Rédigée en quelques secondes par le chatbot, à la demande d’un conseiller municipal de Porto Alegre, la loi en vigueur depuis deux semaines concerne les dépenses liées aux compteurs d’eau volés dans la ville.
Le 23 novembre dernier, une loi est entrée en vigueur à Porto Alegre, deuxième plus grande ville du sud du Brésil. Adopté à l’unanimité en octobre, les législateurs ignoraient alors que ce texte avait été rédigé par ChatGPT. Le conseiller municipal Ramiro Rosário, dépositaire du projet de loi a en effet révélé cette information fin novembre sur X (ex-Twitter), se réjouissant de cette réussite.
La loi en question concerne les dépenses liées aux compteurs de consommation d’eau. Submergé par les plaintes de ses électeurs à ce sujet, le conseiller municipal a demandé au chatbot de créer une proposition de loi empêchant la ville de facturer les propriétaires pour le remplacement de ces derniers lorsqu’ils sont volés, comme il l’a expliqué au Washington Post. Non seulement, ChatGPT l’a rédigé en quelques secondes, le robot conversationnel a aussi proposé deux idées auxquelles Ramiro Rosário n’avait pas pensé : fixer un délai de 30 jours pour le remplacement des compteurs d’eau volés et exempter les propriétaires du paiement de leurs factures d’eau si la ville ne respecte pas ce délai.
Une origine gardée secrète intentionnellement
Utiliser ChatGPT a ainsi permis au conseiller municipal de gagner du temps. « Si j’avais suivi la procédure habituelle, il m’aurait fallu des jours pour m’asseoir avec mon équipe et mes sources juridiques », a-t-il expliqué. Ramiro Rosário s’est également justifié sur la révélation tardive de l’origine du projet de loi. « Si je l’avais révélé plus tôt, la proposition n’aurait certainement même pas été soumise au vote », a-t-il déclaré à l’Associated Press. « Il serait injuste envers la population de courir le risque que le projet ne soit pas approuvé simplement parce qu’il a été écrit par l’intelligence artificielle », a-t-il ajouté.
Ramiro Rosário a aussi gardé l’origine de la proposition secrète pour provoquer un débat. « Tous les outils que nous avons développés en tant que civilisation peuvent être utilisés pour le bien et le mal. Raison pour laquelle nous devons montrer comment ils peuvent utiliser à bon escient », a-t-il indiqué, convaincu que l’humanité connaîtra une révolution technologique. Certains de ses pairs ont déploré le manque de transparence. Le président du conseil municipal, Hamilton Sossmeier, a ainsi décrié la méthode utilisée, craignant qu’elle crée un « précédent dangereux », avant de changer d’avis. « J’ai commencé à lire plus en profondeur et j’ai vu que, malheureusement ou heureusement, cela allait être une tendance », a-t-il déclaré.
Il n’est d’ailleurs pas le premier législateur au monde à faire appel à l’intelligence artificielle (IA) pour rédiger un projet de loi. En France, les députés ont par exemple examiné un amendement rédigé par ChatGPT dans le cadre du projet de loi relatif aux Jeux olympiques et paralympiques de 2024 à l’Assemblée nationale plus tôt cette année. Ce texte intègre notamment la possibilité d’une surveillance par des caméras intelligentes, capables de détecter des mouvements de foules et des comportements anormaux À l’initiative du député de Haute-Corse Jean Félix Acquaviva, l’amendement visait à alerter sur les risques de dérive de l’IA.