Par La rédaction
Couverture du nouvel album “Tankg” des Idles.
Couverture du nouvel album “Tankg” des Idles. ©Idles

Idles est venu célébrer la sortie de son cinquième album studio, Tangk, dans un Zénith de Paris sold-out en 30 minutes. Ce soir-là, les foules se sont déchaînées au son des riffs nerveux du groupe post-punk britannique. Il fallait se cramponner.

Sur la scène mondiale actuelle, c’est sans aucun doute le groupe le plus engagé sur les questions de justice sociale. Ce n’est jamais niais ni plastique ; d’authentiques activistes, de vrais enragés. Leur dernier opus, Tangk, paru en février dernier, est un cri d’amour, un appel à la joie comme arme contre le contrôle et l’injustice sociale ; contre le renoncement, finalement. L’ensemble des titres sont pensés comme des hymnes communautaires, solidaires, pour nous aider à traverser l’époque tout en nous interpellant sur la nécessité de prendre soin de l’autre et de soi. Idles, sur disque comme à la scène, c’est une catharsis. Parce qu’entendre ces maux, c’est déjà les panser.

Jeudi soir, des milliers de fidèles fusionnaient pour célébrer « To keep going, to keep loving, to keep being ». Le groupe attaque l’intro, plutôt calme. La tension qui en émane est toutefois l’amorce de la déferlante qui s’abattra dès la deuxième chanson. Le public français est souvent long à la détente, dur à convaincre et peine à se lâcher. Alors, qu’avait-il mangé ce soir-là ? Dès le second titre, Colossus, deux pogos se forment dans la bouillonnante fosse. Les premières pintes de bière volent et éclaboussent. Ce ne sont que les premières d’une pluie de houblon qui tombera tout au long du concert.

L’art des Idles

Il ne faut pas attendre longtemps pour que le leader Joe Talbot harangue la foule autour des luttes en faveur des opprimés. Il suffit d’écouter les textes : pro-immigration, anti-masculinistes, pour la justice sociale et la classe ouvrière, mais aussi pour l’amour des autres et de soi. La signature d’Idles, c’est l’art de trancher. Le groupe oppose les codes poussés d’une virilité puissante et brutale – du post-punk transpirant, une grosse voix rauque, des tatouages de la tête aux pieds, une ligne de basse menaçante, des guitares électriques inquiétantes – à des textes sans ambages sur l’amour.

Joe a tout d’un dur à cuir, pourtant j’ai rarement entendu autant de fois le mot « love » dans la bouche d’un homme sur scène. Le mot « fuck » est aussi beaucoup revenu, mais ceux à qui il s’adresse le méritent sûrement. 

Clip de Colossus du groupe Idles.

Ce contraste est aussi visuel : le guitariste et ex-dentiste – comme quoi il faut croire en ses rêves – Mark Bowen est vêtu d’une grande robe rouge en tulle et, lorsque Joe proclame « nous nous moquons de ce que pensent les gens », il fait virevolter celle-ci dans tous les sens. Décidément, outre-Manche, « s’en foutre », c’est vraiment tout un art.

Pas de répit pour le Zénith, les morceaux s’enchaînent, les guitares résonnent comme un essaim d’abeilles. Le public braille absolument tous les hymnes du groupe et hurle avec ferveur des « Fuck the King ». Au pays de la Révolution, ces mots font échos. 

Un groupe enragé, mais surtout engagé

Idles ne peut pas nous quitter sans son hymne de stade et de festival : Danny Nedelko. Joe nous raconte que Dany, c’est son « frère de sang » qui a quitté l’Ukraine très jeune et qui a travaillé bravement pour s’en sortir. Cet hymne lui est dédié. Au-delà de ses origines, Danny Nedelko est aussi un artiste post-punk leader de l’excellent groupe Heavy Lungs. Avec ce titre, Idles célèbre le multiculturalisme. « Chez nous, vous êtes chez vous. Il est fait d’os, il est fait de sang, il est fait d’amour, il est fait de toi, il est fait de moi, unité » : les paroles sont changées ce soir-là et font écho aux situations conflictuelles actuelles ainsi qu’aux guerres qui font rage dans le monde.

Clip de Danny Nedelko des Idles.

Le concert touche à sa fin, et c’est le climax. La fosse est en éruption. Mark Bowen, toujours dans sa robe rouge sang, s’empare du micro, alors que les autres s’acharnent comme des démons fous sur leurs instruments. Il rappelle qu’Idles a toujours défendu les opprimés. Ça fait du bien à entendre, parce que rares sont les voix d’artistes qui s’élèvent en France pour dénoncer les injustices, quelles qu’elles soient.

Encore une fois, c’est la signature du groupe qui, depuis toujours, est fidèle à sa posture contestataire, héritage historique de la musique qu’il incarne. Ces artistes ont ce talent de ne jamais tomber dans un cliché. Pourtant, ils enfoncent des portes ouvertes quand leurs textes flirtent avec ce qu’on pourrait presque lire dans un livre de développement personnel. Le contraste est violent, mais même les « rude boys » pleurent. 

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Les Idles sont plus que généreux. Ils donnent tout sur scène et ça s’est vérifié au cœur du Zénith, à Paris. Il fallait le voir pour le croire. 

Les Idles seront de retour en France à l’occasion des festivals Les Eurockéennes de Belfort et Musilac à Aix-les-Bains.

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