Critique

Loss of Life : le retour de MGMT au sommet

23 février 2024
Par Benoît Gaboriaud
MGMT est de retour avec l'album “Loss of Life”.
MGMT est de retour avec l'album “Loss of Life”. ©Johnah Freeman

Figure emblématique d’un renouveau de la pop psychédélique survenu à la fin des années 2000, MGMT revient sur le devant de la scène après cinq ans d’absence et un léger essoufflement. En dévoilant Loss of Life sur le label Mom+Pop, le duo originaire de Middletown dans le Connecticut suscite un regain d’intérêt et s’offre un come-back réussi.

Voilà un groupe que nous avions presque enterré… À tort ! MGMT revient avec Loss of Life, un cinquième album studio gorgé de vitalité et fourmillant d’arrangements foutraques et inventifs. Oscillant ici entre euphorie et mélancolie, Andrew VanWyngarden et Ben Goldwasser explorent l’amour et les évolutions de la société tout au long de ces dix nouvelles chansons expérimentales, mais parfaitement entêtantes. Du grand art.

Retour aux sources d’Oracular Spectacular

En guise d’introduction, Loss of Life (part 2) donne la tonalité du disque. On entend ainsi les grésillements du vinyle sur la platine, ce qui nous immerge directement dans l’environnement sonore qui a fait le succès de MGMT : un savant mélange de sons saturés et 8 bits, leur signature depuis leurs deux premiers tubes de 2008, Time to Pretend et Kids.

MGMT. ©Johnah Freeman

Ainsi, ce cinquième opus s’inscrit dans la lignée directe de leur tout premier, Oracular Spectacular (2007), classé, selon le magazine Rolling Stone, 18e dans la liste des meilleurs albums de la décennie. Oubliez ce qui s’est passé entre-temps, MGMT retrouve sa superbe grâce à son énergie galvanisante et communicative. Preuve en est avec Mother Nature, le premier tube de cette belle collection. 

D’Oasis à Tears for Fears

D’après les deux acolytes, qui se sont rencontrés sur les bancs du collège, Mother Nature reprend leur « mythologie archétypale, où un héros convainc l’autre de prendre ses responsabilités. Ça sonne par moment comme du Oasis ». Néanmoins, cette puissante envolée lyrique évoque davantage les productions de Tears for Fears, notamment Sowing the Seeds of Love, le tube iconique du groupe britannique paru en 1989, constitué de ruptures mélodiques : la force de Loss of Life.

Clip de Mother Nature de MGMT.

Pour son retour, le duo américain n’a, en effet, pas choisi la voie de la facilité, et s’est affranchi des structures classiques ABABCB (intro, couplet, refrain, couplet, refrain, pont, refrain, outro), pour jouir d’une liberté totale, gage de créativité.

Chris en invité très spécial 

Clavecin, trompettes, carillons, guitare sèche ou électrique, batteries, chœurs féminins… le tout agrémenté d’arrangements électros et rétrofuturistes évoquant l’univers du jouet ainsi que du jeu vidéo made in 80’s, MGMT s’autorise tout, même un duo officiel : une première !

Pour l’occasion, Chris a posé sa voix sur Dancing in Babylon, une ballade flamboyante qui raconte l’histoire tragique de deux soldats qui tombent amoureux lors d’une guerre urbaine. Une collaboration touchante qui sied parfaitement à notre star nationale.

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Du grunge à la sauce MTV Unplugged

MGMT réaffirme ici son goût pour le rock alternatif des années 1990 à coups de batteries lourdes et saturées et de solos de guitare électrique comme on n’en fait plus, mais aussi avec le clip de Bubblegum Dog, dans lequel il rend hommage à l’esthétisme grunge revu à la sauce MTV Unplugged de ces années-là. 

Clip de Bubblegum Dog de MGMT.

Pour autant, Loss of Life n’est en rien passéiste. Le duo va de l’avant tout en jetant un coup d’œil dans le rétroviseur. Pour l’accoucher, les auteurs-compositeurs se sont entourés de leur collaborateur de toujours Dave Fridmann, Patrick Wimberly et Daniel Lopatin – plus connu sous son nom de scène Oneohtrix Point Never, qui compose essentiellement sur des synthétiseurs vintage. De ces collaborations fructueuses résultent des morceaux atmosphériques, épiques, et des portraits intimistes teintés de glam, dans lesquels le tandem a fait toute la place à la magie, qui opère à merveille.

Clip de Nothing to declare de MGMT.

Preuve en est avec le sublime et poignant Nothing to Declare, une balade lumineuse sur le regard des autres. Pour l’illustrer, le duo a fait appel à Joey Frank qui a mis en scène, dans le clip, Inga Petry, une militante pour le changement de regard sur le handicap. La jeune femme d’origine russe souffre d’une aplasie des membres supérieurs depuis la naissance. En émane un élan résolument bienveillant et positif, à l’opposé de tout misérabilisme. Malgré une instrumentation savamment réfléchie, véritable travail d’orfèvre, MGMT fait ici preuve d’une spontanéité rafraîchissante et d’une ouverture d’esprit qui fait du bien à entendre.

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